Fiche Documentaire n° 4021

Titre « Des précaires au service des précaires » : comment intervenir face aux précarités des personnes accompagnées quand on est soi-même précaire ?

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Auteur(s) PROTTO Brigitte  
     
Thème Compte- rendu d’une enquête réalisée auprès d’assistants sociaux en formation à l’Institut Régional de Travail Social (IRTS) du Nord Pas de Calais  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

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Résumé

« Des précaires au service des précaires » : comment intervenir face aux précarités des personnes accompagnées quand on est soi-même précaire ?

Le traitement de la précarité constitue aujourd’hui un axe essentiel des interventions sociales quels que soient les services et lieux d’intervention. Lors d’échanges avec les Assistants Sociaux (AS) en formation, nombreux sont ceux qui sont interpellés au cours de leurs stages par la pauvreté, la précarité financière que rencontrent les personnes accompagnées : conditions matérielles d’existence mais aussi problème de santé, de logement,… . Parallèlement, dans mes fonctions de responsable de formation AS à l’IRTS sur la Métropole Lilloise, je suis également alarmée par les formes de précarité de plus en plus présentes chez les étudiants et par leur difficulté à solliciter une aide.
Dans une formation marquée par l’engagement de soi dans la relation d’aide, quelles représentations sont en jeu pour aider l’autre dans sa précarité quand on est soi-même précaire?
Une étude réalisée dans le cadre du DEIS interpellait, en 2010, l’équipe pédagogique AS, sur les différentes formes de précarité vécues par les étudiants. Etait alors repérée une précarité déjà multiple du fait :
- De la précarité inhérente au statut d’étudiant : transitoire, incertain
- Des conditions de vie des étudiants
- De leur état de santé
- De l’exigence du parcours de formation et de certification
A ces précarités se sont ajoutées plus récemment :
- Les difficultés de réaliser de manière « sécurisée » l’ensemble des stages en lien avec leur projet professionnel
- Une perspective d’arrivée dans la vie active difficile, faite d’emplois à temps partiel, de CDD voire de réorientations nécessaires.
Si « le social désigne les mécanismes par lesquels la société résout certains de ses problèmes en les soustrayant à l’action des particuliers, en les caractérisant comme relevant de normes et de dispositions générales » , quelle posture prend le travailleur social en formation face à un problème qui le touche lui-même ?
L’objet de ce colloque me donne l’occasion d’approfondir cette évolution des métiers, à partir d’AS en formation. Après une contextualisation et la définition des termes employés, cette contribution présentera l’analyse de l’investigation (questionnaires et entretiens) réalisée auprès de d’étudiants sur leurs liens entre précarité vécue ou ressentie et précarité aidée.
Quelques éléments nous permettront dans un premier temps de resituer cette formation dans une perspective historique et de percevoir les évolutions des futurs travailleurs sociaux : des AS issus des « bonnes familles » aux « précaires au service de précaires », qui sont les futurs AS aujourd’hui ?
Dans un deuxième temps, l’étude repérera l’impact du fait d’être soi-même précaire dans l’intervention sociale : stratégies pour soi et pour les autres, représentations, attitude, empathie, projection, …
Delphine Serre dans sa recherche montre que l’intervention de l’AS ne peut être réduite à sa seule identité professionnelle, qu’elle est liée à l’identité personnelle de l’intervenant. Qu’en est-il de la question de la précarité ? Comment cette réalité vécue ou ressentie intervient-elle dans la lecture des problèmes sociaux ? Dans une société marquée par l’individualisme et donc la responsabilité de chacun face au problème rencontré, comment l’intervenant social évalue-t-il le contexte global du problème ?
Les stratégies mises en œuvre par les étudiants pour eux- même constituent-elles de solutions possibles pour les personnes accompagnées ? Les actions collectives peuvent-elles être mobilisées ?
Ces aspects seront abordés à partir de l’expression des étudiants, concernant les représentations de la précarité sous trois angles :
o En rapport à sa propre histoire
o En lien avec les expériences de stage
o Dans la construction de la professionnalité
A partir d’enquêtes auprès d’AS en formation, il s’agit d’interroger l’évolution des profils et des modes d’intervention face à une précarité de plus en plus prégnante et d’en tenir compte dans les dispositifs de formation.

Bibliographie

• ARON S., 1988, « Un regard historique sur le service social », La Revue de l’Économie Sociale, septembre 1988.
• BOUQUET B., GARCETTE C., 3e édition 2006, Assistante sociale aujourd’hui, Maloine, collection Professions de santé.
• DELEPOULLE C. et FABRE M. : Thèse de médecine; 2012, Université de médecine de Grenoble, « Représentations et vécu de la grande précarité par le personnel des urgences du Centre Hospitalier de Chambéry »
• DE ROBERTIS C., PASCAL H., 1987, L’intervention collective en travail social. L’action auprès des groupes et communautés, Paris, Centurion, Socioguides.
• GUERRAND R.-H., RUPP M.-A., 1978, Brève histoire du service social en France. 1896 - 1976, Toulouse, Privat, collection Regard.
• HATZFELD H., 2008 Construire de nouvelles légitimités en travail social, Dunod.
• JOVELIN E., BOUQUET B., 2005, Histoire des métiers du social en France, Paris, Éditions ASH.
• LE BOUFFANT C., GUELAMINE F., 2002, Guide de l’assistante sociale, Paris, Dunod.
• MARCHAND JM., ROMY JM, DENIS C., Rapport d’étude terrain DEIS, 2010, Lille, « La question de la précarité des étudiants en formation Assistant de service social »
• MOLINA Y., communication AIFRIS 2007 :« Intitulé de la communication : Entre travail prescrit et représentations sociales dans un processus de professionnalisation chez les assistants de service social en formation initiale ».
• MORAND G., 1992, Identité professionnelle et formation permanente des assistantes sociales, Paris, Bayard.
• PERRENOUD P., université de Genève, 2001, Articulation théorie- pratique et formation de praticiens réflexifs en alternance,
• RUPP MA, 1972, L’aide psychosociale individuelle. Paris, Le centurion
• SERRE D., 2009, les coulisses de l’état social : enquête sur les signalements d’enfants en danger, Paris ; édition raisons d’Agir
• SOVOYANT A., 1997 ; Approche cognitive de l’alternance : les formations en alternance, développement et enjeux,
• VERDES-LEROUX J., 1978, Le travail social, Paris, Editions de Minuit, collection Le sens commun.

Présentation des auteurs

Cadre pédagogique à l'IRTS Nord pas de calais, je suis responsable de la formation des Assistants de service social et référente du projet pédagogique de l’alternance. De formation initiale AS, je suis également titulaire du master 2 "travail social, travail et emploi, action sociale et société" de CNAM, depuis 2003.

Communication complète

Dans mes fonctions de responsable de formation Assistant Social (AS) à l’Institut Régional du Travail Social (IRTS) du Nord Pas de Calais, les formes de précarité me semblent de plus en plus présentes chez les étudiants, bien qu’une certaine « pudeur » semble les empêcher de solliciter de l’aide. « Ce serait un comble pour une future AS de demander de l’aide ! » exprime une étudiante.
Ce colloque me permet d’explorer cette question du traitement de la précarité vue par des futurs travailleurs sociaux, parfois eux-mêmes en situation de précarité. Dans une profession marquée par l’engagement de soi dans la relation d’aide, quelles représentations sont en jeu pour aider l’autre dans sa précarité quand on est soi-même précaire?
Les données qui suivent sont élaborées à partir d’une enquête réalisée auprès d’AS en formation. Trois promotions ont été sollicitées permettant de recueillir 117 questionnaires, et donnant aux étudiants la possibilité de s’exprimer sur leur propre rapport à la précarité, celle des personnes précaires rencontrées dans le cadre des stages, et les incidences sur leur professionnalisation.
Le profil des étudiants enquêtés : sur 117 étudiants, 95% sont des femmes, plus de la moitié ont entre 20 et 24 ans et 75% moins de 25 ans, plus de la moitié sont domiciliés sur la Métropole Lilloise, originaire de ce territoire ou y habitant pour la formation. Ce profil des enquêtés correspond au profil général des promotions.
La grille d’analyse met en avant les éléments significatifs selon que l’étudiant se déclare précaire ou non et selon son année de formation. Une partie des éléments est « quantitative » (pourcentage) l’autre est réalisée à partir d’une analyse sémantique qui reprend les idées forces abordées par les étudiants à partir de la fréquence des termes utilisés (nombre de fois).
La précarité chez les étudiants
Une étude réalisée dans le cadre du DEIS en 2010, identifiait les différentes formes de précarité vécues par les étudiants, précarité multiple du fait :
- De la précarité inhérente au statut d’étudiant : transitoire, incertain
- Des conditions de vie des étudiants
- De leur état de santé
- De l’exigence du parcours de formation et de certification
L’enquête réalisée en 2015 conforte cette réalité : Plus d’un étudiant sur 2 se déclare « ponctuellement » précaire, 20% « souvent » ou « totalement » précaire et seul 21% se disent « pas du tout » précaire.
 25 étudiants s’estiment précaires, « souvent » ou « totalement », ils ont pour moins de la moitié entre 20 et 24 ans, avec une sur représentation des moins de 20 ans et des plus de 40 au regard de l’échantillon.
Un détour par la définition que les étudiants en donnent, nous permettra de présenter ensuite les raisons évoquées pour caractériser cette précarité. Les termes ont été classés selon leur plus grande fréquence, pour en donner une approche collective.
La précarité est avant tout définie par des difficultés « financières» ((44), auxquelles on peut associer « ressources », et « moyens » (en tout 51)) ; le terme « Difficulté »(41) peu qualifiant est de de moins en moins employé au cours des années de formation. Si la précarité est financière, elle est souvent caractérisée de « multiples »(40) et a pour conséquence des « manques » (29), l’impossibilité de subvenir à ses besoins (25). La notion d’insécurité, d’instabilité est citée 17 fois. Aucun étudiant ne fait référence à un phénomène de société, c’est avant tout la précarité d’une personne, voire pour les étudiants « précaires » une définition personnelle, liée à un vécu.
« C'est une notion subjective, car chacun a sa définition de la précarité et de ce qui est acceptable ou pas » (AS1)
Trois items sont proposés aux étudiants s’étant déclarés précaires pour caractériser leur précarité : des causes matérielles, des causes non matérielles, la formation.
C’est essentiellement l’aspect financier (plus de 65%) auxquelles s’ajoutent les déplacements (21,5%) qui impacte les conditions de vie des étudiants.
 Pour les étudiants « souvent » ou « totalement » précaires, les causes financières sont toujours citées.
Dans les causes non matérielles, la « faible estime de soi » est le plus souvent citée (32%) puis les « problèmes de santé » 27,5 % et « le manque d’information » 27,5%. Ce pourcentage est décroissant selon l’année de formation, comme si la formation AS venait compenser ce manque d’information.
La formation constitue une des causes possibles de précarisation pour 25% des étudiants, alors que pour 14% elle n’a aucun impact, 64% ressentent « un peu » ou « moyennement » les charges de la formation.
Dans ce registre, 40% citent « les contraintes pédagogiques » et 23,4 % « le travail personnel lié à la formation ». Ces contraintes semblent être associées à la nécessité d’effectuer un travail salarié complémentaire (pour 16%).
 Pour les étudiants « souvent » ou « totalement » précaires, l’impact de la formation est « important » pour 9 et « moyennement » pour 8. Pour 5 étudiants précaires elle n’a aucun impact. Dans les raisons citées, le travail salarié est prépondérant et s’ajoute aux contraintes pédagogiques et au travail personnel lié à la formation.
Interpellés sur les « charges cognitives » liées à la formation comme facteur de précarité, 13% retiennent cet item.
Le manque de moyens financiers est toujours un élément rendant compte de la précarité étudiante, comme le sont la santé et l’exigence de la formation. L’estime de soi semble être un élément nouveau dans les caractéristiques de cette précarité étudiante. Elle touche à des degrés divers un nombre important d’étudiants et les rend potentiellement plus proches des problèmes des personnes accompagnées, on peut ici s’interroger avec Dominique Depenne sur cette notion de proximité.
Cette proximité essentiellement repérée par l’auteur dans la qualité de la relation, pose la question de la reconnaissance de la singularité et de l’altérité de l’autre accompagné. Derrière la question de l’identification possible il peut y avoir un réflexe de protection, d’où la nécessité de comprendre en dehors des émotions et d’objectiver pour apporter des réponses aux besoins des personnes accompagnées. Qu’en est- il de cette rencontre avec les personnes précaires au cours des stages ?
La précarité perçue par les étudiants
Pour 5% des étudiants, les stages n’ont pas été l’occasion de faire évoluer leur regard sur la précarité, (aucun étudiant de 3ère année). Pour 20%, ce regard s’est totalement modifié essentiellement pour des étudiants non précaires.
Comme pour leur propre précarité, les étudiants ont eu à attribuer la précarité des personnes accompagnées à des causes matérielles ou non.
Concernant les causes matérielles, c’est également l’aspect financier (1/3) qui la caractérise le plus souvent, puis viennent les problèmes administratifs (21%). 15 % estiment que cette précarité cumule tous les aspects matériels.
 Pour les étudiants précaires les causes sont identiques mais dans des proportions différentes plus d’un ¼ désigne un cumul de toutes les causes, un peu moins d’un ¼ les raisons financières et administratives.
Dans les causes non matérielles, les problèmes de santé sont les plus cités (30%), puis le manque d’infos (23%) et la faible estime de soi pour 19% (un peu moins cité pour les étudiants précaires)
Ainsi la précarité étudiante ressemble beaucoup à celle des personnes accompagnées, à l’exception des problèmes liés au manque d’information ou d’ordre administratif, davantage repérés pour les personnes accompagnées que pour les étudiants.
En réponse aux problèmes matériels essentiellement financiers, les solutions proposées par les étudiants « pour s’en sortir » font en majorité référence au travail (24) puis au soutien par l’entourage, la famille (17). Face à des revenus insuffisants, ils doivent gérer strictement leur budget (14) et se priver. Pour les plus précaires ces privations sont importantes : loisirs, culture, sortie… Le recours à des formes de « système D » ou de consommation alternative (trocs) est important (10). Seul 9 étudiants citent la possibilité de solliciter une aide sociale.
Relativiser et attendre des jours meilleurs (16), semble être une option que l’on peut attribuer à leur statut d’étudiant et aux perspectives d’un emploi à terme. Au regard d’une précarité non matérielle, comme « l’estime de soi », peu de réponses sont évoquées.
Les stratégies qu’ils mettent en place pour eux sont- elles également celles qu’ils identifient chez les personnes précaires rencontrées en stage ? C’est ici la « demande d’aides légales» qui est le plus souvent citée (41), ce qui semble logique puisque c’est le motif de leur rencontre, puis viennent les demandes d’aide en dehors du social institutionnalisé (32) comme le soutien par l’entourage ou le système D.
21 personnes expriment repérer 2 types d’attitude : ceux qui veulent s’en sortir et mobilisent tout ce qui est possible (social ou pas) et ceux qui attendent, baissent les bras (7), voire « attendent tout des services sociaux », ou « s’en remettent à la religion »(3).
Dans les stratégies des personnes on retrouve la gestion stricte du budget (16), comme pour les étudiants et la recherche d’information (9). Le « travail » n’est ici cité que 4 fois dans une perspective de « travailler plus » : travail au noir, heures supplémentaires.
Ici encore les problèmes comme la santé, l’estime de soi, l’isolement fréquemment cités dans les causes de la précarité ne font pas écho à des solutions ou stratégies perçues par les étudiants.
Enfin le travail, solution aux précarités étudiantes, est très peu cité concernant les personnes accompagnées.
Les éléments de compréhension de la précarité des personnes rencontrées en stage.
C’est la description de la précarité en tant que « fait social » qui est principalement citée (45) comme « phénomène social » (22) et le fait que cette précarité « peut toucher tout le monde » (5). Sont ensuite exprimées les notions d’«injustice», d’«inégalités» (15), en lien avec le «manque de moyens» (14) qui, quand il est précisé, est attribué à l’Etat (7).
Une partie des éléments décrit ce phénomène en tant que processus individuel (26) : « cercle vicieux », « engrenage » (7), « complexe », souvent « multiple » (6) et aux conséquences négatives sur les personnes : « difficultés au quotidien » (10), « souffrance » (8).
La référence aux émotions face à cette précarité (22) est très présente : « tristesse », « touchée» (16 (dont 7 précaires)). Cette fréquence est décroissante selon l’année d’étude (très forte chez les AS1).
Enfin les réactions engagent l’intervention sociale (14): mobiliser les dispositifs, développer l’empathie.
Derrière une possible banalisation de la précarité comme fait social et en lien avec des problèmes financiers mais aux formes multiples, et pouvant « toucher tout le monde », les étudiants restent touchés par la situation des personnes précaires et identifient ce problème comme un axe important du travail social. « C’est ça le cœur du travail social » AS2.
La part de l’émotion dans l’intervention sociale est parfois questionnée. Positionnée du côté de « l’aidé » plus que de « l’aidant », elle est au cœur d’une relation professionnelle de qualité. « Toute relation se fonde sur l’émotion qui permet au client d’exprimer et au professionnel de recevoir » . Elle est ici très présente du côté de l’aidant. Les étudiants au cours de la formation sont appelés « à gérer leurs émotions » pour se professionnaliser. Repérer leurs émotions, les laisser venir, mais aussi les maîtriser, les percevoir comme positives ou négatives pour les intégrer dans l’intervention sociale aux côtés des méthodologies ou de techniques.
La construction de l’intervention sociale.
Delphine Serre dans sa recherche montre que l’intervention de l’AS ne peut être réduite à sa seule identité professionnelle, qu’elle est liée à l’identité personnelle de l’intervenant. Qu’en est-il de la question de la précarité ? Comment cette réalité vécue ou ressentie intervient-elle dans la lecture des problèmes sociaux ?
Quand les futurs AS se retrouvent en situation professionnelle face à des personnes en précarité, leurs réactions sont à nouveau l’émotion, la tristesse (39) avec pour les plus précaires une résonance (10) exprimée par « il y a pire que moi » ou « ces personnes sont plus fortes que moi » ; ou une « la prise de conscience » de cette précarité (7). Une personne se dit « choquée ».
27 personnes (7 précaires), évoquent l’envie « d’aider les personnes à s’en sortir », qui se traduit par une intervention professionnelle (33) et les activités décrites rejoignent alors les référentiels « métiers » utilisés en formation :
- Orienter les personnes vers des professionnels, les dispositifs et les partenaires (24) et les informer sur leurs droits : 9
- Accompagner (16) en proposant une relation de qualité : empathie et compréhension (25), écoute (12) et soutien (14), en associant la personne (13).
- Mobiliser les partenaires 7.
L’alternance permet aux étudiants à partir de situations de travail réelles d’intégrer les contenus de formation. Face à la précarité jugée centrale dans la société et enjeu du travail social, les étudiants sont amenés à porter un regard sur leur parcours de professionnalisation.
L’idée force est alors qu’ils doivent se préparer pour faire bien ou mieux leur travail. Cette idée fréquente (27), est décrite comme une véritable mission.
Cela passe par la nécessité de se former (7), de développer des savoirs (20) (dont 16 AS1), de comprendre et d’interroger l’efficacité des interventions.
La plus grande fréquence se situe à propos de la qualité de la relation mettant en avant la place de l’usager (33), la nécessité de s’adapter à chaque situation, à chaque personne (19) (AS2 et AS3), de repérer les potentialités des personnes au-delà de leurs limites (7), et d’établir une relation de confiance (11).
Des références directes aux méthodologies d’intervention (10) précisent essentiellement l’intervention individuelle, les projets collectifs sont peu évoqués (8).
Cette problématique dévoile également la nécessité d’un travail social en partenariat (8)
Face à la question des émotions, des ressentis, des projections possibles, peu d’éléments sont apportés même si 3 personnes précaires évoquent à nouveau « la résonance ». Ce travail sur soi n’apparait ni comme un besoin de formation initiale, ni comme une composante du métier.
Pour les étudiants précaires y a- t-il une projection sur l’aide apportée ?
Une forme de relativisme domine chez les étudiants précaires pour eux-mêmes, « bientôt ça ira mieux », et le possible recours à la famille et au système D pendant ce mauvais moment à passer. C’est une période de restriction, de gestion des priorités. Pour les personnes accompagnées, c’est le pessimisme qui est de rigueur avec l’obligation pour eux de trouver des solutions et la nécessité de frapper à toutes les portes » : démarches, associations, réseaux, et à nouveau la « débrouille ».
7 étudiants évoquent pour eux même comme pour les personnes accompagnées les mêmes réponses : le soutien familial, l’idée de se battre, les bonnes affaires, les aides extérieures, la gestion stricte du budget.
La place des personnes est particulièrement présente dans l’intervention sociale, avec un souci d’efficacité, d’aider à sortir de la précarité. Une étudiante évoque la distance à trouver entre vie personnelle et professionnelle.
Précaires ou non, le traitement de la précarité par les AS en formation se situe principalement sur le mode d’une intervention individuelle. Au cœur de ce traitement face à des moyens limités, c’est la qualité de la relation professionnelle qui est principalement amenée par les étudiants. Le recours à des projets plus collectifs est peu mobilisé y compris sur des questions comme l’isolement, la confiance en soi ou les problèmes de santé, actés comme des causes principales de précarisation. La recherche de travail n’est pas évoquée, l’aide à l’insertion professionnelle ne semble pas être considérée par les futurs AS comme l’une de leurs missions.
Les réactions face à cette précarité renvoient à des sentiments de pitié plus que de révolte laissant peu de place à une intervention sur des causes qui semblent dépasser les futurs travailleurs sociaux.
Peu d’éléments interrogent cette gestion de l’émotion, le rapport à ses propres références (pour les étudiants précaires y compris) permettant de mettre à distance pour mieux aider. Pour les étudiants « précaires » aucune mention ne se rapproche d’un quelconque jugement de valeurs, pour les non précaires, une responsabilité individuelle est parfois évoquée pour décrire la capacité des personnes à se mobiliser ou pas.
La formation constitue un moyen de parvenir à réussir une mission d’aide par l’acquisition de méthodes, mais aussi de connaissances en particulier pour orienter les personnes vers « d’autres » services, professionnels, dispositifs.
La précarité ressentie par près de 80 % des étudiants à des degrés divers se voit renforcée par la difficulté de réaliser de manière « sécurisée » le parcours de stages (en lien avec le décret d’encadrement des stages). Cette réalité nous invite à intégrer la question de la précarité dans nos parcours de formation à partir du vécu personnel des étudiants et non plus seulement comme extérieure à leur réalité. Cette étude montre également que le « savoir être » reste une composante essentielle du métier pour les futurs AS.

Résumé en Anglais


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