Fiche Documentaire n° 4998

Titre SocialLab, Médialab : de nouveaux espaces pratiques numériques favorisant la solidarité et le pouvoir d'agir.

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l'auteur principal

Auteur(s) COCLET Julien
WEBER Etienne
SENTIS François
 
Site de l'auteur www.urbanprod.net ( COCLET Julien )  
     
Thème Expérience de collaboration entre un institut de formation en travail social et une association d’intervention sociale  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

SocialLab, Médialab : de nouveaux espaces pratiques numériques favorisant la solidarité et le pouvoir d'agir.

Notre proposition de communication s’organise de la façon suivante :

- Dans un premier temps, après avoir défini ce que nous entendons par solidarité – (1) Celle-ci correspond à une dimension propre et indispensable chez homo sapiens. (2) Elle est issue d’un ensemble de fonctionnement neurologiques (système 1 & 2), psychologiques, cognitifs, émotionnels. (3) Ceux-ci s’enracinent dans notre évolution phylogénétique et dans notre développement ontogénétique – nous signalerons les éléments qui nous semblent important pour comprendre pourquoi et comment se tissent les relations interindividuelles. Cela nous amènera à préciser les processus en jeu et les conditions nécessaires à l’émergence de la solidarité.
- Dans un deuxième temps, nous interrogerons la place que prennent les techno-sciences dans l’évolution de l’homme. Nous insisterons plus particulièrement sur les technologies de communication et de relation actuelles. Les innovations actuelles interviennent sur l’opinion publique et les représentations. Une des questions se situe autour de ce que cela signifie en terme d’enjeux et comment cela peut se mettre en travail. Nous signalerons, également, comment le numérique et internet peuvent, sous certaines conditions, déclencher, mettre en réseau et en organisation tout un ensemble de solidarités touchant le plus grand nombre. A la suite de cela nous donnerons quelques préconisations d’usage à mettre en œuvre pour que ces technologies deviennent des outils de développement personnel, collectif et de solidarité et non une forme d’aliénation.
- Dans un troisième temps, notre propos abordera la question suivante :
Est-ce que la solidarité s’apprend ? Et si oui… Comment ?
Notre conception de l’intervention sociale et de la formation des travailleurs sociaux associée à notre expérience et nos engagements nous incitent à répondre affirmativement à cette interrogation. Cela nous amène à regrouper nos idées et travaux afin de poursuivre nos réflexions pour agir sur le vivre ensemble, réduire les inégalités, organiser de l’intelligence collective, en nous appuyant à la fois sur les recherches scientifiques, humaines, sociales et technologiques et les savoirs et actions de la société civile. Ici, il sera donc question d’illustrer nos propos à partir de la démarche que nous développons ensemble IRTS Paca et Corse et Urban Prod, au travers, notamment, d’une expérimentation d’un Social-Lab commun. Ce dispositif est issu du MarsMedialab, espace de pratiques numériques ouvert par Urban Prod, qui associe plus de quarante professionnels des champs du social, de la culture et des usages du numérique, plus de dix nationalités et treize langues parlées. Le lieu porte en son sein un atelier chantier d’insertion ; dispositif favorisant la remobilisation de publics particulièrement éloignés de l’emploi, par un accompagnement socio-professionnel renforcé et une production numérique partagée. Quatre enjeux sont particulièrement travaillés au MarsMedialab : (1) l’horizontalité dans le modèle de coopération entre salariés, usagers, bénévoles et volontaires, inspirée de la sociocratie et du mouvement des entreprises libérées ; (2) la pluridisciplinarité de son équipe, accordant une place particulière à l’usager ; (3) la convivialité mise en travail dans les différents espaces de travail (production, prototypage, formation et conciergerie partagée) ; (4) l’interculturalité favorisée par la dimension européenne du lieu.

Bibliographie

- P. Ariès, Le dernier qui s’en va éteint la lumière, Fayard, 2016.
- H. Atlan, Le vivant post-génomique, Odile Jacob, 2011.
- B. Beaude, Internet. Changer l’espace, changer la société, FYP, 2012.
- A. Berthoz, La simplexité, Odile Jacob, 2009.
- A. Berthoz, La vicariance, Odile Jacob, 2013.
- J.P Changeux, Du vrai, du beau, du bien, Odile Jacob, 2010.
- D. Cohen, Le monde est clos et le désir infini, Albin Michel, 2015.
- D. Cristol, Les communautés d’apprentissage. Apprendre ensemble à l’ère du numérique, ESF, 2016
- A. Damasio, L’autre moi-même, Odile Jacob, 2012.
- S. Dehaene, Le code de la conscience, Odile Jacob, 2014.
- M. Doueihi, Qu’est-ce que le numérique ?, PUF, 2013.
- J.Y Harari, Homo sapiens : une brève histoire de l’humanité, Albin Michel, 2015.
- D. Hofstadter & E. Sander, L’analogie, cœur de la pensée, Odile Jacob, 2013.
- O. Houdé, Le raisonnement, col. Que sais-je ?, PUF, 2014.
- D. Kahneman, Système 1 / système 2, Flammarion, 2012.
- J.P Lachaux, Le cerveau attentif, Odile Jacob, 2013.
- O. Le Deuff, Le temps des humanités digitales, FYP, 2014.
- L. Naccache, L’homme réseau-nable, Odile Jacob, 2015.
- P. Plantard, Pour en finir avec la fracture numérique, Espace de Débat, 2011.
- M. Puech, Homo sapiens technologicus, Le Pommier, 2008.
- J. Rifkin, La nouvelle société du coût marginal zéro, Les liens qui libèrent, 2014.
- R. Sennett, Ce que la main sait, Albin Michel, 2010.
- F. Sentis, Revue POUR N° 114, La société de communication, Paris, Privat, 1988.
- B. Stiegler, (Sous la direction de.) Réseaux sociaux, FYP, 2012.
- S. Tisseron, L’empathie au cœur du jeu social, Albin Michel, 2010.
- J.P Vincent & P.M Lledo, Le cerveau sur mesure, Odile Jacob, 2013.
- M. Wieviorka, L’impératif numérique, CNRS Editions, 2013.

Présentation des auteurs

E. Wéber : psychologue, formateur et chargé de mission FOAD à l’IRTS Paca et Corse (Institut Régional Provence, Alpes, Côte d’azur et Corse. Organisme de formation des travailleurs sociaux qui regroupe trois missions : la formation, la recherche, et l’animation des terrains professionnels). Outre mes activités professionnelles, je poursuis actuellement un doctorat en Sciences de l’Education à Nanterre sur le thème de l’impact du numérique et d’internet sur les fonctions mentales de l’adulte travailleur social en formation. Voir ci-après mon C.V

J. Coclet : psychologue, ergonome, directeur de l’association Urban Prod, à Marseille (France). Urban Prod travaille la question des humanités numériques comme outils de capacitation et de pouvoir d’agir, en particulier pour les usagers de services sociaux.

F. Sentis : Directeur Général de l’IRTS Paca et Corse (Institut Régional Provence, Alpes, Côte d’azur et Corse. Organisme de formation des travailleurs sociaux qui regroupe trois missions : la formation, la recherche, et l’animation des terrains professionnels). Docteur en Sciences de l’Education. Domaines d’intervention : analyse institutionnelle, évaluation de politiques publiques, conseil en méthodologie de projets en matière d’intervention sociale en France et à l’international.

Communication complète

Appel à communication MONTREAL 2017 :
7e Congrès international de l’AIFRIS du 4 au 7 juillet 2017

I - Présentation des intervenants :

F. Sentis : Directeur Général de l’IRTS Paca et Corse (Institut Régional Provence, Alpes, Côte d’azur et Corse. Organisme de formation des travailleurs sociaux qui regroupe trois missions : la formation, la recherche, et l’animation des terrains professionnels). Docteur en Sciences de l’Education. Domaines d’intervention : analyse institutionnelle, évaluation de politiques publiques, conseil en méthodologie de projets en matière d’intervention sociale en France et à l’international.

E. Wéber : psychologue, formateur et chargé de mission FOAD à l’IRTS Paca et Corse. Outre mes activités professionnelles, je poursuis actuellement un doctorat en Sciences de l’Education à Nanterre sur le thème de l’impact du numérique et d’internet sur les fonctions mentales de l’adulte travailleur social en formation.

J. Coclet : psychologue, ergonome, directeur de l’association Urban Prod, à Marseille (France). Urban Prod travaille la question des humanités numériques comme outils de capacitation et de pouvoir d’agir, en particulier pour les usagers de services sociaux.

II – Opportunité :

La complémentarité des trois axes de votre appel à communication et les questions que vous soulevez font écho à des activités que nous menons ensemble – à l’IRTS Paca et Corse et à Urban Prod – sur le terrain de la formation et de la pratique professionnelle. Ceci nous amène à faire une proposition d’intervention intégrant votre logique de questionnement et dans lequel nous situons notre réflexion et quelques éléments de réponse.

III – Communication :

Notre propos s’organise de la façon suivante :
Deux axes nous amènerons à préciser le sens que nous donnons à solidarité, puis le rôle et la place que peuvent jouer les technosciences dans le partage et l’entraide, et enfin la question de l’apprentissage à la solidarité. Nous illustrerons cette réflexion et ce questionnement à partir de la démarche que nous développons à l’IRTS Paca et Corse et Urban Prod, au travers, notamment, d’une expérimentation d’un Social-Lab. en commun.

1. Qu’est-ce que représente la solidarité pour nous ?

- Dans un premier temps, il nous semble utile de délimiter le sens que nous donnons à solidarité. Le premier point important que nous souhaitons signaler se situe dans l’aspect indispensable de ce comportement pour l’espèce humaine. Homo Sapiens n’aurait pu évoluer ni même survivre s’il n’avait développé cette aptitude à prendre soin de ses proches, les protéger, partager et faire preuve de solidarité. Cette capacité à éprouver des émotions, à se mettre à la place de l’autre, à se projeter « dans le cerveau » de nos congénères, à éprouver et imaginer ce que ressent et pense cet « autre moi-même» a permis, en quelque sorte, une extériorisation et une identification partielle de soi à autrui. Cela se produit pour les sensations, les émotions mais touche également le monde des idées et de la cognition. La théorie de l’esprit et l’empathie sont deux exemples de conceptualisation de ce phénomène, confirmés par les travaux en neurosciences qui mettent à jour l’existence et le fonctionnement de neurones miroirs et de neurones fuseaux. Ceci montre bien que l’observation de l’autre, son action, ses comportements, ses affects, sa cognition mobilise et met en œuvre les mêmes circuits neuronaux que nous utilisons quand nous agissons, pensons, etc. Dit autrement, notre fonctionnement humain est équipé d’un dispositif qui nous permet de reconnaitre, d’intégrer et de vivre ce que font et ressentent nos congénères comme s’il s’agissait de nous. En ce sens-là, nos pairs peuvent être considérés comme une partie de nous-même. Signalons également que ce dispositif se traduit à la fois dans l’émotionnel, le cognitif et les réactions physiologiques. Enfin, du côté de la théorie de l’évolution ces remarques réhabilitent, à notre avis, l’importance de la coopération / solidarité au sein même de la théorie de l’évolution darwinienne classique, et plus récemment cognitive et neuronale.
- La deuxième caractéristique importante concernant la solidarité se situe, selon nous, dans le rôle qu’elle joue dans le développement ontogénétique de l’homme. Nous avons évoqué ci-avant, et brièvement, l’importance que celle-ci a eu dans le développement de l’extraordinaire potentiel phylogénétique que nous avons actuellement à notre disposition. Les recherches récentes en psychologie et en neuropsychologie montrent que l’impéritie et la néotonie du petit de l’homme l’oblige à être dépendant de ses proches et l’entraine à essayer de « faire preuve de psychologie » en mobilisant tous les moyens de communications qu’il a à sa disposition et susceptibles de générer chez ses proches empathie, sympathie, compréhension, solidarité. Le bébé agit également à la manière d’un astronome, sa croissance motrice étant lente il mobilise ses différents sens, dont la vue, pour analyser et tenter de découvrir et comprendre son environnement. Il est également philosophe. Comme le signale A. Gopnik en tant que bébés nous sommes déjà des constructeurs de monde, l’imaginaire et les tentatives de compréhension de notre environnement ouvrent à la création d’une large palette d’interprétation de sens qui vont nous permettre de nombreux possibles en termes d’idées, représentations, actions, réflexions, et aménagement de notre espace mental. Ce que nous commençons à mieux découvrir actuellement c’est toute la richesse, la variété et la complémentarité (qui parfois se présente comme une rivalité de choix) de nos différents fonctionnements cognitifs et émotionnels. Nous sommes donc équipés d’un vaste matériel adaptatif qui nous permet de traiter les situations rencontrées de différentes manières. Parfois, et quand cela est nécessaire, de manière « simplexe » en traitant la complexité à partir d’une nouvelle façon de poser le problème qui tient compte de l’expérience passée et en anticipant l’avenir, et avec « vicariance, le remplacement d’un processus par un autre qui conduit au même but, est un outil fondamental des organismes vivants », et également en utilisant ce formidable outil cognitif qu’est l’analogie et qui nous permet de capitaliser nos expériences, de développer la catégorisation et d’utiliser nos différentes mémoires.
Nous ne pouvons pas survivre, vivre et nous développer si nous ne bénéficions pas de la solidarité intergénérationnelle. De nombreux philosophes, parmi eux, Hegel et Kant ont insistés sur le fait que nous sommes des produits culturels, les fruits de notre éducation. P. Carré(2009), « On apprend toujours seul, mais jamais sans les autres ! » résume bien ce lien de dépendance entre ce qui revient à soi et aux autres. Nous sommes donc interdépendants cognitivement. A la suite de M. Mauss nous pouvons affirmer que nous sommes des sujets de dettes et de dons. Nous sommes donc interdépendants socialement. De même de nombreux travaux ont montré l’importance des gestes, paroles et actions bienveillantes pour un développement harmonieux de l’enfant. Par exemple B. Cyrulnik signale les effets négatifs de la privation de communication adultes / enfants dans les orphelinats roumains. Nous sommes donc interdépendants affectivement.
Enfin, les recherches en neurosciences associées à la psychologie cognitive nous aident à mieux comprendre comment agissent les processus de solidarité. Deux grands systèmes de fonctionnement interagissent chez l’humain : un système conscient réflexif, lent et un système non conscient rapide. Ces deux systèmes analysent les situations, prennent des décisions et mettent en œuvre des comportements. Etre solidaire et faire preuve de solidarité s’inscrit dans les deux systèmes, notamment par le développement de l’aptitude d’empathie.
Nous venons de voir que le souci de l’autre, le partage, le soin, l’apprendre et le faire ensemble, participent à l’évolution de l’homme et habitent, en quelque sorte, les différents registres du fonctionnement humain. Il n’en demeure pas moins que nombre de nos formes sociétales, attitudes et comportements individuels et collectifs ne reflètent pas ce qu’il est communément entendu par solidarité. La complexité de l’humain et de ses organisations fait que, parfois, le repli sur soi et l’intérêt personnel prennent le pas sur le comportement de solidarité. A notre niveau d’intervention, il nous semble que nous pouvons agir sur cette problématique en créant un lieu de rencontre et de partage, un tiers lieu qui organise les conditions propices à l’agir et le faire ensemble générateur du plaisir à être, faire et réfléchir en commun. Cela devrait nous permettre d’observer, expérimenter les processus en jeu et les conditions nécessaires à l’émergence de la solidarité.

2. Rôle et la place des technosciences dans le partage et l’entraide :

- Nous avons évoqué précédemment l’importance de la solidarité/coopération dans le cadre de notre développement phylogénétique et ontogénétique. Cette solidarité collective a pu se développer grâce à l’évolution et au partage des idées, connaissances, et savoir-faire. L’expression de la solidarité s’est étendue dès que l’homme a réussi à s’affranchir de la tutelle des Dieux et des différentes croyances qui l’ont empêché de penser par lui-même, la nature, sa place et la réalité du monde. L’autorisation à la réflexion personnelle, puis l’organisation des échanges interpersonnels, suivie par l’écriture et sa propagation grâce à l’imprimerie, enfin, l’invention du numérique et sa diffusion sur internet permettent le partage d’une grande partie des productions humaines.
- Le XXI ième siècle, ère du numérique et d’internet, se caractérise par un décuplement des moyens de transmission, captation de l’attention, action sur le cerveau et les comportements. Il nous semble important de rappeler que, comme pour toute innovation technique, le numérique et internet peuvent être des facteurs de progrès dans le bien vivre ensemble mais aussi devenir des facteurs d’aliénation. B. Stiegler utilise le terme de « pharmacom » pour désigner le fait que selon l’usage nous pouvons avoir à faire soit à un remède soit à un poison. Beaucoup de choses ont été dites mais le débat entre technophile et technophobe reste toujours utile à reprendre. Cependant nous ne pouvons pas aborder, dans le cadre de cet article, l’ensemble des questions que ce débat soulève. Nous nous limiterons à encourager le lecteur à entreprendre une démarche de sérendipité qui pourrait le mener par exemple à N. Carr (2011) Internet rend-il bête ?, puis M. Serres ( 2011) Petite poucette, en passant par S. Enlart et O. Charbonnier (2010) Faut-il encore apprendre ?  …
- Nous nous contenterons ici de postuler que, sous certaines conditions, le numérique et internet peuvent, déclencher, mettre en réseau et en organisation tout un ensemble de solidarités touchant le plus grand nombre. De nombreux exemples nous montrent que cela est possible. La création de notre social lab. vise, notamment, à déterminer les conditions qui optimisent cela et qui à terme pourrait nous permettre de conceptualiser et formaliser la structure et la dynamique une démarche collaborative solidaire.

3. L’apprentissage à la solidarité : l’expérimentation d’un social lab. :

Est-ce que la solidarité s’apprend ? Et si oui… Comment ?
Notre conception de l’intervention sociale et de la formation des travailleurs sociaux associée à notre expérience et nos engagements nous incitent à répondre affirmativement à cette interrogation. De la même manière qu’il est impossible de ne pas communiquer, il est impossible de ne pas apprendre. A partir de ce postulat cela nous amène à regrouper nos idées et travaux afin de poursuivre nos réflexions pour agir sur le vivre ensemble, réduire les inégalités, organiser de l’intelligence et du plaisir d’être ensemble, en nous appuyant à la fois sur les recherches scientifiques, humaines, sociales et technologiques et les savoirs et actions de la société civile. Notre deuxième postulat repose sur l’idée que la solidarité s’apprend dans le vivre ensemble et l’interaction expérientielle interindividuelle des différents registres de fonctionnement humain. Ici, il sera donc question d’illustrer nos postulats de base à partir de la démarche que nous développons ensemble IRTS Paca et Corse et Urban Prod, au travers, notamment, d’une expérimentation d’un Socialab commun. Ce dispositif est issu du MarsMedialab, espace de pratiques numériques ouvert par Urban Prod, qui associe plus de quarante professionnels des champs du social, de la culture et des usages du numérique, plus de dix nationalités et treize langues parlées. Le lieu porte en son sein un atelier chantier d’insertion ; dispositif favorisant la remobilisation de publics particulièrement éloignés de l’emploi, par un accompagnement socio-professionnel renforcé et une production numérique partagée. Quatre enjeux sont particulièrement travaillés au MarsMedialab : (1) l’horizontalité dans le modèle de coopération entre salariés, usagers, bénévoles et volontaires, inspirée de la sociocratie et du mouvement des entreprises libérées ; (2) la pluridisciplinarité de son équipe, accordant une place particulière à l’usager ; (3) la convivialité mise en travail dans les différents espaces de travail (production, prototypage, formation et conciergerie partagée) ; (4) l’interculturalité favorisée par la dimension européenne du lieu.
La création d’un « Social Lab » se fonde, selon nous, sur l’hypothèse selon laquelle les réseaux sociaux ainsi que les échanges numériques constitueraient des espaces sociaux à part entière.
On dit d’une Société, du latin societas “association”, qu’elle s’étaye sur les relations qui s’établissent entre des personnes qui ont ou qui mettent « quelque chose » en commun. De manière étendue ou restreinte la société se définit donc à partir de ce qui “ implique ” l’ensemble des personnes qui sont mises en relation. De ce point de vue les réseaux sociaux font société car en qualité de réseaux dit sociaux, du latin socialis “sociable” relatif aux alliés, de socius “compagnon”, ces échanges épistolaires constituent une des modalités selon lesquelles des liens peuvent s’établir entre les individus en société sous une forme dématérialisée certes mais où se nouent symbolique, imaginaire et réel à la façon d’un nœud borroméens dans le « clic » qui valide le message.
L’espace social ainsi dématérialisé par sa composante numérique n’en reste pas moins vecteur de socialité par le langage qui le structure.
Par ailleurs, leur dimension horizontale en fait des espaces d’innovation sur le plan de la communication dans les organisations tant sociales qu’entrepreneuriales. Structurés en réseaux dits « sociaux », ils sont, de notre point de vue, parfaitement éligibles au travail social en tant qu’objet scientifique compte-tenu de leur capacité à influencer l’opinion publique mais aussi d’excellents leviers d’essaimage, d’innovation, de recherche et d’espaces de travail partagés.
Voilà pourquoi, nous avons souhaité créer un espace social dématérialisé reposant sur un processus de travail collaboratif vecteur d’innovation sociale par l’émergence, la valorisation et l’expérimentation des idées nouvelles tant du point de vue de l’organisation des espaces sociaux que des actions sociales citoyennes et/ou institutionnelles.
La dématérialisation de cet espace social lui conférant des caractéristiques spécifiques, un travail d’étude, d’expérimentation, de conception et de modélisation portant sur l’animation et la structuration de cet espace par les parties prenantes lui a été associé.
Le « Socialab » constitue en lui-même un objet et un espace de recherche appliquée pour l’IRTS PACA et Corse.
La fonction sociale du « Socialab » est de permettre de créer des liens locaux, nationaux et internationaux entre :
- les étudiants de l’IRTS PACA et Corse ainsi que tous les étudiants qui se forment dans le domaine du travail social au local, au national et à l’étranger,
- les apprentis de l’IRTS PACA et Corse et tous les apprentis qui se forment dans le domaine du travail social au local, au national et à l’étranger,
- les étudiants et apprentis eux-mêmes et ce quel que soit leur niveau de formation ou objet de formation,
- les étudiants et doctorants au local, au national et à l’international dont les travaux mobilisent la question sociale ou l’organisation des dispositifs d’intervention de l’Action Sociale et /ou de l’ Economie Sociale et Solidaire ou l’organisation du travail au sein de ces structures ou services,
- les personnes concernées et/ou impliquées dans le cadre dans l’une ou l’autre des dispositions de prise en charge contributive ou non contributive dans les domaines du social, du médico-social ou de la santé mentale notamment,
- les institutions publiques territoriales ou d’Etat compétentes dans le domaine de l’Action Sociale,
- les structures d’Action Sociale associatives,
- les acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire,
- les cadres pédagogiques en Travail Social,
- les enseignants chercheurs dont les travaux mobilisent la question sociale ou l’organisation des dispositifs d’intervention de l’Action Sociale et /ou de l’ Economie Sociale et Solidaire,
- les entreprises impliquées par une démarche de Responsabilité Sociale des Entreprises.

La gouvernance du projet prend ses références dans les modèles d'organisation et les cadres méthodologiques des entreprises AGILES pour mettre en place et coordonner un environnement favorisant l'innovation en pilotant des acteurs hétérogènes. Deux cadres méthodologiques et organisationnels sont convoqués : les méthodes de projet AGILE itératives, incrémentales et adaptatives, et les méthodes d'organisation de dispositifs collectifs par cercle du type « sociocratie ».

Il est essentiel de privilégier une organisation centrée sur l'innovation à court terme et de travailler son intégration au sein des instances et structures sur le moyen terme de l'expérimentation. Ainsi, l'organisation doit privilégier des circuit court de décision pour les équipes opérationnelles qui travaillent sur les productions sur des budgets, partenariats, formes et contenus des productions entre développeurs, formateurs et coordinateurs du Socialab. Dans des cadres administratif et conventionnels qui sont élaborés et fournis par les équipes des structures d'accueil de l'expérimentation, et des cadres stratégiques pilotés par les partenaires scientifiques et entrepreneuriaux (structures sociales). Cette organisation doit libérer du « pouvoir d'agir » à chaque niveau et poser des cadres rassurant entre les niveaux : expression de besoins descendants, éléments de pilotage remontant.

Cette gouvernance repose sur trois « cercles » de décisions liés aux trois métiers de ce projet : l'animation d'un écosystème partenarial, la mise en place d'un dispositif de production, le développement d'une dynamique de diffusion : le premier, collégial, est d’orientation stratégique, les deux autres sont plutôt d’ordre opérationnel.

Résumé en Anglais


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