Fiche Documentaire n° 4047

Titre Appréhender les notions de subjectivité et d'efficacité managériale en travail social.

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Auteur(s) TRUBERT Olivier  
     
Thème  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

Appréhender les notions de subjectivité et d'efficacité managériale en travail social.

La précarité des publics est au centre des préoccupations des organisations sociales et médico-sociales. Elle ne touche pas que les usagers, elle touche aussi les travailleurs sociaux ainsi que les institutions dont ils font partie.Le travailleur social se trouve souvent coincé entre les injonctions d'innovation et de bonne gestion produites par les commanditaires de l'action sociale et la détresse vécue en face de la complexité des situations des usagers.
L'action sociale se pense maintenant en intervention sociale, les organisations de travail sont elles aussi impactées dans la façon de manager les équipes en fonction de ces mutations.
Sur le plan managérial, il existe de nombreuses lectures théoriques du fonctionnement d'une organisation et du sens qui oriente son action. Néanmoins, il demeure quelques invariants synthétisés pertinemment par L.G BOLMAN et T.E DEAL. Ces derniers dégagent quatre grands types d'approche afin d’appréhender une organisation de travail : symbolique, ressources humaines, structurelle, politique. En se référant à ce modèle, il apparaît, dans le fonctionnement des organisations sociales, un paradoxe qui se matérialise par une recherche de rationalisation du travail (dimension structurelle) et par la valorisation du facteur humain (approche symbolique).
Dans le secteur social et médico-social il y a percussion entre entre ces deux logiques, éprouvées comme non compatibles.
Il y a d'une part, celle de l'efficacité managériale soumise à un cadre législatif toujours plus marqué. Celle-ci elle peut parfois s'apparenter à une forme de néo-taylorisme, héritière de l'approche mécaniste et rationnelle de l'organisation incarnée par F.W TAYLOR, H.FAYOL, M.WEBER. et actualisé par H.MINTZBERG. défenseur de la matérialisation objective du travail.
Il existe, d'autre part, celle de l'approche culturelle et subjective de l'individu, liée à sa part inconsciente, à savoir celle du sens et du désir. L'importance de ces éléments à été théorisée par G.GRODDECK, S.FREUD, E.ENRIQUEZ, notamment dans la dimension parfois inhibante qu'une structure groupale peut produire sur un sujet vis à vis de l'expression de son désir.
L'écart se creuse entre une action professionnelle basée sur le sens de l'action (désir pour soi et pour l'autre) et l'efficacité organisationnelle (technicité, qualité, conformité).
Désirer pour pour l'autre, qu'il soit usager, bénéficiaire ou client ; s’inscrire dans une logique de satisfaction de désir individuel ou collectif concernant le professionnel au travail est-il compatible avec une logique d'efficacité managériale. Spécialement quand celle-ci est sous-tendue par des exigences de qualité, d'évaluation, de standardisation des procédures, des objectifs et des résultats.
La question suivante se pose pour les professionnels de la formation en travail social :
comment aider les cadres à développer un positionnement professionnel mixant une approche rationnelle et subjective envers les professionnels et les usagers ?
Il incombe à une formation de rendre compétent un cadre sur les questions de management administratif, de méthodologie de projet et de gestion opérationnelle des équipes. Cela devient beaucoup moins aisée de transmettre l'importance de la prise en compte des dimensions symbolique et subjective tant dans la sphère du management que dans celle de l'accompagnement des usagers. L'IRTS de Basse-Normandie prend en compte, dans ses actions de formation à destination des cadres cette dimension subjective. L'accent est mis sur le positionnement du manager dans son rapport à l'autorité, au conflit, sa façon d'incarner un projet et de l'animer, de rendre opérationnelle des notions comme celles de culture et de valeur. Être plus créatif passe par la prise en compte, dans les formations en management, de discipline telle que la philosophie, la psychosociologie et la psychanalyse afin de compléter des modèles théoriques primant la dimension comportementale de l'individu au travail.

Bibliographie

Bolman, L.G. et Deal, T.E (1996). Repenser les organisations, pour que diriger soit un art, Paris, Maxima.
Enriquez, E (1997). Les jeux du pouvoir et du désir dans l'entreprise, Paris, Desclée de Brouwer.
Groddeck, G (1976). Le livre du ça, Paris, Gallimard.
Freud, S (1943)(1986). Métapsychologie, Paris, Gallimard.
Freud, S (1929)(2010). Malaise dans la civilisation, Paris, Payot.
Mintzberg, H (1998). Structure et dynamique des organisations, Éditions d'Organisation.

Présentation des auteurs

Olivier Trubert
Responsable des formations de niveau 1 en management et ingénierie sociale à l'IRTS de Basse-Normandie
Formation :
DESS de Psychologie
Master 2 en Management des organisations sociales

Communication complète

La précarité des publics en difficulté est au centre des préoccupations des organisations sociales et médico-sociales. Elle ne touche pas que les usagers, elle touche aussi les travailleurs sociaux ainsi que les institutions dont ils font partie. Le travailleur social se trouve souvent « coincé » entre les injonctions d'innovation et de bonne gestion produites par les commanditaires de l'action sociale et la détresse vécue en face de la complexité des situations des usagers.
L'action sociale se pense maintenant en intervention sociale, les organisations de travail sont elles aussi impactées dans la façon de manager les équipes en fonction de ces mutations.

Sur le plan managérial, il existe de nombreuses lectures théoriques du fonctionnement d'une organisation et du sens qui oriente son action. Néanmoins, il demeure quelques invariants synthétisés pertinemment par L.G BOLMAN et T.E DEAL. Ces derniers dégagent quatre grands types de dimensions afin d’appréhender une organisation de travail :

La dimension « symbolique » incluant les rites et symboles concernant une organisation donnée, les aspects inconscients la traversant, la notion de mythe fondateur ainsi que la notion de sens dans son acception large ;

La dimension « ressources humaines » qui concerne l’aspect individuel du professionnel et se déclinerait sous l’angle des notions de besoin, de compétences, de pulsion et de motivation ;

La dimension « structurelle », c’est une métaphore de la machine, elle est en lien avec les notions d’objectifs, de relations formelles, de procédures, de division du travail. Les processus conscients et surmoïques y sont d’emblée prioritaires;

La dimension « politique » dans laquelle l’organisation est vécue comme un lieu de concurrence, d’alliances, de conflits et de coalitions. Les aspects concernant les notions de désir, de lien social et de relation à l’autre sont dominants.

En se référant à ce modèle, il apparaît, dans le fonctionnement des organisations sociales, un paradoxe qui se matérialise par une recherche de rationalisation du travail (dimension structurelle) et, dans le même temps, par une recherche de la valorisation du facteur humain (approche symbolique, politique et ressources humaines).

Dans le secteur social et médico-social, il y a percussion entre ces deux logiques, bien souvent éprouvées comme non compatibles par les professionnels de terrain.

Il y a d'une part, celle de l'efficacité managériale soumise à un cadre législatif toujours plus marqué. Celle-ci peut parfois s'apparenter à une forme de néo-taylorisme, héritière de l'approche mécaniste et rationnelle de l'organisation incarnée par F.W TAYLOR, H.FAYOL, M.WEBER et actualisée par H.MINTZBERG, défenseur de la matérialisation objective du travail.

Il existe, d'autre part, celle de l'approche culturelle et subjective de l'individu, liée à sa part en partie inconsciente, à savoir celle des pulsions individuelles, du sens et du désir.

L'importance de ces éléments a été théorisée par G.GRODDECK (la pulsion est un principe vitale, individuel, irréductible), S.FREUD (la vie en groupe inhibe l’expression des pulsions individuelles et régule l’expression du désir), E.ENRIQUEZ (les désirs et l’ordre cohabitent dans le même espace organisationnel). De ce fait une organisation de travail et la structure groupale qui la sous-tend peut produire un rôle inhibiteur sur un sujet vis à vis de l'expression de son désir.


L'écart se creuse entre une action professionnelle basée sur le sens de l'action (désir pour soi et pour l'autre) et l'efficacité organisationnelle (technicité, qualité, conformité).

Dés lors, désirer pour l'autre, qu'il soit usager-client (vision libérale) ou bénéficiaire (vision gestionnaire) ; s’inscrire dans une logique de satisfaction de désir individuel ou collectif concernant le professionnel au travail est-il compatible avec une logique d'efficacité managériale ? Spécialement quand celle-ci est sous-tendue par des exigences de qualité, d'évaluation, de standardisation des procédures, des objectifs et des résultats.

La question suivante se pose pour les professionnels de la formation en travail social :
Comment aider les cadres à développer un positionnement professionnel mixant une approche rationnelle et subjective envers les professionnels et les usagers ?

Il incombe à une formation de rendre compétent un cadre sur les questions de management administratif, de méthodologie de projet et de gestion opérationnelle des équipes. Cela devient beaucoup moins aisé de transmettre l'importance de la prise en compte des dimensions symbolique et subjective tant dans la sphère du management que dans celle de l'accompagnement des usagers.

L'IRTS de Basse-Normandie prend en compte, dans ses actions de formation à destination des cadres cette dimension subjective. L'accent est mis sur le positionnement du manager dans son rapport à l'autorité, au conflit, sa façon d'incarner un projet et de l'animer, de rendre opérationnelles des notions comme celles de culture et de valeur. Être plus créatif passe par la prise en compte, dans les formations en management, de discipline telle que la philosophie, la psychosociologie et la psychanalyse afin de compléter des modèles théoriques favorisant la dimension comportementale de l'individu au travail.

A titre d’exemple, je présenterai deux modalités formatives qui visent à illustrer comment, concrètement, il est possible de réintroduire ces notions dans une dimension pédagogique innovante.

Le premier exemple concerne la Formation CAFERUIS qui est une formation qui vise à la professionnalisation des cadres intermédiaires du secteur. Nous avons introduit un module intitulé « Analyse de la fonction cadre ».

L’objectif de ce module est d’accompagner à la professionnalisation les personnes en formation en adoptant une pédagogie axée sur le retour d’expérience et concernant essentiellement le positionnement professionnel du cadre en situation de management ainsi que les savoirs-être qui accompagnent ce positionnement.

Exemple de sujet abordé :

Le rapport à l’autorité, le sens et l’appréhension des conflits, les questions d’éthique, la motivation des équipes, l’individu et le collectif, le passage d’un statut de professionnel de terrain à celui de cadre hiérarchique, la dimension performance et la dimension institutionnelle.

Le deuxième exemple concerne la création d’un espace d’échange et d’analyse à destination des cadres de direction des établissements du secteur social et médico-social.

Je citerai, notamment, une action menée à destination des cadres de direction au sein d’un établissement accueillant des usagers en situation de handicap.



Les objectifs de cette action étaient de permettre, pour les cadres concernés, l'expression de leurs préoccupations professionnelles en lien avec leur fonction, de mettre en lumière leur action en tant que cadre au sein des différentes équipes, de favoriser la capacité d'élaboration des participants autour de situations-problèmes vécues dans la structure.

Le travail réalisé s'est articulé autour des thématiques suivantes :

La coordination et l’harmonisation des modalités managériales entre cadres d’une même équipe de direction, l’impact sur les salariés des différents changements organisationnels et managériaux (changement de postes, création de nouvelles fonctions au sein de l'établissement, concilier la mise en conformité légale et la préservation des liens professionnels, les tensions subies par les cadres de proximité).

Ce travail et cette démarche instiguée depuis quelques années nous montre, de par la nature des thématiques explorées, la nécessaire prise en considération de facteurs subjectifs afin d'harmoniser le travail au sein des organisations et de maintenir une qualité d’accompagnement auprès des usagers en situation toujours plus complexe.

Il ne s'agit pas, là encore, d'opposer les dimensions structurelles liée à une organisation de travail, à la prise en compte de facteurs exclusivement subjectifs mais plutôt de tenter de faire cohabiter harmonieusement ces deux spécificités du travail « organisé » afin de répondre au mieux aux spécificités des publics accueillis au sein des structures et des dispositifs d'accompagnement sociaux.

Résumé en Anglais


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