Vulnérabilité, pauvreté et masculinités : état des lieux

La pauvreté est reconnue depuis de nombreuses années comme un puissant déterminant des conditions vulnérables de santé (Marmot & Wilkinson, 1999; Raphael, 2004, 2006; Reid & Tom, 2006). Elle crée une fragilité et une vulnérabilité à l’exclusion sociale ayant des répercussions sur les capacités de l’individu et son fonctionnement social (Marmot & Wilkinson, 1999). Relativement peu de recherches ont été faites auprès des hommes en situation de pauvreté (Dupéré & Disant, 2005). Cependant, les hommes vivant en contexte de pauvreté vivent en moyenne huit années de moins que les hommes mieux nantis, tandis que cet écart n‘est que de 2,5 ans chez les femmes (Roy, DeKoninck, Clément & Couto, 2012). La pauvreté prendrait une forme particulière pour les hommes puisqu’elle les empêcherait d’atteindre les standards traditionnellement liés à la masculinité, tel que l’indépendance, l’autonomie, l’autosuffisance (Dupéré, 2011). Leurs représentations de la masculinité joueraient un rôle déterminant sur la situation de défavorisation, les problèmes de santé éprouvés et leurs relations amoureuses (Marmot & Wilkinson, 1999). Aussi, à l’issue d’un vaste projet de recherche sur les perceptions des hommes québécois de leurs besoins psychosociaux et de santé, les hommes en contexte de pauvreté émergent comme l’une des principales cibles d’intervention et de politiques sociales à développer au cours des prochaines années. Cette recherche comporte quatre étapes : une méta-synthèse de 65 études empiriques sur les hommes québécois (Roy, Tremblay, Guilmette, Bizot, Dupéré & Houle, 2014), une mise à jour des données publiques sur la santé et le bien-être des hommes (Roy, Cazale, Tremblay, Cloutier, Lebeau, Paré, Sirois-Marcil, 2014), un sondage auprès de 2 000 hommes québécois et des groupes (Roy, Tremblay, Beaudet, Chamberland, LeGall & Roy, en préparation) de discussions focalisée auprès de groupes plus vulnérables. À chacune des étapes, les hommes en contexte de pauvreté, les jeunes en particulier, ont émergé comme l’un des groupes le plus en besoins. La présentation permettra de situer les objectifs de la recherche, la méthodologie utilisée à chacune des étapes et les principaux résultats en lien avec le groupe dont il est ici question.

Dupéré, S. (2011). Rouge, jaune, vert--et noir : expériences de pauvreté et rôle des ressources sociosanitaires selon des hommes en situation de pauvreté à Montréal. Thèse de doctorat. Québec : Université Laval.
Dupéré, S. & Disant, M-J. (2005). Réflexion sur les ancrages théoriques du concept de pauvreté. Québec : Département de médecine sociale et préventive, Université Laval.
Marmot, M. & Wilkinson, R. G. (Eds.). (1999). Social Determinants of Health. New-York: Oxford University Press.
Raphael, D. (2004). Introduction to the Social Determinants of Health. In D. Raphael (Ed.). Social Determinants of Health: Canadian Perspectives (1-18). Toronto: Canadian Scholars' Press.
Raphael, D. (2006). Les inégalités de santé au Canada : faible préoccupation, actions insatisfaisantes, succès limités. In M. O'Neill, S. Dupéré, A. Pederson & I. Rootman (Éd..). Promotion de la santé au Canada et au Québec : perspectives critiques (138-159). Québec : Presses de l'Université Laval.
Reid, C. & Tom, A. (2006). Poor women’s discourses of legitimacy, poverty, and health. Gender & Society, 20 (3) 402-421.
Roy, B., De Koninck, M., Clément, M. & Couto, É. (2012). Inégalités de santé et parcours de vie : réflexion sur quelques déterminants sociaux de l’expérience d’hommes considérés comme vulnérables. Service social, 58 (1) 32-54.

Gilles Tremblay travailleur social, est professeur titulaire à l’École de service social de l’Université Laval après avoir travaillé en CLSC plus de vingt ans Il détient un doctorat en sciences biomédicales de l’Université de Montréal dont la thèse portant sur l'agressivité, l'identité et la relation au père a été réalisée dans le cadre du Groupe de Recherche dur l'Inadaptation Psychosociale chez l'enfant. Le modèle d’intervention auprès des hommes plus traditionnels qu’il a développé avec son collègue Pierre L’Heureux est devenu un incontournable. Reconnue comme pratique de pointe, plus de 4 000 intervenants ont été formés à ce modèle d’intervention. Ses travaux de recherche portent notamment sur la santé des hommes, la dépression au masculin, la réussite des garçons, l’engagement paternel, la violence masculine, etc. Il a fait partie du Comité de travail en matière de prévention et d’aide aux hommes (2002-2004) et a présidé le Comité d’experts sur les homicides intrafamiliaux (2011-2012) pour le compte du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Il a eu l’opportunité de visiter une vingtaine de pays différents pour y prononcer des conférences, rencontrer des chercheurs sur les réalités masculines, des groupes travaillant auprès des hommes ou simplement réaliser des entrevues avec des hommes. Avec le soutien d’un groupe de 14 chercheurs internationaux, il travaille à mettre en place un réseau international de recherche sur les hommes et les masculinités. Il est responsable de l’équipe de recherche Masculinités et société composée de 34 chercheurs de 12 universités et 20 partenaires. Conférencier reconnu, il est aussi membre des comités des revues Service social, Psychology of Men and Masculinity et International Journal of Men’s Health.

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