Fiche Documentaire n° 5348

Titre Initiation à l’entrepreneuriat social en contexte pluriculturel - outil de mieux-vivre ensemble ?

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Auteur(s) DEFLORENNE Fabien  
     
Thème  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

Initiation à l’entrepreneuriat social en contexte pluriculturel - outil de mieux-vivre ensemble ?

La tolérance, la solidarité, l’entraide, le partage, la bienveillance, l’empathie, l’attitude éthique sont des valeurs humaines qui participent aux mieux vivre ensemble en société, d’autant plus dans nos sociétés plurielles. Idéalement initiées dès le plus jeune âge, elles doivent parfois être retravaillées et renforcées dans les lieux d’apprentissages comme les écoles, Hautes Écoles (H.E.), Universités, clubs de sport…

La H.E. de Bruxelles-Brabant, Unité Structurelle Defré, Catégorie Pédagogique, Section éducateurs spécialisés en accompagnement psychoéducatif, enseignement supérieur de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), se situe dans une des 19 communes de Bruxelles, capitale de la Belgique, carrefour de l’Europe, ville plurielle et multiculturelle. Nos groupes d’apprenants sont des microcosmes de la population bruxelloise. Au sein de la section une activité d’apprentissage (AA) intitulée « Organisation et Gestion des Institutions et des services » peut illustrer ce mieux vivre dans cette pluralité.

Comme point de départ de notre réflexion : rendre les apprenants acteurs de leur formation en combinant leurs aspirations, les compétences attendues du métier inscrites dans le socle de compétences de la FWB, les attendus de l’AA, le potentiel de la matière et sa perspective professionnelle.
Notre dispositif d’apprentissage professionnalisant (DAP) s’inspire de la pédagogie de projet (Bru et Not, 1987) réalisé en équipe, de façon coopérative pour donner un sens et une finalité aux apprentissages tout en rassemblant les apprenants autour d’un projet professionnalisant. Il implique également une pédagogie différenciée (Przesmycki, 2004). Tout apprenant étant unique, il nous faut l’accompagner de manière « personnalisée » et mettre en œuvre avec lui une démarche de remédiation. Cela nous a permis de nous définir comme accompagnateur et/ou un consultant.
Naturellement tourné vers l’humain, l’éducateur est, selon la loi belge du 20/04/1996, « (…) la personne qui favorise par la mise en œuvre de méthodes et de techniques spécifiques, le développement personnel, la maturation sociale et l’autonomie (…)». Nous avons donc construit une pédagogie d’initiation à l’entrepreneuriat social — « (…) forme particulière de participation par l’action qui se situe au niveau des entreprises sociales et des entrepreneurs sociaux agissant au quotidien pour transformer le paysage de la société. » (Nicholls, 2006). Favorisant la réflexion entourant l’acte d’entreprendre en considérant le profit comme moyen au service de l’intérêt général, nous leur demandons à partir d’une problématique ou d’un constat posé dans le cadre d’un de leurs stages de pratique professionnelle, d’imaginer des pistes de solutions réalistes et une structure associative les supportant.
Pour ce faire, ils ont une trentaine d’heures en présentiel, un accès à de la théorie, à des canevas et à des méthodes sur un Drive, travaillent en groupe de maximum quatre individus par cohérence de projet - facilitant la mixité et l’hétérogénéité et doivent se concerter et arriver à une entente au point de vue des idées comme de l’organisation.
De celui qui doit maitriser la langue des signes parce que son collègue est malentendant, à l’autre qui utilise la visioconférence parce qu’il ne peut être présent, aux tensions à gérer suite à une mauvaise interprétation interculturelle du non-verbal (regard, ton, volume de la voix…), des stratégies de groupe se construisent. Les résultats montrent une préoccupation de vie en société plurielle : école de devoirs, bus itinérants offrant des soins esthétiques pour des femmes sous traitements lourds, accompagnement sexuel pour personnes atteintes de handicaps, ateliers artistiques comme moyens d’expressions et d’inclusions de personnes réfugiées…
Cette communication vise à rendre compte de pratiques mises en place et de résultats obtenus autour de ce DAP dont certains défis s’inscrivent bien ici dans cette thématique des sociétés plurielles et du vivre ensemble.

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Mots clés : entrepreneuriat social, projet, différenciation, stratégie, concertation, entente

Bibliographie


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Présentation des auteurs


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Communication complète

La Belgique compte 11 millions d’habitants : 80% sont belges, 20% étrangers – Italiens (13%), Français (13%), Néerlandais (12%), Marocains (7%), Polonais (5%), Espagnols (5%), Roumains (5%), Turcs (3,4%), Allemands (3%), Portugais (3%), Britanniques (2%), Congolais (2%).

La H.E. de Bruxelles-Brabant (HE2B), Unité Structurelle Defré, Catégorie Pédagogique, Section éducateurs spécialisés en accompagnement psychoéducatif, enseignement supérieur de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), se situe dans une des 19 communes de Bruxelles, capitale au carrefour de l’Europe, ville plurielle et multiculturelle. Sur ses 1.200.000 habitants, près de la moitié sont d’origine étrangère. Nos groupes d’apprenants sont représentatifs de cette population.

Jusqu’en 2014, nous travaillions pour notre société de Graphisme et Communication, à la conception d’identité d’entreprise et la gestion de projet (édition de livres d’art, événementiel, expositions culturelles) et, suite à la crise bancaire de 20018, comme communication manager d’un call center, manager de crise d’une carrière d’extraction de pierre naturelle, consultant en communication et développement pour un bureau d’architectes, intervieweur et concepteur de biographies pour le théâtre, collaborateur multifonctions pour des inventaires artistiques et formateur en informatique pour un public de tout âge. En 2014, nous décidons de liquider notre société et de chercher un emploi. En 2015, nous sommes engagés à la HE2B pour des activités d’apprentissage (AA) de bureautique, de TIC, d’initiation aux médias et à la recherche et d’Organisation et Gestion des Institutions et des Services, AA qui nous sert de sujet pour le présent article.

La 1re année, nous adoptons une posture d’observateur. Très vite, nous subissons l’AA car un ensemble de problèmes nous interpellent : un manque de liens avec la vie professionnelle et de sens global, une forte remise en cause de l’alignement pédagogique. Nous étions en accord avec les objectifs et le dispositif sur le papier (cours magistraux, questions-réponses, mises en situation) mais pas avec sa réalité, ni avec la manière de l’évaluer. Les apprenants présentaient un taux d’absentéisme et d’échec alarmants et, pour les participants, un manque d’implication, de cohésion, de solidarité. Nous leur en avons demandé les raisons : ils ne se connaissaient plus, ne comprenaient pas l’objectif ni le sens de l’AA et partaient du principe que, si l’évaluation se faisait à livre ouvert, ils ne devaient ni participer ni étudier.

Nous nous sommes posé la question de savoir quel était le rôle de l’éducateur spécialisé en accompagnement psychoéducatif. Selon la loi belge du 20/04/1996, il est « (…) la personne qui favorise par la mise en œuvre de méthodes et de techniques spécifiques, le développement personnel, la maturation sociale et l’autonomie (…) ». Les apprenants de dernière année devraient donc être naturellement tournés vers l’humain et le social.

Nous sommes reparti d’une page blanche avec, pour fil conducteur, l’idée de rendre les apprenants acteurs de leur formation en combinant leurs aspirations, les attendus du métier inscrits dans le socle de compétences de la FWB, ceux de l’AA, le potentiel de la matière et sa perspective professionnelle.

Nous nous sommes servi de notre parcours antérieur et de la nécessité de doter les apprenants de compétences nécessaires au mieux-vivre ensemble et à l’insertion optimale en milieu de travail, telles que : tolérance, solidarité, entraide, partage, bienveillance, empathie, éthique, flexibilité, travail en équipe, gestion de groupe, médiation, adaptation, développement personnel dans un projet commun, gestion des relations interpersonnelles et des diversités culturelles et résolution de problèmes. La devise de la Belgique n’est-elle pas l’Union fait la force ? Nous nous sommes également tourné vers les théories pédagogiques telles que le tétraèdre des TICS (Lombard, 2003), la pédagogie de projet (Bru et Not, 1987) et la pédagogie différenciée (Przesmycki, 2004). Donc, tout apprenant étant unique, il nous faut l’accompagner de manière « personnalisée » et mettre en œuvre avec lui un dispositif d’apprentissage adéquat et une démarche de remédiation, tout en lui permettant de développer et d’exploiter ses propres outils. Tout en leur donnant accès à une panoplie de démarches potentielles, nous nous sommes défini comme accompagnateur et/ou consultant.

Nous nous sommes adjoint des compétences de la formation obligatoire pour enseigner dans le supérieur (CAPAES) qui s’accordent avec le potentiel de la matière : construire avec les apprenants un contexte relationnel propice à l’apprentissage, les accompagner dans leurs apprentissages tant théoriques que pratiques ainsi que dans la construction de leur projet professionnel et ancrer les contenus et les démarches dans la réalité professionnelle visée par la formation.

C’est en fonction de ces facteurs que nous avons imaginé un dispositif d’apprentissage professionnalisant (DAP) basé sur l’initiation à l’entrepreneuriat social, comprenant celui-ci comme une « (…) forme particulière de participation par l’action qui se situe au niveau des entreprises sociales et des entrepreneurs sociaux agissant au quotidien pour transformer le paysage de la société. » (Nicholls, 2006). Nous favorisons la réflexion entourant l’acte d’entreprendre en considérant le profit comme moyen au service de l’intérêt général.

Au cours de leur formation, les apprenants sont confrontés à tout type de public lors de stages, que ce soit dans le secteur de l’aide à la jeunesse, aux personnes handicapées, aux adultes en difficulté ou aux personnes âgées, ce qui nous permet de les mettre en situation. Nous leur demandons, à partir d’une problématique ou d’un constat posé dans le cadre d’un stage, d’imaginer des pistes de solutions réalistes et une structure associative sans but lucratif les supportant.

Nous utilisons le principe de la classe inversée où l’apprenant se familiarise avec la matière de lui-même, que nous avons adapté, car nous leur demandons de le faire en classe.

Ils disposent d’une trentaine d’heures en présentiel et d’un accès à de la théorie, des canevas et méthodes sur un Drive. La 1re séance est une des plus importantes : elle permet d’établir les relations qu’ils auront entre eux et avec l’enseignant, en définissant les droits et devoirs de chacun. Nous insistons sur l’importance des consignes et la nécessité de leur compréhension. Ces consignes évoluent au fil des ans en vue d’améliorer certains points, souvent suite aux demandes ou remarques des apprenants. Elles reprennent les attendus du cours, la présentation du dispositif, les modalités d’évaluation (20% pour la participation aux séances, 40% pour la remise d’un dossier PDF et 40% pour la défense dudit dossier avec des notions qu’ils auront découvertes et approfondies), ainsi qu’un calendrier des séances. Les apprenants doivent s’organiser pour appréhender la matière et mettre en place leur projet, avec notre accompagnement. Nous proposons une relecture de leur dossier dès qu’ils en émettent la demande.

À la moitié des séances, chaque groupe présente devant ses pairs un état d’avancement et les difficultés auxquelles il est confronté : cet échange de points de vue ouvre le champ des possibles. Cette séance, demandée par les apprenants, permet de dénouer des situations de blocage. À la fin des séances, nous leur proposons le même exercice, à partir du projet « finalisé », tout en les préparant pour la défense orale.

Depuis la mise en place de ce DAP, nous avons apporté des solutions aux problèmes relevés la 1re année.

Les projets sont tous issus d’une problématique rencontrée en stage et montrent une préoccupation de vie en société plurielle. Pour en citer quelques-uns : le décloisonnement générationnel par des groupes de paroles intergénérationnels, par le principe du tutorat, où chaque partie peut devenir tuteur de l’autre en fonction de ses compétences ; l’inclusion des étrangers par l’apprentissage de la langue, des us et coutumes, des droits et devoirs tout en valorisant l’ouverture à l’autre par l’expression artistique ou la participation à la vie locale. D’autres sont liés à la personne handicapée, école de devoirs mêlant malentendants et entendants, activités sportives communes…

Parce que le projet est lié à leur pratique en stage, les apprenants font beaucoup plus de liens avec leur pratique professionnelle et donnent ainsi du sens à l’apprentissage. Ils comprennent l’importance de la participation et de la présence à chaque séance, car il en va de l’intérêt du groupe. De celui qui apprend à maîtriser la langue des signes parce que son collègue est malentendant, à celui qui utilise la visioconférence car il ne peut être présent, aux tensions à gérer suite à une mauvaise interprétation interculturelle du non-verbal (regard, ton, volume de la voix…), des stratégies de groupe se construisent. Les apprenants se rencontrent, apprennent à se connaître, échangent, argumentent, défendent des points de vue, partagent, s’entraident, aussi bien à l’intérieur du groupe que dans la classe, voire dans les autres groupes classes. Chaque groupe a son objectif commun à atteindre, mais il n’hésite pas à se tourner vers les autres.

En résumé, en imaginant ce dispositif pour nous permettre de remédier aux problèmes que nous avions pu relever, nous en avons sensiblement amélioré l’alignement pédagogique, Objectifs – Méthodes – Évaluations, ce qui était notre but premier. Mais en plus de répondre aux exigences de la formation, nous devons souligner l’implication des apprenants dans l’établissement du cadre par une réelle prise de conscience de son importance, car bien que nous leur en proposions un, ils n’hésitent pas à le compléter par des éléments qu’ils considèrent indispensables. Ce qui montre qu’en tant qu’enseignant, il est possible d’imaginer un dispositif d’apprentissage professionnalisant travaillant le mieux-vivre ensemble.

Résumé en Anglais

Tolerance, solidarity, mutual aid, sharing, benevolence, empathy, ethical attitude are human values that contribute to the better living together in society, especially in our plural societies. Ideally initiated from an early age, they must sometimes be reworked and reinforced in places of learning such as schools, Hautes Écoles (H.E.), Universities, sports clubs ...
Brussels-Brabant HE, Defré Structural Unit, Pedagogical category, Section of specialized educators in psychoeducational support, higher education of the Wallonia-Brussels Federation (FWB), is located in one of the 19 communes of Brussels, the capital of Belgium, crossroads of Europe, a plural and multicultural city. Our groups of learners are microcosms of the Brussels population. Within the section a learning activity (LA) entitled "Organization and Management of Institutions and Services" one may illustrate this better living together in its plurality.
As a starting point for our reflection: enable the involvement of the students in their training by combining their aspirations, the expected professional skills required by the FWB, the LA own specific expectations together with the potential of the subject studied and its professional perspective.
Our professional learning system (PLS) is inspired by the project pedagogy (Bru and Not, 1987) realized as a team, in a cooperative way to give meaning and finality to learning while bringing together learners around a practical professional project. It also implies a differentiated pedagogy (Przesmycki, 2004). Since all learners are unique, we must accompany them in a "personalized" way and implement a remedial approach together with them. This allowed us to define ourselves as an accompanist and / or a consultant.
Naturally turned towards the human, the educator is, according to the Belgian law of 20/04/1996, "(...) the person who favors by the implementation of methods and specific techniques, the personal development, the social maturation and autonomy (...) ". We have therefore built a pedagogy of initiation to social entrepreneurship - "(...) a particular form of participation through action that is at the level of social enterprises and social entrepreneurs acting on a daily basis to transform the landscape of society. (Nicholls, 2006). Promoting reflection on the act of doing business by considering profit as a means of serving the public interest, we ask them to start from a problematic or a statement based on their own professional training experience while imagining realistic solutions and defining an associative structure supporting them.
To achieve this, they have thirty hours in the classroom, with access to theory, canvases and methods on a hard Drive, working in groups of up to four individuals per project for coherence purpose - hence facilitating the mix and the heterogeneity of the groups, having to work together and eventually coming to an agreement from the point of view of both ideas and organization.
From the one who has to master the sign language because his colleague is hard of hearing, to the other who uses videoconferencing because he cannot be present, to the tensions to be managed following a bad intercultural interpretation of the non-verbal (look, tone, volume of the voice ...), group strategies are built. The results show a concern for life in a plural society: homework school, travelling buses offering beauty treatments for women on heavy medical treatments, sexual accompaniment for people with disabilities, artistic workshops as means of expression and inclusion of refugees ...
This communication aims to report on practices implemented and results obtained around this PLS, some of whose challenges fit well in this theme of plural societies and living together.

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Key words: social entrepreneurship, project, differentiation, strategy, consultation, agreement