Fiche Documentaire n° 1814

Titre La place du travail social dans les écoles doctorales

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l'auteur principal

Auteur(s) JAEGER Marcel  
     
Thème Les choix stratégiques entre doctorat professionnel, doctorat professionnalisant, mention travail social d'un doctorat académique  
Type Forum, GT, Carrefour  

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Résumé

La place du travail social dans les écoles doctorales

En matière de statuts et de formations, la France se distingue de la plupart des autres pays : le choix français a été celui de l’enracinement dans les dispositifs de l’action sociale, avec des écoles professionnelles créées en dehors des universités, même si des liens parfois étroits entre les deux se développent. Pour autant, les professionnels développent des compétences parfois de haut niveau, participent à des activités de recherche et, notamment pour beaucoup de formateurs, s’impliquent dans des parcours universitaires.

Dans ce contexte, la Chaire de travail social du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) a été créée fin 2001 avec l’appui de la Direction générale de l’action sociale (aujourd’hui Direction générale de la cohésion sociale) et du secteur professionnel, pour valoriser l’expertise et les capacités de recherche des travailleurs sociaux. Son intitulé a été modifié en 2009 pour intégrer le champ plus large de l’intervention sociale. D’autre part, cette Chaire est en lien étroit avec le Laboratoire interdisciplinaire de sociologie économique (LISE-CNRS) et l’école doctorale, puisque les travailleurs sociaux sont de plus en plus nombreux à s’engager dans la production de thèses. Unique en son genre en France, cette Chaire est l’indication des possibilités de mise en synergie d’un établissement d’enseignement supérieur (le Cnam), d’un laboratoire du CNRS, d’une école doctorale et d’une filière dédiée au travail social et à l’intervention sociale, elle-même organisée autour d’un master de recherche et d’un master professionnel, avec deux mentions : l’une consacrée au management sous l’angle politique et stratégique ; l’autre à l’innovation socio-économique, en lien avec Jean-Louis Laville, titulaire de la chaire Relations de services.

Une nouvelle actualité se fait jour : l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), à l’occasion du projet de création d’une nouvelle école doctorale du Cnam, a incité en juillet 2010 au développement de « doctorats professionnels ». L’AERES entend valoriser ainsi des « rassemblements inédits de disciplines de recherche et d’enseignement correspondant souvent à des champs de pratiques professionnelles ou ayant pour objet les pratiques professionnelles ». Elle précise que le projet est « explicitement fondé sur un univers de références épistémologiques, théoriques et méthodologiques partagé et d’objets propres à ces champs de recherche privilégiant le travail, l’activité humaine, la transformation des activités, des personnes, des entreprises et des organisations ».

Au vu du nombre important de pays disposant de doctorats en travail social, la France fait figure de parent pauvre. Le projet de doctorat professionnel correspond à une forte attente du secteur social et médico-social. Dans cette perspective, la mise en débat d’un doctorat professionnel ou professionnalisant en travail social renvoie à des conceptions différentes de ce que pourra être ce doctorat, de façon à éviter de créer une sorte de sous-doctorat, moins valorisé. L’exemple anglais montre comment le doctorat professionnel peut être défini comme un diplôme destiné à des personnes qui ne visent pas particulièrement une carrière universitaire. On peut également établir une distinction entre le doctorat professionnel tourné vers la résolution de problèmes dans un cadre professionnel et le doctorat professionnalisant considéré comme une variante du doctorat académique, ces deux derniers ayant en commun la production de connaissances, mais dans un périmètre orienté vers les pratiques professionnelles. Pour ce qui est du Cnam, il est envisagé de concevoir un doctorat reconnu à part entière, avec une visée professionnalisante et pluridisciplinaire, validé comme un doctorat spécifique du Cnam comportant une mention travail social.

Bibliographie

Penser la participation en économie sociale et en action sociale (avec Brigitte Bouquet et Jean-François Draperi), Paris, Dunod, 272 p., 2009.

Guide du secteur social et médico-social, Paris, Dunod, 8° éd., 320 p., 2011.

Usagers ou citoyens ? De l’usage des catégories en action sociale et médico-sociale (dir.), Paris, Dunod, 259 p., 2011.

L’articulation du sanitaire et du social, Paris, Dunod, 3° éd., 201 p., 2012.

Présentation des auteurs

Marcel JAEGER est professeur titulaire de la Chaire de Travail social et d'intervention sociale au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam). Il y également directeur du Département « Droit, Intervention Sociale, Santé, Travail » et membre du Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (UMR LISE-CNRS).

Titulaire d’une licence de philosophie (1970), docteur en sociologie, sa thèse a été publiée sous le titre Le désordre psychiatrique - des politiques de santé mentale en France, aux éditions Payot (1981), avant qu’il n’obtienne le diplôme d'infirmier de secteur psychiatrique (1982), puis le Certificat d'Aptitude aux Fonctions de Directeur d'Établissement Social (1994). Il a occupé les postes de formateur, puis de directeur de l’école d’éducateurs spécialisés de Versailles (Buc Ressources), directeur du centre d'aide par le travail pour personnes handicapées mentales de Montesson (Yvelines), puis de l'Institut régional du travail social de Montrouge (Hauts-de-Seine) et de Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis).

Il est membre du Conseil supérieur du travail social et président du Conseil scientifique de l’Observatoire National de l’Enfance en Danger (ONED).

Communication complète

Depuis plusieurs années, les travailleurs sociaux se préoccupent de la mise en place effective en France du LMD, donc du D. Ils affirment surtout depuis longtemps l'existence de savoirs d'intervention spécifiques irréductibles aux connaissances existantes des disciplines scientifiques constituées. Cela implique l’affirmation d’une légitimité à produire de la recherche au titre du travail social, mais aussi de faire évoluer les formations supérieures au-delà des actuels masters, comme cela se fait déjà dans de nombreux pays.
1. La création d’une formation doctorale : une formule inédite
En matière de statuts et de formations, la France se distingue de la plupart des autres pays : le choix français a été celui de l’enracinement dans les dispositifs de l’action sociale, avec des écoles professionnelles créées en dehors des universités, même si des liens parfois étroits entre les deux se développent. Pour autant, les professionnels développent des compétences parfois de haut niveau, participent à des activités de recherche et beaucoup de formateurs s’impliquent dans des parcours universitaires .
Dans ce contexte, la Chaire de travail social du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) a été créée fin 2001 avec l’appui de la Direction générale de l’action sociale (aujourd’hui Direction générale de la cohésion sociale), de quelques universitaires et du secteur professionnel, pour valoriser l’expertise et les capacités de recherche des travailleurs sociaux. Son intitulé a été modifié en 2009 pour intégrer le champ plus large de l’intervention sociale. D’autre part, cette Chaire est en lien étroit avec le Laboratoire interdisciplinaire de sociologie économique (LISE-CNRS) et l’école doctorale, puisque les travailleurs sociaux sont de plus en plus nombreux à s’engager dans la production de thèses.
Unique en son genre en France, cette Chaire est l’indication des possibilités de mise en synergie d’un établissement d’enseignement supérieur (le Cnam), d’un laboratoire du CNRS, d’une école doctorale et d’une filière dédiée au travail social et à l’intervention sociale, elle-même organisée autour d’un master de recherche et d’un master professionnel, avec deux mentions : l’une consacrée au management sous l’angle politique et stratégique ; l’autre à l’innovation socio-économique, en lien avec Jean-Louis Laville, titulaire de la chaire Relations de services.
Une nouvelle actualité s’est faite jour : l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), à l’occasion du projet de création d’une nouvelle école doctorale du Cnam, a incité en juillet 2010 au développement de « doctorats professionnels ». L’AERES entend valoriser ainsi des « rassemblements inédits de disciplines de recherche et d’enseignement correspondant souvent à des champs de pratiques professionnelles ou ayant pour objet les pratiques professionnelles ». Elle précise que l’objectif est « explicitement fondé sur un univers de références épistémologiques, théoriques et méthodologiques partagé et d’objets propres à ces champs de recherche privilégiant le travail, l’activité humaine, la transformation des activités, des personnes, des entreprises et des organisations ».
Deux options se présentaient :
- un doctorat « professionnel » sur le modèle anglo-saxon, tel le « professionnal doctorate », le « doctorate in business administration », distinct du doctorat académique (PhD), ou encore sur le modèle français du doctorat de médecine ;
- un doctorat « professionnalisant », consistant en une mention ou une spécialité « travail social » du doctorat généraliste du Cnam, avec une double référence possible à la section 19 (sociologie) ou la section 70 (sciences de l’éducation) du Conseil national des universités (CNU).
La deuxième option a été finalement retenue par une décision du 29 avril 2013 de l’administrateur général du Cnam de créer deux spécialités du doctorat du Cnam, sachant que cet établissement public d’enseignement supérieur est en capacité de créer des diplômes : les « spécialités Doctorat Sociologie – travail social et Doctorat Sciences de l’éducation – travail social ».
S’il s’agit d’une avancée dans la reconnaissance d’une formation doctorale en travail social permettant la production de thèses sur les bénéficiaires, les dispositifs et les pratiques du travail social et de l’intervention sociale, ce doctorat « professionnalisant » — qui est une spécialité d’un doctorat académique classique — ne constitue pas toutefois le doctorat en travail social, revendiqué par certains. Si le travail social est reconnu comme une discipline professionnelle, il n’est pas reconnu en France comme une discipline scientifique entraînant la création d’une nouvelle section du Conseil national des universités.
En même temps, il s’agit de « vrais » doctorats : l’un intitulé « Sociologie – travail social » avec le code DOC48, aux côtés du doctorat « Sociologie du travail » (DOC04), l’autre intitulé « Sciences de l’éducation – travail social » avec le code DOC49 de l’Ecole doctorale du Cnam, aux côtés du doctorat « Formation des adultes » (DOC12), tous deux étant inscrits de droit au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) au titre des formations universitaires de niveau 1.
Pour le premier, le laboratoire de référence est le LISE-CNRS ; pour le deuxième, le Centre de recherche sur les formations (CRF). Les candidats ont donc deux voies possibles, avec des modes d’accès diversifiés (en formation initiale, en formation continue ou par la validation des acquis de l’expérience), sur la base commune d’une participation à des séminaires et d’une validation de 180 crédits.
2. Un éventail de possibles
Beaucoup d’autres pays, dans le cadre du système LMD (Licence master doctorat) en Europe ou dans des systèmes différents hors Europe, ont créé des doctorats en travail social.
En fait, il existe plusieurs formules qui justifient des choix tactiques ou stratégiques dans la construction de formations doctorales. Cela implique d’identifier chaque formule et ses implications, en la situant dans un contexte, en appréciant sa place à la fois dans l’éventail des formations professionnelles supérieures et dans les dispositifs de certification.
La mise en débat d’un doctorat « professionnel » ou « professionnalisant » en travail social renvoie à des conceptions différentes de ce que peut être une formation doctorale, de façon à éviter de créer une sorte de sous-doctorat, ou du moins un doctorat moins valorisé. L’exemple anglais montre comment le doctorat « professionnel » peut être défini comme un diplôme destiné à des personnes qui ne visent pas particulièrement une carrière universitaire.
On peut également établir une distinction entre le doctorat « professionnel » tourné vers la résolution de problèmes dans un cadre professionnel et le doctorat « professionnalisant » considéré comme une variante du doctorat académique, ces deux derniers ayant en commun la production de connaissances, mais dans un périmètre orienté vers les pratiques professionnelles.
3. Comment lier savoirs professionnels et savoirs académiques dans une formation doctorale ?
La formation doctorale s’inscrit dans une démarche de recherche et n’a de sens que si les doctorants sont impliqués dans la vie de laboratoires. Du côté du travail social, les liens entre la formation professionnelle supérieure et la recherche sont plus que jamais mis en avant dans un contexte de modifications profondes du paysage et de perte de repères.
Au moment où le Plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale (janvier 2013) se met en place, la question de la refondation du travail social ne passe pas seulement par une valorisation de l’expertise des travailleurs sociaux, ce à quoi contribue la mise en œuvre de formations doctorales spécifiques. Un autre aspect mérite d’être souligné : les mutations des publics, des politiques sociales, des institutions et des pratiques impliquent, en effet, une expertise sans cesse actualisée par la construction de connaissances nouvelles.
Si les questions épistémologiques doivent être abordées avec l’idée de surmonter des obstacles à la reconnaissance de la scientificité des démarches, elles ne doivent pas faire perdre de vue le sens politique, au sens noble du terme, de la production de connaissances. En effet, un champ de recherche se constitue par sa visibilité : des revues scientifiques, des sociétés savantes, des groupes porteurs, ce que l’on appelle une « communauté », des corpus de textes de référence, des livres, voire des collections chez des éditeurs, des postes donnant aux professionnels un statut de chercheurs, des financements, soit par des aides publiques, soit par une conquête de marchés dans un paysage déjà très concurrentiel. Mais un champ de recherche se constitue surtout par la nouveauté de ses objets et par son impact.
Pour échanger sur ces différents points, nous proposons un Forum le 4 juillet 2013 matin, avec :
Jean-Claude Ruano-Borbalan, coordonnateur de la formation doctorale au Cnam, président de l’Institut européen d’éducation et de politiques sociales, membre du Comité de direction du Centre Michel Serres pour l'Innovation, PRES HESAM (Hautes Etudes Sorbonne Arts et Métiers)
Marcel Jaeger, titulaire de la Chaire de travail social et d’intervention sociale du Cnam
Isabelle Kittel, chargée de mission, Direction générale de la Cohésion sociale (sous réserve)
Joëlle Libois, directrice de la Haute école de Travail Social (HETS) de la HES-SO de Genève
Rima Mawad, enseignante de l’école libanaise de formation sociale, Université St Joseph

Résumé en Anglais


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