DE LA RECHERCHE AU TRANSFERT DE SES RESULTATS
DANS LES PRATIQUES PROFESSIONNELLES

Une première recherche, financée par la Commission européenne, avait réuni cinq équipes de différents pays (Allemagne, France, Pologne, Suède, Suisse), dans le cadre du programme Daphné sur la réduction des violences. Elle portait sur une comparaison des différents systèmes de protection de l’enfance et, notamment, sur leurs coopérations dans l’accompagnement de jeunes désignés violents. Un travail qualitatif a été réalisé auprès de jeunes de 16 à 20 ans pour comprendre leur trajectoire de vie : entretien avec le jeune, sa famille, les professionnels qui l’ont accompagné ; étude des dossiers provenant des services sociaux, des services judiciaires, des établissements scolaires. Sur une cinquantaine de situations analysées en Europe, il est possible de dégager quelques constantes : une expérience de la violence s’inscrivant souvent dans des difficultés identitaires, la construction d’un « faux soi » pour « sauver la face », l’expérience de l’exclusion dans nombre de situations, la quête affective, la prise de conscience et tout un cheminement possible pour sortir de la violence. Les résultats de cette recherche ont ainsi permis, à la faveur d’un travail spécifique de transposition, d’établir des critères de qualité communs aux cinq pays participants. Ces critères visent plus particulièrement l’amélioration de l’accompagnement éducatif, et des partenariats, auprès de ces jeunes désignés violents par la construction d’un langage commun entre les professionnels du social, de la santé, de la justice et de l’Éducation nationale.

Une seconde recherche, portée par les mêmes équipes européennes, visait à perfectionner les critères de qualité, à en évaluer la faisabilité et à en expérimenter la mise en œuvre. Pour atteindre ces objectifs, deux méthodes différentes étaient initialement prévues. En France, six groupes de travail étaient organisés en Ille et Vilaine et dans le Finistère ; les autres équipes européennes travaillant de manière identique. Ces deux méthodes de recherche & développement s'adressaient à des professionnels de différents services et établissements du champ de la protection de l’enfance : les services de placement, les foyers éducatifs, la protection judiciaire de la jeunesse, mais aussi les services sociaux des écoles, la prévention spécialisée, l'animation socioculturelle, la mission locale. Les groupes étaient constitués de représentants des différentes professions et institutions concernées. Ces deux types de méthodes reposaient donc sur un travail de groupe poursuivant des objectifs différents mais complémentaires. D’une part, les groupes de recherche/formation s’attachaient plus particulièrement à la transmission et la reformulation des critères de qualité dans une logique déductive. D’autre part, les groupes de recherche/action visaient plus particulièrement, dans une logique inductive, l’expérimentation des critères de qualité à partir de situations professionnelles concrètes. Mais dans les deux cas, ces groupes de travail s'adressaient à des professionnels intéressés par les recommandations européennes et souhaitant contribuer à leur formulation opérationnelle. Ces groupes de travail avaient deux objectifs principaux : réfléchir à la faisabilité des recommandations dans pratiques professionnelles et préciser les critères de qualité.

Ces deux approches portaient principalement sur les attitudes professionnelles, la connaissance des jeunes et des parents, la coopération entre les différents systèmes d’intervention et la coopération entre la recherche et la protection de l’enfance. Ce processus de recherche & développement a été évalué de façon systématique dans chacun des cinq pays. Cette évaluation permet ainsi une étude comparée des résultats obtenus nationalement et l’élaboration de préconisations communes concernant la mise en œuvre d’un dispositif basé sur le transfert des critères de qualité dans les pratiques professionnelles.

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 Camilleri C. et al, Stratégies identitaires, Paris, P.U.F, 1999, 232 p.
 Dubar C., La socialisation, construction des identités sociales et professionnelles, Paris, Armand Colin, Paris, 1992, 276 p.
 Dubar (Claude), La crise des identités, l’interprétation d’une mutation, Paris, P.U.F, 2001,239 p.
 Dubet F., Le déclin de l’institution, Paris, Seuil, 2002, 421 p.
 Goffmann E., Stigmate, les usages sociaux des handicaps, Paris, Les éditions de minuit, 1989,175 p.
 Kaufmann J.C, L’invention de soi, une théorie de l’identité, Paris, Hachette, 2004, 351 p.
 Fröhlich-Gildhoff K., Lecaplain P. et al., Professional support for violent young people, results of a comparative European study, Freiburg, FEL, 2008, 374 p.
 Fröhlich-Gildhoff K., Lecaplain P. et al., Developing quality-based support for young people with violent behavior, Freiburg, FEL, 2011, 365 p.
 Lecaplain P., Jeunesse à risques et dysfonctionnements des services de la protection de l’enfance : Comment penser les pratiques d’accompagnement de jeunes désignés comme violents ? Enquête qualitative française autour d’une douzaine de situations sociales dans le cadre du programme européen Daphné II, revue pluridisciplinaire de recherche sociétés et jeunesses en difficultés, 2009, n° 7, 33 p.
 Lewin K., frontiers in group dynamics, 1946
 Moreau C., Sauvage A., La fête et les jeunes : espaces publics incertains, Rennes, Apogée, 2007, 220 p.
 Schön D., Le praticien réflexif, à la recherche du savoir caché dans l’agir professionnel, Montréal, Editions logiques, 1994.
 Strauss A., La trame de la négociation, sociologie qualitative et interactionnisme, Paris, L’harmattan, 2008, 319 p.

LECAPLAIN P., sociologue, Formateur-chercheur au sein du GIRFAS/IRTS de Bretagne. Responsable du projet de recherche européen S.T.RON.G de prévention de la violence en milieu scolaire.
En collaboration avec MOREAU C., sociologue, Gérant de la société JEUDEVI ; chercheur à l’université Rennes II.

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