Fiche Documentaire n° 3822

Titre La professionnalisation des auxiliaires de vie sociale au service de la coordination du secteur de l’aide à domicile

Contacter
l'auteur principal

Auteur(s) NARANIN Georges
DRONEAU Bruno
DOUMBIA Binta
 
     
Thème Éléments d'expérimentation du travail en réseau à L'île de La Réunion  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

Résumé | Bibliographie | Les auteurs... | Article complet | PDF (.fr) | Résumé en anglais | PDF .Autre langue | Tout afficher

Résumé

La professionnalisation des auxiliaires de vie sociale au service de la coordination du secteur de l’aide à domicile

Les enjeux européens et nationaux concernant les services d’aide à domicile sont multiples. La population est vieillissante et la professionnalisation des acteurs reste un axe de développement principal.
Nous nous situons à l’île de La Réunion, baignant dans un cadre contextuel spécifique qui en fait son originalité et permet l’émergence d’apports créatifs dans l’accompagnement face à la précarité dans le secteur de l’aide à domicile. Notre proposition de communication s’inscrit donc dans l’axe 2 de ce congrès.
Le contexte socio-économique sur lequel repose l’intervention sociale dans ce contexte insulaire, est fait à la fois d’un taux de chômage les plus importants de France (autour de 29% en 2013) et d’une solidarité intra-familiale constituant un élément culturel non négligeable.
En préambule il faut savoir que les personnes âgées dépendantes vivent très fréquemment à domicile (92 %), même en cas de dépendance lourde, 83 % des Réunionnais restent à domicile (contre 49 % en France métropolitaine). Les services d’aide à domicile pour les personnes âgées dépendantes se développent, 29 % des personnes âgées dépendantes à domicile y ont recours en 2012 soit deux fois plus qu’en 2009. Les dernières projections de population réalisées par l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) annoncent pour La Réunion un vieillissement certain de sa population, ainsi le nombre de personnes âgées dépendantes doublerait en 2030.
Localement, la politique volontariste du Département de La Réunion s’appuie justement sur ce contexte pour favoriser à la fois la création d’emplois, et le maintien à domicile des personnes âgées. La famille devient alors pivot de l’accompagnement à domicile, nous en verrons les enjeux.
C’est dans ce contexte que l’Institut Régional du Travail Social de La Réunion forme les auxiliaires de Vie Sociale, sachant que la qualité de l’accompagnement des personnes âgées à domicile repose essentiellement sur l’engagement des professionnels du secteur médico-social, social et sanitaire. Ces derniers exercent un métier difficile et exigeant, fondé le plus souvent sur une vocation.
Dès lors, nous nous sommes posé plusieurs questions :
- Comment dynamiser la démarche de projet personnalisé à domicile dans un contexte local en pleine mutation ?
- Quelle coordination des acteurs est-ce que cela suppose?
- Quelle professionnalisation des futurs professionnels cela induit-il ?
C’est ainsi que notre proposition de communication invite à considérer l’action menée par l’Institut Régional du Travail Social de La Réunion, à la fois pour répondre au besoin de professionnalisation des futurs Auxiliaire de Vie Sociale et à la nécessité de structuration de l’intervention à domicile.
Nous expérimentons un programme de renforcement du lien entre les différents acteurs de l’aide à domicile participant ainsi à la coordination du secteur médico-social.
L’objectif de ce travail avec les structures d’aide à domicile a été de co- construire une démarche pédagogique, de réfléchir à une méthode d’intervention pour la mise en place du projet personnalisé avec les personnes accompagnées à domicile en situation précaire. L’action menée visait à :
- Ouvrir l’intervention à domicile à un véritable acte d’accompagnement au projet individualisé et de faciliter le travail en réseau.
- Permettre l’élaboration d’une démarche d’équipe contribuant à rompre l’isolement
- Donner à la personne âgée des perspectives de maintien ou de recouvrer une d’autonomie dans la gestion de son quotidien
Les résultats de notre démarche tendent à montrer que pour chaque acteur, l’impact est considérable. Notre communication a pour objectif de présenter cette expérience et de rendre compte des premiers résultats d’un travail qui donne déjà à voir des effets positifs sur le développement de l’autonomie de la personne accompagnée, et sur un véritable changement de paradigme s’agissant de la posture professionnelle de l’Auxiliaire de Vie Sociale.

Bibliographie

- GARBARINI J. (2002) : Former la relation d’aide en travail social, Paris, Ermanno Genre.
- GASSIER J., CORDON C. (2011) : Diplôme d’Etat Auxiliaire de Vie Sociale, Elsevier Masson.
- SANDRON F. (2006) : Implications du vieillissement de la population réunionnais sur le marché du travail, Actes du colloque international AIDELF (18-23 septembre 2006)
- SANDRON F. (2013) : Vieillir chez soi à La Réunion. Dynamiques sociales et logiques institutionnelles en matière d’habitat des personnes âgées. Actes du colloque Vieillir chez soi - vivre entre soi ? Les habitats intermédiaires en question (22-24 mai 2013).
- SOULERIN BOUVIER A. (2007) : D'un univers professionnel à un autre... : études sur l'identité professionnelle « auxiliaire de vie sociale » développée par des aides à domicile auvergnates participant à une session d'accompagnement à la VAE en octobre 2006, Mémoire de DSTS.

Présentation des auteurs

Georges NARANIN, titulaire d’un DEA en Sciences de l’Education. Cadre de formation au sein de l’Institut Régional du Travail Social de La Réunion depuis 2004 auprès entre autres des Auxiliaires de Vie Sociale.
Bruno DRONEAU, Titulaire d’un MASTER en Education Familiale et en Intervention Sociale. Cadre de formation au sein de l’Institut Régional du Travail Social de La Réunion depuis 2006.
Binta DOUMBIA, Titulaire d’un MASTER en Sciences de l’Education. Cadre de formation au sein de l’Institut Régional du Travail Social de La Réunion depuis 2013.

Communication complète

La population de l’île de la Réunion est vieillissante et la professionnalisation des acteurs qui accompagnent cette population est un axe de développement nécessaire. Cette dynamique rejoint celles nationales et européennes concernant ce public. Ces enjeux trouvent des réponses au travers des services d’aide à domicile qui sont multiples.
Nous nous situons à l’île de La Réunion, dans l’océan Indien, cette situation engendre un cadre contextuel spécifique qui nécessite l’émergence d’apports créatifs dans l’accompagnement des personnes dépendantes et de leur précarité dans le secteur de l’aide à domicile. Notre communication s’inscrit en conséquence dans l’axe 2 de ce congrès.
L’intervention sociale prend en compte le contexte socio-économique lié pour partie au contexte insulaire., un taux de chômage les plus importants de France (autour de 29% en 2013), une solidarité intra-familiale fragilisée mais qui constitue un élément culturel non négligeable. D’autre part, notre propos concerne l’accompagnement des personnes âgées à domicile, en situation précaire, par les Auxiliaires de Vie Sociale.
A La Réunion, les personnes âgées dépendantes vivent majoritairement à domicile (92 %), même en cas de grande dépendance, 83 % des Réunionnais restent à domicile (contre 49 % en métropole). Cette situation entraîne le développement des services agréés d’aide à domicile. C’est ainsi qu’en 2012, 29 % des personnes âgées dépendantes ont eu recours à ses services soit deux fois plus qu’en 2009. Ces personnes sont plus dépendantes que sur le plan national ; en effet, dés 59 ans les taux de prévalence des incapacités sur l’Ile sont comparables à ceux des 69-70 ans en métropole. 51 % des plus de 64 ans sont considérés comme pauvres. Ce niveau est proche de la moyenne de l’Ile car 49% des réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les dernières projections de population réalisées par l’ INSEE annoncent pour La Réunion un vieillissement accéléré ainsi le nombre de personnes âgées dépendantes doublerait en 2030. Localement, la politique volontariste du Conseil Départemental s’appuie sur ce contexte pour favoriser à la fois la création d’emplois tels que les AVS et le maintien à domicile des personnes âgées.
Du côté de la profession, l’intervention à domicile du professionnel AVS nécessite un respect de la sphère de l’intime tout en inscrivant son action dans une dynamique professionnelle voire spécialisée du fait de certaines dépendances. Le risque étant que le domicile devienne un espace professionnel, s’institutionnalise, ce qui ne permettrait plus à la personne de « se sentir chez elle » voire de décider pour elle. Mais cette intervention dans l’espace intime se révèle le plus souvent complexe et difficile tant il est difficile d’accepter de bénéficier d’un accompagnement social plutôt que d’une aide-ménagère. La présence du travailleur social renvoie à un statut plus ou moins difficile à accepter car fait état d’une situation de dépendance.
Par ailleurs selon Perla SERFATY GAZON « L’habitat fait aussi référence à la conscience de l’habitant de sa propre intériorité, à ses secrets, à sa vie familiale et domestique, à ses arrangements privés ; en somme à son intimité », aussi quand elle précise « dans son domicile, l’habitant a le sentiment d’être souverain, d’exercer un droit d’usage sur un territoire qui lui est propre.». Toutefois cette personne en situation de dépendance ne peut rester à son domicile sans soutien d’un tiers extérieur vécu parfois comme une intrusion. Il est alors nécessaire que le professionnel AVS s’inscrive dans du sur-mesure afin de respecter l’organisation du lieu de vie où il intervient. Comme le souligne Bernard ENNUYER c’est « la culture de l’accompagnement au quotidien et au quotidien ». Cela nécessite que se construise un tissage entre le professionnel et la personne aidée afin de ne pas réduire l’intervention à des dimensions techniques ou d’entretien d’espace de vie. Sans ce « tissage » l’ajustement à l’autre ne peut se faire. Sans ce tissage l’autre est vécu comme un intrus et pour en avoir la maîtrise son action est réduite à des tâches sans importance. Toutefois, comme le soulève Éric GAGNON, Francine SAILLANT dans leur ouvrage « l’essentiel des pratiques d’aide et de soin à domicile consisterait à combler des besoins fonctionnels, primaires, de façon à rendre possible le maintien à domicile » (p. 220). Mais peut-on réduire cette intervention à ce prisme ?
C’est dans ce contexte que L’Institut Régional du Travail Social a interrogé la place du projet individualisé, via le plan d’aide. Nous avons supposé qu’il pouvait devenir le tiers créant la distance nécessaire dans cet espace temps fait d’intime. C’est aussi cet outil qui permettait de légitimer l’intervention tout en la faisant vivre dans ces différentes composantes tant concernant l’entretien du cadre de vie que du maintien de l’autonomie, du lien social, etc.
En prenant conscience des enjeux recouvrant la formation des auxiliaires de Vie Sociale nous avons eu pour volonté que cette profession, au regard des enjeux concernant le grand âge soit mieux reconnue et valorisée dans l’exercice de ses missions tant par les personnes bénéficiaires que les professionnels intervenants au domicile.
Nous nous sommes posé plusieurs questions :
- Comment concilier démarche de projet personnalisé à domicile dans un contexte local en pleine mutation ?
- Comment la professionnalisation concoure notamment au maintien à domicile ?
- Quels liens entre les acteurs et quelle coordination cela suppose ?
Pour répondre à ces questions, nous avons réfléchi à la démarche de projet individualisé dans le contexte d’intervention à domicile. Cette réflexion s’appuie sur une méthodologique déclinée depuis 2012 dans le cadre de l’alternance intégrative de la formation des Auxiliaires de Vie Sociale et d’un nouveau projet pédagogique. Dans une logique de co-construction, nous avons collaboré avec: le Conseil Départemental, les structures d’aide à domicile, les professionnels AVS, les tuteurs et les stagiaires.

Ainsi il s’agissait de :

- Proposer une grille d’intervention pour les stagiaires en stage à domicile pour faciliter la mise en œuvre du projet individualisé et son compte-rendu écrit.
- Analyser les situations de travail en lien avec la mise en œuvre du projet individualisé à domicile au travers des productions écrites des stagiaires (dossier de pratiques professionnelles)
- Valoriser la place des tuteurs (professionnels AVS) en sollicitant et leur présence lors des visites de stage et leur compréhension de la situation professionnelle.
- Organiser des rencontres avec les responsables de secteur pour échanger autour de leurs outils d’intervention contribuant à la mise en place du projet individualisé et sur la pratique professionnelle des AVS en exercice.
- Recueillir les représentations auprès des stagiaires sur leur définition d’un projet personnalisé à domicile
- Analyser les procédures de la prise en charge de la personne âgée dans le cadre des différentes structures d’aide à domicile.
Dans un premier temps, les résultats de notre démarche mettent en évidence plusieurs éléments et ouvrent la voie à un développement de la coordination entre acteurs :
o sur le plan professionnel : cela a permis de participer à amorcer la structuration et de la valorisation de cette profession auprès des bénéficiaires et de leur famille et des autres acteurs intervenants à domicile.
o Pour le bénéficiaire et la famille : cela a permis de mettre en évidence la nécessité de donner sens à l’action qui est menée lors de la réalisation du plan d’aide ; et de participer à promouvoir l’AVS comme un professionnel de l’intervention sociale à domicile diplômé d’Etat et non un exécutant des taches ménagères
o Pour l’employeur : commencer à faire vivre le cadre d’intervention auprès des bénéficiaires et de la famille, soutenant ainsi une démarche qualité.
o Pour le financeur : donner à terme une lecture sur l’évolution des besoins des personnes âgées pris en charge sur le territoire dans le cadre de l’APA et comment l’accompagnement a répondu aux besoins.
o Pour le centre de formation : s’investir dans un travail d’ingénierie avec l’ensemble des acteurs pour élaborer une stratégie pédagogique dans le cadre de l’acquisition des compétences liées à la participation, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation du projet individualisé à domicile. En outre, cela permettra à terme de favoriser la mise en œuvre du projet individualisé répondant aux exigences du terrain, du référentiel métier, des financeurs.

Dans un deuxième temps, notre analyse de l’enquête menée auprès des professionnels et des responsables de secteur des services à domicile, a mis en évidence des axes à travailler :

- A l’unanimité il est remonté des difficultés pour la mise en œuvre de leur prestation de par la problématique de financement dans ce secteur, et la raréfaction des professionnels diplômés AVS.
- Des liens sont encore insuffisants entre le service prestataire et celui qui a évalué les besoins. Cela démontre un déficit de transmission d’informations de la part des différents acteurs intervenants au domicile de la personne.
- Au niveau des professionnels, la question de la reconnaissance de leur profession par les bénéficiaires et l’environnement familial voire par les autres intervenants à domicile, se pose. Par ailleurs, la représentation qui perdure est que l’essentiel de leur activité se réduit encore à des tâches ménagères au détriment de l’accompagnement social. En conséquence, les AVS qualifiées par la formation qui ne se sentent pas reconnues dans les fonctions liée à l’aide à la personne, partent vers d’autres secteurs plus valorisants (secteur médico-social institutionnel).
- Il est aussi question de leur faible rémunération en lien avec leurs activités.
- Une méconnaissance de la personne âgée est révélée par les éléments de notre enquête
- Il y a encore peu de lien avec les autres acteurs de l’intervention à domicile : kinésithérapeute, infirmier, médecin.
- Enfin, la notion de projet individualisé est encore peu visible dans leur activité.

Au fur et à mesure du processus que nous avons mis en place depuis 2012, progressivement nous voyions la place de l’AVS à domicile se modifier. Ainsi après avoir sollicité les employeurs, aujourd’hui c’est le Conseil Départemental qui s’intéresse à notre action et demande à investir notre groupe de travail. Dans le même temps cela sous-tend le fait que les problématiques rencontrées liées à la grande dépendance, nécessitent un certain niveau de qualification et une professionnalisation pour mettre en œuvre des accompagnements médicaux-sociaux de qualité.
Par ailleurs, à La Réunion comme ailleurs, nous sommes conscient de la nécessité de l’émergence d’une coordination des acteurs. Au sein du domicile, les professionnels AVS ne pourront contribuer qu’avec force que s’ils bénéficient de la reconnaissance de leur savoir faire par les autres intervenants.
Le principe de « bien vieillir chez soi » interroge plus largement la société sur ce qu’elle veut proposer aux personnes âgées. Cette dynamique va s’articuler aux gérontechnologies qui vont probablement faciliter le quotidien si financièrement elles sont accessibles.

Résumé en Anglais


Non disponible