Un autre regard sur le handicap dans la formation des Travailleurs sociaux

L’ensemble des dictionnaires rassemblant aujourd’hui les différentes significations du terme Handicap, témoignent par là de la difficulté à lui donner une définition précise. Utilisé dans le monde des courses de chevaux, il est également largement utilisé depuis des lustres dans l’univers du sport. Dans les deux cas, il consacre l’excellence de concurrents dont on cherche à égaliser les chances au départ d’une course parmi d’autres moins brillants. A contrario chez les humains, il désigne d’une manière très vague le désavantage d’une personne par rapport à une autre. Il regroupe alors dans nos évidences langagières contemporaines ces « désavantages sociaux ou professionnels, ces états d’infériorité dus à une infirmité, à une maladie »(Petit Larousse, 2002)

Cette définition, loin d’être satisfaisante du fait des variétés d’acceptions évoquées, souligne comment, à travers le langage, chaque société aborde sa conception de l’altérité. Elle l’élabore à partir d’un ensemble de normes auxquelles se réfère tout corps social. Nous emprunterons le désormais célèbre adage de Pierre Bourdieu : « Ce que nommer veut dire » [1] pour prendre conscience, à propos de notre objet de réflexion, de l’opposition complexe du normal au pathologique, entre les ‘‘normaux’’ et ceux ‘‘étiquetés’’ (au sens où l’entend Goffman) atteints d’une déficience ou d’une particularité. C’est alors qu’à l’appellation de handicapé, on appose dans un vain souci de précision, les adjectifs physique, sensoriel, mental ; certains même se hasardent à ajouter à cette liste social. A quoi peut donc renvoyer cette notion de handicap social ?…

Depuis 1975, la loi tente cette clarification en classant les personnes handicapées, selon certains aspects de leurs conditions, sans pour autant fournir de définitions des populations concernées. Cette ‘‘tâche impossible’’ revient aux commissions chargées d’attribuer le statut de handicapé. Mon propos visant à rappeler en préambule ces quelques notions, reprend la rupture épistémologique de Serge Ebersold quand il vise à « analyser les conditions sociales de production du handicap et de l’appellation de handicapé ».



La question reste plus que jamais d’actualité depuis une trentaine d’années quand parallèlement sont étudiées les formes d’exclusion sociale. Ils sont nombreux ces auteurs, souvent sociologues, qui ont effectué un travail de déconstruction concernant les effets d’une crise structurelle aux incidences multiples et donnant des lectures conceptuelles parfois complémentaires mais aussi contradictoires. Désaffiliation, disqualification sociale, déliaison en sont quelques unes des principales illustrations. Or en dépit des législations successives mises en place [2] le handicap reste une source d’exclusion certaine en termes d’acceptation sociale.

Jean-Yves BARREYRE, Classer les exclus, Dunod, Paris, 2000.

Pierre BOURDIEU, Questions de sociologie, Editions de Minuit, Paris, 1984.

Goffman

Serge EBERSOLD, La normalisation de l’infirme. L’invention du handicap, Editions du C.T.N.H.T.I. diffusées par les PUF, Paris, 1992.

Michel FOUCAULT, Histoire de la folie à l’âge classique, Gallimard, Paris, 1987.

P. MORMICHE, le handicap se conjugue au pluriel, INSEE première, n°742, octobre 2000.

P. MORMICHE, J.F. RAVAUD, « handicaps et incapacités » in Les inégalités sociales de santé, La Découverte, 2000.

Michel FOUCAULT, Histoire de la folie à l’âge classique, Gallimard, Paris, 1987.

Henri-Jacques STIKER, L’exclusion, l’état des savoirs, sous la direction de Serge Paugam, Editions La Découverte, 1996.

Dominique Devieilhe, IRTS de Basse-Normandie
Jean-Marc Brien Association Handi’Cap Citoyen

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