Fiche Documentaire n° 1886

Titre Les outils numériques transforment-ils les rapports aux savoirs?

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l'auteur principal

Auteur(s) THOMASSET Elisabeth
COLLOUD Céline
 
     
Thème Petite histoire sur les usages d’un espace numérique collaboratif  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

Les outils numériques transforment-ils les rapports aux savoirs?

Les systèmes d’informations numériques ont envahi le quotidien de tout un chacun. L’environnement personnel et professionnel dans lequel nous évoluons est désormais habité par des objets communicants. Dans ce contexte, les étudiants que nous formons dans nos centres de formation doivent développer des compétences et une familiarité avec ces appareils. Si sur le plan personnel, ils en ont bien un usage, la question se pose de l’usage professionnel de ces technologies de l’information et de la communication.

Ces appareils communicants transforment indéniablement les rapports formateurs/personnes à former. Nous souhaitons nous pencher sur la manière dont nous accompagnons les étudiants dans l’acquisition de compétences professionnelles dans ce domaine. L’IFTS d’Echirolles a mis en place à titre expérimental un espace collaboratif numérique auprès des étudiants en formation de cadre (CAFERUIS et CAFDES) avant d’étendre ce dispositif à l’ensemble des filières de l’institut. Ainsi chacune des filières dispose d’un espace numérique qui lui est propre, permettant de déposer des fichiers, d’échanger des idées dans un forum ou par chat, de faire des sélections de sites intéressants, bref de réunir une pluralité de moyens et accessible à distance via l’Internet. Une centaine de personnes sont ainsi en lien via ces salons numériques, étudiants et formateurs ont de nouvelles modalités de « rencontre » et d’échange.

A priori, nous serions en phase avec les nouvelles exigences contemporaines mais la création de ces nouvelles modalités de travail dans le cadre de la formation des professionnels de l’intervention sociale n’est pas sans poser de nombreuses questions. A l’aune d’un questionnaire sur les usages des étudiants de ces espaces, mais aussi sur les usages des formateurs permanents et occasionnels, nous souhaitons développer une réflexion sur les limites et les atouts de cette nouvelle modalité pédagogique. Quels sont les contenus et les sujets pertinents ? Qu’est-ce que cela transforme dans la construction de l’identité du professionnel en formation et dans les relations avec les formateurs ?

Dans un premier temps, nous développerons une réflexion sur la manière dont, centre de formation, notre façon de donner accès aux savoirs évolue, tant sur le plan matériel et physique que d’un point de vue numérique. En quoi la mise en place d’un espace numérique vient-il transformer les rapports entre les acteurs de la formation (équipe pédagogique, centre de ressources documentaires, étudiants) ?
Dans un second temps, en prenant appui sur les résultats de l’enquête menée auprès des utilisateurs de l’espace collaboratif de l’IFTS, nous tenterons de comprendre comment peuvent se construire des connaissances dans un environnement numérique ? En quoi une dimension collaborative peut émerger d’un tel espace ?

Bibliographie

CERTEAU Michel (de), « Lire : un braconnage », in L’invention du quotidien, I Arts de faire, Gallimard, Folio Essais, Paris, 1990, pp. 239-255
DEVAUCHELLE Bruno, Comment le numérique transforme les lieux de savoirs ? Le numérique au service du bien commun et de l’accès au savoir pour tous, FYP Éditions, Limoges, 2012
POTIN Yvan, « Travail coopératif : quand la distance permet le rapprochement », 2006-2007, [en ligne] consulté le 28 octobre 2012. http://www.creg.ac-versailles.fr/IMG/pdf/TCAO.pdf
SILBER Georges-André, dir., « Usages mobiles de l’information », in Documentaliste-Sciences de l’information, n°3, septembre 2012, pp. 22-61

Présentation des auteurs

Céline COLLOUD
Chargée de développement de l’environnement numérique et documentaliste à l’IFTS (38)

Elisabeth THOMASSET
Responsable des formations supérieures à l’IFTS (38), sociologue spécialisée en sociologie des usages

Communication complète

Les systèmes d’informations numériques ont envahi le quotidien de tout un chacun. L’environnement personnel et professionnel dans lequel nous évoluons est désormais habité par des objets communicants. Dans ce contexte, les étudiants que nous formons dans nos centres de formation doivent développer des compétences et une familiarité avec ces appareils. Si sur le plan personnel, ils en ont bien un usage, la question se pose de l’usage professionnel de ces technologies de l’information et de la communication.

Afin de traiter cette question, nous proposons à travers cette communication de croiser deux regards, celui d’une responsable de l’environnement numérique et d’une responsable de formations au sein d’un établissement de formation en travail social. Le rapport aux savoirs est nécessairement une question hybride, qui croise de multiples acteurs et de multiples dimensions.

Les appareils communicants transforment indéniablement les rapports formateurs/personnes à former. Nous souhaitons nous pencher sur la manière dont nous accompagnons les étudiants dans l’acquisition de compétences professionnelles dans ce domaine. L’Institut de Formation des Travailleurs Sociaux (IFTS) d’Echirolles a mis en place à titre expérimental un espace collaboratif numérique auprès des étudiants en formation de cadre (CAFERUIS et CAFDES) avant d’étendre ce dispositif à l’ensemble des filières de l’institut. Ainsi chacune des filières dispose d’un espace numérique qui lui est propre – appelé « salon » – permettant de déposer des fichiers, d’échanger des idées dans un forum ou par chat, de faire des sélections de sites intéressants, bref de réunir une pluralité de moyens et accessible à distance via l’Internet. Une centaine de personnes sont ainsi en lien via ces salons numériques, étudiants et formateurs ont de nouvelles modalités de « rencontre » et d’échange.

A priori, nous serions en phase avec les nouvelles exigences contemporaines mais la création de ces nouvelles modalités de travail dans le cadre de la formation des professionnels de l’intervention sociale n’est pas sans poser de nombreuses questions. A l’aune d’un questionnaire sur les usages des étudiants de ces espaces, mais aussi sur les usages des formateurs permanents et occasionnels, nous souhaitons développer une réflexion sur les limites et les atouts de cette nouvelle modalité pédagogique. Quels sont les contenus et les sujets pertinents ? Qu’est-ce que cela transforme dans la construction de l’identité du professionnel en formation et dans les relations avec les formateurs ?

Dans la première partie de notre communication, nous développerons une réflexion sur la manière dont notre façon de donner accès aux savoirs évolue, tant sur le plan matériel et physique que d’un point de vue numérique. En quoi la mise en place d’un espace numérique vient-il transformer les rapports entre les acteurs de la formation (équipe pédagogique, centre de ressources documentaires, étudiants) ?

Le développement du numérique dans la formation implique, pour l’équipe pédagogique, la prise en main d’outils informatiques avec lesquels les formateurs sont plus ou moins à l’aise (en fonction de leur parcours, de leur formation, de leur pratique personnelle, de la génération...)
Ce développement est perçu aussi bien comme une opportunité que comme une contrainte. Une enquête a été menée auprès des formateurs fin 2012 sur l’opportunité de développer un outil collaboratif à l’IFTS. Les résultats ne montrent ni un refus catégorique, ni un enthousiasme débordant, mais une curiosité (qu’est-ce que l’outil peut amener de plus ?), en même temps que la crainte de la mise en place d'une « usine à gaz » : autrement dit, l’équipe pédagogique est prête à s’engager à condition que l’outil soit un vrai « plus », que le temps passé à l'utiliser représente un gain réel, et d’être accompagnés dans l’utilisation.

Faute d’expérience et d’exemple concret, l’utilité pédagogique des outils numériques n’est pas clairement perçue. Dans un environnement numérique en évolution permanente, il y a la crainte du gadget : est-ce qu’on ne se laisse pas entraîner par un effet de mode ? A quoi bon utiliser cet outil aujourd'hui si on doit apprendre à en maîtriser un autre demain ? Sans compter que les outils numériques peuvent susciter un désagréable sentiment d’obsolescence, et l’impression d’être noyé par la technique. L’outil unique qui rassemble toutes les fonctions à portée d’un clic n’a pas encore été inventé : il faut donc maîtriser plusieurs logiciels, comprendre leur imbrication au sein de l’environnement numérique, à quel moment utiliser une fonction plutôt qu’une autre, etc. A cela s’ajoute aussi l’inquiétude quant à la sécurisation des informations : qui a accès à cette information que je partage dans l'environnement numérique ? Est-ce que je ne vais pas la retrouver en libre accès sur Internet ?
Les étudiants sont-ils vraiment plus à l’aise que l’équipe pédagogique ? Il y a indéniablement une question de génération. Mais des facteurs tels que la classe sociale ou encore le niveau de formation viennent pondérer ce propos. Une réunion menée avec les délégués des étudiants, sur le développement de l’espace collaboratif de l’IFTS, a ainsi fait émergé que certains se sentaient mal à l’aise avec « l’informatique », et qu’ils étaient également en demande d’accompagnement.

Dans un second temps, en prenant appui sur les résultats de l’enquête menée auprès des utilisateurs de l’espace collaboratif de l’IFTS, nous tenterons de comprendre comment peuvent se construire des connaissances dans un environnement numérique ? En quoi une dimension collaborative peut émerger d’un tel espace ?

L’expérimentation menée auprès des étudiants et des intervenants en formation CAFERUIS et CAFDES pointent à la fois des freins mais aussi des atouts. Si sur le papier, le projet paraissait séduisant et en cohérence avec les orientations fixées par le projet d’établissement (Fonder la pédagogie sur l’éc(h)o formation), l’enquête sur l’utilisation qui est faite des espaces collaboratifs montre qu’il n’est en rien simple et évident de partager des idées, de partager des informations entre pairs, plus difficile encore de le faire auprès de formateurs.

La quasi-totalité des utilisateurs, quel que soit leur statut, considèrent cet outil comme utile tant dans le processus de formation que sur le plan professionnel (accéder au contenu des cours, des plannings, des actualités pertinentes et nécessaire à la vie en formation). La familiarité à la technique des outils numériques peut être un frein (même si l’enquête montre que l’outil choisi est considéré comme simple d’accès et d’utilisation), c’est la dimension d’autorisation (auteurisation) qui est sans doute la clé…

Entre simple consommateur d’information dans un espace (virtuel) et acteur impliqué dans une expérience commune et réflexive, il y a une grande distance qui ne peut être franchie que si la confiance est construite et accompagnée dans un espace sécurisé. Cela ne diffère guère des enjeux qui existent dans un environnement pédagogique classique. Tout ne se dit pas et n’est pas bon à montrer à n’importe qui lorsque l’on est dans une situation fragilisante de formation.

En tant qu’acteur de la formation, reste donc à savoir si l’on veut ou pas faire émerger un futur professionnel acteur et auteur de sa pratique. Si telle est notre volonté, alors la dimension collaborative (avec un support numérique ou non) ne pourra se réaliser que si cette modalité de travail et de pensée est portée et travaillée par l’ensemble des acteurs de la formation.

Au terme de cette réflexion, nos deux approches montrent que la familiarisation avec les « machines à communiquer » est encore longue et pleine de péripéties à venir. Les rapports aux savoirs qui s’engagent à travers ces médias, s’ils sont déjà à l’œuvre, ne sont pas une évidence pour tous les acteurs. Les outils ne seront vraiment utiles que s’ils sont utilisés et mis en jeu par l’ensemble des personnes impliquées dans un parcours de formation.

Céline COLLOUD, responsable de l’environnement numérique, IFTS Echirolles, France
Elisabeth THOMASSET, responsable du pôle des métiers de l’encadrement, IFTS Echirolles, France

Résumé en Anglais


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