Fiche Documentaire n° 5117

Titre Solidarités aujourd’hui. Entre obligation morale et principe politique : quelles reconfigurations ?

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Auteur(s) BLAIS Marie-Claude  
     
Thème Conférence plénière Montréal  
Type Autre (poster, ...)  

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Résumé

Solidarités aujourd’hui. Entre obligation morale et principe politique : quelles reconfigurations ?

Une grande part de l’histoire de l’idée de solidarité est inscrite en filigrane dans quelques lignes écrites par George Sand en 1847 : « la source la plus vivante et la plus religieuse du progrès de l'esprit humain, c'est, pour parler la langue de mon temps, la notion de solidarité ». L’auteure ajoute: « Qu'un ami, un frère, vienne nous avouer les tourments et les perplexités de sa situation, nous n'avons pas de meilleur argument pour le fortifier et le convaincre, que des arguments tirés de notre propre expérience, tant nous sentons que la vie d'un ami c'est la nôtre, comme la vie de chacun est celle de tous. "J'ai souffert les mêmes maux, j'ai traversé les mêmes écueils, et j'en suis sorti ; donc tu peux guérir et vaincre." Voilà ce que l'ami dit à l'ami, ce que l'homme enseigne à l'homme. »
Sympathie pour tout autre, obligation morale créée par la participation à une commune humanité, tel fut en France le sens du mot solidarité, quand il vint se substituer à la charité chrétienne ou à la fraternité révolutionnaire. Aujourd’hui, la solidarité a acquis, dans la plupart des pays, le statut d'un principe politique : elle inspire des actions publiques et des lois, ainsi que les traités internationaux.
La notion est généralement invoquée comme allant de soi, mais il n’est pas sûr que nous nous entendions sur sa signification. Plus notre monde devient libéral, plus il valorise l’individu, plus il semble avoir besoin de la solidarité publique aussi bien que des solidarités émanant de la société civile. Il existe bien des solidarités, multiples, comme l’indique le titre de ce congrès. Leur point commun est la préoccupation du maintien du lien de société. Elles visent l’entraide et la coopération, et surtout l’inclusion de tous dans le collectif. Mais toutes se heurtent à des dilemmes qu’il est nécessaire de regarder en face : la solidarité peut-elle être obligatoire ou doit-elle reposer sur le consentement des personnes ? Sachant que les risques de repli corporatiste ou communautaire sont réels, quel peut être son territoire d’application ? Les actions de solidarité ne servent-elles qu’à colmater les brèches d’une société ultra-libérale, ou bien visent-elles à montrer qu’un autre monde est possible ? Si nous voulons préserver la richesse de cette idée, nous devons sans cesse travailler à clarifier ses déclinaisons pratiques.
Je citerai trois situations. 1) En 2008, la faillite des banques systémiques a entrainé une telle crise mondiale que tous les pays se sont vus ébranlés par leurs pratiques frauduleuses : les économies sont « solidaires », à leurs dépens. Solidarité factuelle, solidarité dans le mal, aurait dit Renouvier. 2) Ces temps derniers, la guerre et la famine ont provoqué des déplacements massifs de réfugiés à l’intérieur de l’Europe. Les pays les plus touchés ont fait appel à cette « solidarité » contractuelle qui relie les membres de la Communauté : solidarité entre ceux qui se perçoivent comme des créanciers (du fait des charges particulières qui pèsent sur eux en raison de leur situation géographique) et ceux qui devraient se concevoir comme des débiteurs (par leur richesse relative et leur « risque » moindre). Ils sont en effet solidairement redevables d’une même obligation conventionnelle : celle du droit d’asile. 3) Évoquons enfin le changement climatique qui exige une réponse collective à une question de survie de l’humanité, et peut-être une interrogation sur l’impératif du « toujours plus ».
Trois exemples. Au moins cinq types de solidarité : solidarité de fait, solidarité contractuelle, obligation morale, solidarité intergénérationnelle, solidarité avec la nature. Je fais le pari que le détour par la genèse de cette belle idée, la connaissance de son histoire et des appropriations parfois contradictoires qu’elle a pu susciter, nous aideront à nous repérer dans ces significations multiples.

Bibliographie

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https://www.amazon.fr/Robert-Castel/e/B004N6G7SQ/ref=sr_ntt_srch_lnk_3?qid=1492505718&sr=1-3CASTEL Robert et DUVOUX Nicolas, L'avenir de la solidarité, PUF, 2013
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GIDE Charles, La solidarité, Paris, PUF, 1934.
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Présentation des auteurs

Marie-Claude Blais est professeure de philosophie (Université de Rouen)., Elle a notamment publié Au principe de la République (Gallimard 2000), La Solidarité. Histoire d'une idée (Gallimard 2007), L’éducation est-elle possible sans le concours de la famille, Yakap.Be, 2008, ainsi que, en collaboration avec Marcel Gauchet et Dominique Ottavi, Pour une philosophie politique de l'éducation (Bayard 2002), Conditions de l’éducation (Stock 2008), et Transmettre, Apprendre (Stock 2014).

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