Fiche Documentaire n° 4424

Titre Les formes d'engagement et les registres de transmission existants entre trois générations marocaines masculines installées en Belgique

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Auteur(s) ARARA Rim
SYLIN Michel
 
     
Thème  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

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Résumé

Les formes d'engagement et les registres de transmission existants entre trois générations marocaines masculines installées en Belgique

La Belgique, en 1964, a signé une convention avec le Maroc pour le recrutement d’une main-d’œuvre jeune et masculine prête à travailler dans les industries belges. La première génération, peu après son installation provisoire dans ce pays d’accueil, a été sollicitée par l’État belge, à rapatrier les autres membres de la famille. Dès lors, la deuxième génération est arrivée dans le cadre du regroupement familial. Cette fixation, devenue au fil du temps, durable et définitive a occasionné la naissance en Belgique, d’une troisième génération. Nous nous retrouvons avec trois générations masculines ayant une filiation familiale, il s’agit du grand-père, du père et du petit-fils vivant en contact direct et continu s’influençant les uns les autres (MANNHEIN, 1990).
Chaque génération a un parcours chargé de vécu ; la comparaison transversale des histoires saisies par génération nous a aidés à élaborer leur trajectoire type.
De plus, ces générations procèdent à des engagements de proximité au sein de la famille et dans les associations religieuses. Elles ont milité au nom de la liberté religieuse afin de vivre amplement leur religion. Leur but étant de détenir un capital symbolique nécessaire à leur insertion dans le pays d’accueil et d’y préserver un patrimoine culturel et religieux. Ainsi, des associations religieuses ont-elles vu le jour et ont permis aux Marocains de confession musulmane d’avoir des lieux reconnus de rassemblement, d’entraide, de convivialité, etc.
Ces hommes se sont engagés envers leurs propres familles pour assurer l’éducation de la descendance et garantir des transmissions linguistiques, religieuses et culturelles aux couleurs du pays d’origine.
Cette étude relate les dynamiques intergénérationnelles basées sur les liens familiaux qui sont des relations particulièrement structurantes. Elles motivent des actes favorisant tant la solidarité que la collaboration entre ces trois générations.
Nous avons ainsi pu mettre en évidence la relation entre les solidarités familiales et communautaires et les transmissions intergénérationnelles qui demeurent des vecteurs du changement social. Elles assurent l’insertion dans de nouvelles sociétés, la promotion et le développement de toutes les générations ainsi que la production de nouvelles connaissances et pratiques.
Pour saisir notre l’objet d’étude, nous avons privilégié la démarche qualitative notamment la méthode de théorisation ancrée (PAILLE, 1994) qui nous a aidés à construire une arborescence thématique exposant les thèmes finaux se rapportant aux différents parcours d’installation, d’engagement et de transmission caractérisant chaque génération. L’utilisation de questionnaires nous a permis de donner la parole et d’ouvrir le dialogue avec ces générations qui nous ont livré des informations sur leurs trajectoires ce qui nous a aidés à comprendre leurs logiques d’actions.
Les processus d’engagement et de transmission de ce trio générationnel se structurent à partir de pratiques de solidarité familiale et d’entraide communautaire et interpellent d’emblée des registres de transmission (nous en avons trouvé trois).
Ce sont finalement des pratiques qui caractérisent les Marocains et qui se basent sur le don de soi et le devoir de fraternité tant envers la famille qu’envers la communauté. Il s’agit là des engagements de trois générations masculines les motivant à exprimer leurs valeurs dans des actes de citoyenneté. Ceci leur permet une participation sociale et un équilibre culturel leur garantissant d’une part, une cohérence identitaire vu qu’ils vivent la diversité dans un rapport non conflictuel, et d’autre part, une harmonie entre les valeurs d’origine et les exigences de la participation sociale.
Pour conclure, nous estimons que les liens familiaux permettent de maintenir les solidarités au travers des relations d’interdépendance inter et intra générationnelles, ce qui suscite de nouvelles pratiques et formes de solidarité, notamment dans le pays d’accueil.

Bibliographie

ATTIAS-DONFUT, C. & LAPIERRE, N., & SEALEN, M. (2002). Le nouvel esprit de famille, France, éditions Odile Jacob.
BERTAUX, D. (2010). Le récit de vie, France, Armand Colin.
BOURDIEU, P. (1986). «L’illusion biographique», Actes de la recherche en sciences sociales, Vol. 62-63.
DUPONT, C. & LETESSON, M. (2010). Comment développer une action intergénérationnelle, Bruxelles, De Boeck.
LEBATARD, C. (1999). «La famille, lieu de transmission», in COMMAILLE, Jacques, (dir.), La transmission entre les générations, un enjeu de société, Paris, édition A. Fayard.
LÉVI-STRAUSS, C. (1961). La pensée sauvage, Paris, Plon.
MANCO, A. (1998). Valeurs et projets des jeunes issus de l’immigration, France, L’Harmattan.
MANNHEIN, K. (2005). Le problème des générations, traduction de l’Allemand par MAUGER, G. & PERIVOLAROPOULOU, N. France, édition Armand Colin.
PAIILE, P. (1994). « L’analyse par théorisation ancrée ». Cahiers de recherche sociologique, n° 23, pp.147-181.
PAIILE, P. (1996). L’échantillonnage théorique. Induction analytique, qualitative par théorisation (analyse). Vérification des implications théoriques, dans MUCCIELLI (éd), dictionnaire des méthodes qualitatives en sciences humaines et sociales, Paris, Armand Colin.
RIVIERE, A. (1990). La psychologie de Vygotsky, Belgique, édition Pierre Mardaga.
SAYAD, A. (1992). L’immigration ou les paradoxes de l’altérité, Bruxelles, édition De Boeck.
VATZ-LAAROUSSI, M. (2013), « Les ainées réfugiées au Québec: entre transmission et transformation sociale » Recherches féministes, vol. 26, n°2, pp.105-126.
VINSONNEAU, G. (2012). Mondialisation et identité culturelle, Bruxelles, édition De Boeck.

Présentation des auteurs

Mme ARARA Rim (rarara@ulb.ac.be), est chercheuse à la Faculté de philosophie et des sciences sociales. Elle développe ses travaux de recherches au Centre de Recherche en Psychologie des Organisations et des Institutions (CeRePOI). Sa thèse de doctorat porte sur les trajectoires migratoires, les processus de construction identitaire, de socialisation, d’engagement et de transmission de trois générations marocaines masculines installées en Belgique.

M. SYLIN Michel (msylin@ulb.ac.be) est docteur en Sciences Psychologiques. Il est professeur à la Faculté des Sciences psychologiques et de l’éducation et à la Faculté de philosophie et des sciences sociales. Il dirige le Centre de Recherche en Psychologie des Organisations et des Institutions (CeRePOI).

Communication complète

La Belgique, en 1964, a signé une convention avec le Maroc pour le recrutement d’une main-d’œuvre jeune et masculine prête à travailler dans les industries belges. La première génération, peu après son installation provisoire dans ce pays d’accueil, a été sollicitée par l’État belge, à rapatrier les autres membres de la famille. Dès lors, la deuxième génération est arrivée dans le cadre du regroupement familial. Cette fixation, devenue au fil du temps, durable et définitive a occasionné la naissance en Belgique, d’une troisième génération. Nous nous retrouvons avec trois générations masculines ayant une filiation familiale, il s’agit du grand-père, du père et du petit-fils vivant en contact direct et continu s’influençant les uns les autres (MANNHEIN, 1990).
Chaque génération a un parcours chargé de vécu ; la comparaison transversale des histoires saisies par génération nous a aidés à élaborer leur trajectoire type.
De plus, ces générations procèdent à des engagements de proximité au sein de la famille et dans les associations religieuses. Elles ont milité au nom de la liberté religieuse afin de vivre amplement leur religion. Leur but étant de détenir un capital symbolique nécessaire à leur insertion dans le pays d’accueil et d’y préserver un patrimoine culturel et religieux. Ainsi, des associations religieuses ont-elles vu le jour et ont permis aux Marocains de confession musulmane d’avoir des lieux reconnus de rassemblement, d’entraide, de convivialité, etc.
Ces hommes se sont engagés envers leurs propres familles pour assurer l’éducation de la descendance et garantir des transmissions linguistiques, religieuses et culturelles aux couleurs du pays d’origine.
Cette étude relate les dynamiques intergénérationnelles basées sur les liens familiaux qui sont des relations particulièrement structurantes. Elles motivent des actes favorisant tant la solidarité que la collaboration entre ces trois générations.
Nous avons ainsi pu mettre en évidence la relation entre les solidarités familiales et communautaires et les transmissions intergénérationnelles qui demeurent des vecteurs du changement social. Elles assurent l’insertion dans de nouvelles sociétés, la promotion et le développement de toutes les générations ainsi que la production de nouvelles connaissances et pratiques.
Pour saisir notre l’objet d’étude, nous avons privilégié la démarche qualitative notamment la méthode de théorisation ancrée (PAILLE, 1994) qui nous a aidés à construire une arborescence thématique exposant les thèmes finaux se rapportant aux différents parcours d’installation, d’engagement et de transmission caractérisant chaque génération. L’utilisation de questionnaires nous a permis de donner la parole et d’ouvrir le dialogue avec ces générations qui nous ont livré des informations sur leurs trajectoires ce qui nous a aidés à comprendre leurs logiques d’actions.
Les processus d’engagement et de transmission de ce trio générationnel se structurent à partir de pratiques de solidarité familiale et d’entraide communautaire et interpellent d’emblée des registres de transmission (nous en avons trouvé trois).
Ce sont finalement des pratiques qui caractérisent les Marocains et qui se basent sur le don de soi et le devoir de fraternité tant envers la famille qu’envers la communauté. Il s’agit là des engagements de trois générations masculines les motivant à exprimer leurs valeurs dans des actes de citoyenneté. Ceci leur permet une participation sociale et un équilibre culturel leur garantissant d’une part, une cohérence identitaire vu qu’ils vivent la diversité dans un rapport non conflictuel, et d’autre part, une harmonie entre les valeurs d’origine et les exigences de la participation sociale.
Pour conclure, nous estimons que les liens familiaux permettent de maintenir les solidarités au travers des relations d’interdépendance inter et intra générationnelles, ce qui suscite de nouvelles pratiques et formes de solidarité, notamment dans le pays d’accueil.

Résumé en Anglais

The engagement forms and the transmission registers existing between three male generations resident in Belgium.

In 1964 Belgium signed an agreement with Morocco for a male young labor recruitment who are ready to work in the Belgian industries. The first generation, shortly after its temporary settlement in the host country, was asked by the Belgian State to repatriate the other members of the family. As a result, the second generation came under family reunification. This fixation, which has become permanent and lasting, has led to the birth of a third generation in Belgium. We find ourselves with public composed of three male generations of males with a family connection who have settled in Belgium. These are made up of the grandfather, the father and the grandson, living in direct and continuous contact influencing each other (Mannheim, 1990).
Each generation has a journey full of life experiences. The cross-sectional comparison of the stories seized by generation has helped us to develop typical trajectories of these immigrants. Moreover, these generations have made commitments of proximity especially within their families and in religious associations. They strived in the name of religious freedom in order to practice freely their religion. Their aim was to hold a symbolic capital needed in their insertion in the host country and in preserving a cultural and religious heritage. Thus, religious associations were born allowing Moroccans of Muslim communities to have recognized places of gathering, information, sharing, mutual aid, etc. These men are committed to their own families to ensure the education of the descendants and to guarantee linguistic, religious and cultural transmissions with a reminder of their native country.
This study provides a sketch of intergenerational dynamics based on family ties that are particularly structuring relationships. Its motivate acts that promote both solidarity and collaboration between these three generations
Therefore, we have been able to highlight the relationship between familial and communal solidarity and with the intergenerational transmissions, which remain vectors of social changes since they ensure the integration into new societies (both host and origin), the promotion and the development of all the generations and the production of a new acquaintance and practices.
To understand our subject of study, we promoted the qualitative approach notably the grounded theory method (PAILLE, 1994). This method helped us to construct a thematic tree showing the final themes related to the paths of installation, commitment and transmission characterizing each generation. The use of questionnaires allowed us to give the floor and open the dialogue with these generations who delivered us information on their trajectories to understand their logics of actions that build their knowledge.
The processes of commitment and transmission of this generational trio are structured on the basis of practices of family solidarity and mutual aid to the community, and from the outset require transmission registers (we have found three registers). It’s ultimately the practices which characterize Moroccans and which are based on the gift of self and the duty of fraternity both towards the family and the community.
These are the commitments of three generations of men motivating them to express their values in acts of citizenship. This allows them social participation and a cultural equilibrium guaranteeing, on the one hand, identity coherence, since they live diversity in a non-confrontational relationship and, on the other hand, a harmony between the values of origin and the requirements of social participation.
In conclusion, we believe that family ties maintain solidarity through inter and intra-generational relationships of interdependence, giving rise to new practices and forms of solidarity, particularly in the host country.