Fiche Documentaire n° 2141

Titre Donner sens à ses émotions dans une relation professionnelle :
Construction des savoirs et enjeux pour l’intervention sociale.

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Auteur(s) UDRESSY Olivier
GOLAY Dominique
 
     
Thème  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

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Résumé

Donner sens à ses émotions dans une relation professionnelle :
Construction des savoirs et enjeux pour l’intervention sociale.

Que ce soit dans le champ professionnel ou dans les écoles de formation en travail social, la professionnalité des travailleurs sociaux s’évalue, entre autres, par la capacité que ces derniers démontrent dans la gestion de leurs émotions. Ce travail émotionnel (Hochschild, 2002) n’est pas le résultat, en l’occurrence ce qui se laisse observer, mais la tentative d’exprimer l’émotion adéquate dans un contexte spécifique. Dans cette perspective, la gestion des émotions fait l’objet d’un apprentissage et peut être considéré comme une compétence professionnelle en situation. Ainsi, l’adoption d’un comportement et d’une attitude en concordance avec ce qui est ressenti (une bienveillance envers les usagers et usagères, un sourire d’accueil, etc.) ne relève pas d’une qualité individuelle mais d’une compétence à acquérir. Cet aspect est notamment manifeste à travers ce que les travailleurs sociaux expriment souvent, à leur manière, en craignant de se trouver en situation d’aide et de ne pas savoir, ni pouvoir « gérer » leurs émotions. Ils évoquent alors la crainte d’être submergés et de ne plus pouvoir jouer leur rôle. Cette peur montre que la gestion des émotions ne va pas de soi et fait l’objet d’un apprentissage, souvent apparenté à la recherche « de la bonne distance », parfois comprise comme une « mise à distance » des affects ou à leur « domestication » en situation.

Si l’apprentissage d’une maîtrise des émotions démontre de sa professionnalité en tant que travailleur social, être à l’écoute de ses émotions, en particulier dans la relation d’aide, est lui plutôt perçu comme périlleux car il soumet les individus à des risques potentiellement dommageables aux autres et à eux-mêmes (dévoilement de soi, manipulation, manque d’objectivité). Autrement dit, gérer ses émotions, pour un ou une professionnelle, revient souvent à les taire. Ce paradoxe lié à l’intervention sociale semble trouver son corollaire dans la rareté des recherches scientifiques traitant de la dimension émotionnelle dans la relation d’aide.

Pourtant, l’acquisition de ces qualifications sociales et émotionnelles passent par une intériorisation de savoirs, de normes et de valeurs reconnues à l’interne, c’est-à-dire par le corps des professionnel·le·s. Pour Boujut (2005), la part émotionnelle fait partie intégrante des pratiques professionnelles de la relation d’aide dans la mesure où elle constitue un indice de compétence. Dès lors, on ne peut laisser dans l’ombre ce qui paraît aussi central dans le positionnement professionnel ; ceci d’autant plus que les émotions peuvent être à l’origine d’un traitement différencié des usagers et usagères susceptible de produire des inégalités (Herz, Martin et Valli, 2004).

A partir d’une recherche-action menée en collaboration avec une équipe de professionnel-le-s travaillant dans le secteur de la transition école-métier (Udressy, 2012), nous voulons souligner, dans cette communication, l’intérêt que la prise en compte des émotions et du ressenti des travailleurs sociaux peut apporter dans la compréhension des situations sociales, ainsi que dans le choix des objectifs et des mesures prises pour accompagner les jeunes inscrits dans un programme d’insertion professionnelle. Plus particulièrement, nous documenterons, à travers la mobilisation du concept de résonance développé par Elkaïm (1989), comment un outil issu de l’approche systémique permet d’articuler des apports et des savoirs relevant tout à la fois de la recherche, de l’expertise professionnelle et des expériences de vie des acteurs impliqués.

Bibliographie

Bibliographie :

Boujut, S. (2005). Le travail social comme relation de service ou la gestion des émotions comme compétence professionnelle. Déviance et Société, 29(2), 141-153.

Elkaïm, M. (1989). Si tu m’aimes ne m’aimes : pourquoi ne m’aimes-tu pas, toi qui prétends m’aimer ? Approche systémique et psychothérapie. Paris : Seuil.

Hertz, E., Martin H. & Valli, M. (2004). "Le "feeling" : une logique sous- jacente au fonctionnement de l'Etat providence. Aspects de la sécurité sociale, 1, 12-21.

Hochschild, A.R. (2002). Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale. Travailler, 9, 19-49.

Udressy, O. (2012). Le concept de résonance en travail social : comment donner sens à ses émotions dans la relation d’aide ? Strasbourg : Université de Strasbourg, Faculté des sciences de l’éducation (DHEPS).




Présentation des auteurs :

Olivier Udressy, professeur à la Haute école de travail social et de la santé à Lausanne, est psychothérapeute et éducateur. Il s’intéresse à la relation d’aide en travail social. Dominique Golay, professeure à la Haute école de travail social et de la santé à Lausanne, est sociologue et éducatrice.

Présentation des auteurs

Olivier Udressy, professeur à la Haute école de travail social et de la santé à Lausanne, est psychothérapeute, superviseur, formateur d'adultes et éducateur. Il s’intéresse à la relation d’aide en travail social et aux méthodologies d'intervention. Ses domaines d'enseignements portent sur l'approche systémque et les méthodologie d'intervention, la gestion d'équipe et la conduite de projet. Il a mené une recherche-action sur la mise en œuvre d'un outil méthodologique (résonance) en collaboration avec une équipe de professionnels travaillant à l'insertion professionnelle de jeunes.
Dominique Golay, professeure à la Haute école de travail social et de la santé à Lausanne, est sociologue et éducatrice. Ses enseignements portent sur les concepts de base en sociologie, la socialisation juvénile, la méthodologie et la déviance. Les dernières recherches auxquelles elle a participé traitent de la participation des enfants à la vie de la Cité, les amitiés entre filles et la socialisation sportive des filles.

Communication complète

La professionnalité des travailleurs sociaux s’évalue, entre autres, par la capacité qu’ils démontrent dans la gestion de leurs émotions. Ce travail émotionnel (Hochschild, 2002) réside dans l’art d’exprimer l’émotion adéquate en situation d’interaction. Dans ce sens, la gestion des émotions peut être considérée comme une compétence professionnelle. Toutefois, elle ne va pas de soi et elle est souvent apparentée à la recherche « de la bonne distance », voire à une « mise à distance » des affects ou à leur « domestication » en situation. Dès lors, la prise en compte des émotions vécues, en particulier dans la relation d’aide, est perçue comme périlleuse dans la mesure où elle comprend des risques potentiellement dommageables aux autres et à soi-même (envahissement, dévoilement de soi, manipulation, manque d’objectivité). De ce fait, gérer ses émotions dans le cadre de l’intervention professionnelle revient souvent à les taire. Or, différentes recherches le montrent (Velkovska, Zouinar, 2012; Boujut, 2005; Fernandez, Lézé, Marche, 2006), les émotions ne peuvent être évacuées de la pratique professionnelle. En effet, elles influencent, souvent à l’insu des travailleurs sociaux, la définition des problèmes, l’élaboration d’hypothèses de compréhension ainsi que la mise en œuvre des interventions. Sous cet aspect, les émotions font partie intégrante des pratiques, elles ne peuvent donc être laissées dans l’ombre; ceci d’autant plus qu’elles sont parfois à l’origine d’un traitement différencié des usagers susceptible de produire des inégalités (Herz, Martin et Valli, 2004).
Ce paradoxe est à l’origine d’une recherche-action (Udressy, 2012) mise en œuvre en collaboration avec une équipe de cinq professionnels du champ de l’insertion. Cette recherche a permis d’expérimenter collectivement un outil d’intervention engageant les subjectivités des participants de façon à interroger et mobiliser leur vécu de manière consciente et réfléchie. Deux axes d’analyse et de réflexion, seront retenus ici, d’une part l’identification des émotions dans le suivi des situations ; d’autre part l’appropriation de l’outil - le concept de résonance (Elkaïm,1989) - au sein d’une équipe de travailleurs sociaux. Comment cet outil issu des thérapies systémiques a-t-il permis, in fine, d’articuler des savoirs relevant tout à la fois de la recherche, de l’expertise professionnelle et des expériences de vie des acteurs impliqués dans la recherche?

Le collectif comme source d’informations et d’élaboration de connaissances

Le choix méthodologique, soit l’inscription de la démarche dans une recherche-action, s’est imposé en regard du sujet pour le moins sensible de l’investigation. Traiter des émotions dans un collectif professionnel peut s’avérer délicat dans la mesure où il implique un dévoilement de soi, notamment par rapport à la manière dont les individus appréhendent, jugent et évaluent les situations.
La complexité du concept de résonance a impliqué au départ un ajustement des connaissances théoriques. Cette mise en commun a créé un « collectif de recherche » ainsi qu’une dynamique propice à l’échange de savoirs. En ce sens, la démarche relève bien d’une méthodologie de recherche-action supposant une « vision et un rapport au savoir qui doit se confronter dans un espace collectif et qui naît des pratiques. » (Desroche, 1971). Il faut préciser que dans ce type d’investigation, les participants ne sont pas de simples informateurs, mais contribuent activement à la réalisation de la recherche en tant que co-chercheurs. Ainsi les ateliers coopératifs (10 séances) et la tenue d’un journal d’itinérance ont été au cœur de la récolte de données. Chaque professionnel a choisi des situations d’accompagnement individuel qu’il a suivies pendant les quatre mois durant lesquels la recherche s’est déroulée. Les données issues des ateliers coopératifs ont été complétées en fin de parcours par des entretiens individuels et un focus group permettant d’évaluer le processus d’appropriation du concept de résonance.
Cette appropriation s’apparente pour les professionnels à un processus de traduction, soit à la manière dont les acteurs ont fait tenir ensemble des savoirs et des intérêts (Rayou, 2002). Autrement dit, l’intégration des savoirs par l’équipe est tributaire du sens que ces apports théoriques prennent en regard de l’intervention professionnelle et des missions institutionnelles.

S’engager et être engagé dans le travail émotionnel

L’analyse du travail émotionnel révèle empiriquement le double niveau que la notion d’engagement sous-tend (Becker, 2006). En effet, l’engagement est à rapporter ici à la participation à une démarche de formation en équipe (être engagé) et à une forte implication professionnelle et personnelle (s’engager). De fait, la mise à jour des émotions et d’une résonance à l’intérieur du système formé par l’institution, les professionnels et les usagers soulève d’emblée la question de l’implication individuelle dans la mesure où l’identification d’une résonance peut être vécue comme un risque pour soi…
« (...) la difficulté que je peux avoir d’entrer, d’avancer dans une situation où il y a résonance est liée au fait que je n’ai pas envie de mettre à jour cette résonance en moi et dans mon histoire, et que je n’ai pas envie d’y travailler maintenant, donc je ne veux pas y entrer (...) »
Ou pour les autres…
« (...) je pense que je me sens tellement impliquée dans cette situation, que ce serait dangereux que je suive ce jeune, j’aurais peur d’être influencée (...) et d’avoir trop d’attentes... »
La prise de conscience de l’impact des émotions sur la définition et le jugement porté sur les cas suivis génère des craintes, notamment parce qu’elle met en exergue le rôle et la responsabilité professionnelle. Cette appréhension est renforcée par le fait que l’identification des émotions vécues n’est pas automatiquement mise au service de la relation d’aide. Si les professionnels sont sensibles au risque de « projection », ils ne savent pas d’emblée comment « opérationnaliser » leur ressenti au bénéfice de la relation. Autrement dit, le changement de regard sur la pratique reste limité dans un premier temps au discours, limitation engendrant parfois un sentiment d’impuissance.
En effet, la mise en œuvre du concept de résonance en tant qu’outil méthodologique dans l’intervention suppose et impose une «déconstruction» des routines professionnelles, amenant les travailleurs sociaux à revisiter leur manière d’appréhender et d’analyser leur propre pratique.
« (...) j’y ai repensé, je m’aperçois qu’il y a quelque chose au niveau personnel dont je tiens compte, il y a des choses de mon histoire personnelle dans l’interprétation (...). »
On le voit, la mobilisation de cet outil met à jour l’imbrication du personnel et du professionnel, ce qui peut être vécu comme fragilisant.

L’appropriation du concept de résonance : échanger pour agir

Cependant, les échanges nourris autour des émotions suscitées par les situations suivies, dans les ateliers coopératifs, ont permis à l’équipe de se renforcer autour de connaissances et de valeurs communes et d’élaborer une « culture professionnelle » locale. Le contexte d’appropriation revêt, en effet, une importance particulière, dans la mesure où il donne du sens à la démarche en l’inscrivant dans une institution et dans un collectif de professionnels. Ce dernier est particulièrement propice à la circulation des savoirs, selon l’adage, ensemble, nous sommes meilleurs.
« L’importance du collectif, bien sûr, car chacun a son bagage, ses expériences, chacun notre niveau de compréhension, nos connaissances, nos âges respectifs, tout ça mis ensemble, c’est beaucoup plus intéressant, on peut vérifier sa pensée par rapport aux autres, ça va plus vite en groupe sur le principe de un plus un égal trois. »
La dimension collective semble bien être un critère central dans le processus d’appropriation de savoirs nouveaux et de leur articulation avec les compétences acquises par l’expérience.
« (...) ça a renforcé l’équipe, et ça me permet de me rendre compte du vécu de mes collègues dans leurs entretiens (…). Ça fait découvrir ses collègues dans leur manière de travailler, c’est bien, car on est très différent, on a des pattes différentes, ça rassure de voir que mes collègues qui ont des années d’expériences ont aussi leurs doutes et fragilités, ça m’a autorisée à avoir les miennes, ça rend l’équipe encore plus authentique. C’est un plus pour l’échange d’expériences. »
Ainsi les professionnels ont acquis, à travers le « processus de traduction », des savoirs et une technique qui leur permet d’expliciter ce qu’ils font, de relier les moyens et les fins. Dans ce sens, cette recherche a permis de « lutter » contre la rationalisation du travail à l’œuvre dans les institutions sociales. En effet, la démarche, parce qu’elle vise à expérimenter un outil d’intervention, offre la possibilité de justifier et de donner du sens à l’action, ce qui semble être un bon moyen de s’opposer à une uniformisation de l’intervention professionnelle selon des standards imposés par l’administration publique.
« (...) Ça nous a renforcé par rapport à l’extérieur car on peut plus justifier notre travail et la rigueur de nos outils d’interventions. »
Dans ce sens, l’utilisation du concept de résonance permet de donner du sens à la manière dont les professionnels interviennent auprès des usagers, mais aussi d’asseoir leur positionnement professionnel vis-à-vis de l’extérieur en justifiant leurs choix pédagogiques.

La circulation des savoirs : une condition nécessaire à l’intégration des connaissances au service de l’intervention

La culture commune émergeant du travail collectif initié dans le cadre de cette recherche-action renvoie au partage d’un ensemble de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être d’une part, et à l’adossement de l’intervention à des valeurs et à des normes professionnelles auxquelles chacun peut se référer et adhérer, d’autre part. De fait, l’acquisition de nouvelles connaissances semble favorisée par la dimension collective, le fait de se questionner en équipe et de participer à une démarche de recherche. Cet ancrage dans le collectif comporte l’avantage non seulement de bénéficier des mêmes informations, mais également d’élaborer un cadre co-construit pour l’intervention.
Plus encore, l’utilisation du concept de résonance modifie considérablement le regard porté sur les situations suivies. En effet, les professionnels perçoivent davantage leur responsabilité quant au « fonctionnement » de la relation. Le fait de pouvoir tenir compte de ses émotions en se référant à un cadre théorique et à une méthodologie d’intervention permet, et c’est ce que montre l’analyse, d’introduire un tiers dans la relation. Les professionnels parviennent alors à rester congruents avec ce qu’ils ressentent tout en conservant une distance propre au rôle professionnel.
Pour terminer, si le concept de résonance constitue une ressource intéressante pour les travailleurs sociaux, son utilisation reste tributaire du contexte d’appropriation (objectifs institutionnels, climat de travail, etc.) et plus particulièrement du respect des conditions permettant d’éviter les risques associés au dévoilement du travail émotionnel c’est-à-dire une obligation de se dire dans un contexte non dépourvu de rapports de pouvoir.

Références bibliographiques

Amiguet, O., Julier, C. (1998). L’intervention systémique dans le travail social. Genève : Les Editions I.E.S., Lausanne : Editions EESP.
Barbier, R. (2010). Qu’est-ce que la recherche-action existentielle ? Le Journal des Chercheurs. Récupéré de http://www.barbier-rd.nom.fr/journal/article.php3?id_article=343
Becker, H.S. (2006). Notes sur le concept d’engagement. Tracés. Revue de Sciences humaines ,11. Récupéré de http://traces.revues.org/257
Boujut, S. (2005). Le travail social comme relation de service ou la gestion des émotions comme compétence professionnelle. Déviance et Société, 29(2), 141-153.
Desroche, H. (1971). Apprentissage en sciences sociales et éducation permanente. Paris : Ed. ouvrières.
Elkaïm, M. (1989). Si tu m’aimes ne m’aimes : pourquoi ne m’aimes-tu pas, toi qui prétends m’aimer ? Approche systémique et psychothérapie. Paris : Seuil.
Elkaïm, M. (Ed.). (1995). Panorama des thérapies familiales. Paris : Seuil.
Hertz, E., Martin H. & Valli, M. (2004). "Le "feeling" : une logique sous-jacente au fonctionnement de l'Etat providence. Aspects de la sécurité sociale, 1, 12-21.
Hochschild, A.R. (2002). Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale. Travailler, 9, 19-49.
Udressy, O. (2012). Le concept de résonance en travail social : comment donner sens à ses émotions dans la relation d’aide ? Strasbourg : Université de Strasbourg, Faculté des sciences de l’éducation (DHEPS).
Fernandez, F., Lézé, S. & Marche, H. (2006). Voilement et dévoilement des émotions sur les terrains de la santé : du rapport de sens au rapport de force. Face à face, 9. Récupéré de http://faceaface.revues.org/
Rayou, P. (2002). La circulation des savoirs entre sociologie de l'éducation et société, Education et sociétés, 1(9), 5-11.
Velkovska, J., Zouinar, M. (2012). Jugements et émotions dans les interactions institutionnelles. ethnographiques.org, 25. http://ethnographiques.org/

Résumé en Anglais


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