A partir d’une thèse en pédagogie, qui vise à analyser l’état des lieux de l’inclusion dans les écoles publiques libanaises, et plus spécifiquement à explorer la pratique des enseignants dans ces écoles, nous avons constaté une tolérance envers la différence de la part des élèves à développement typique, et un besoin urgent de la présence d’intervenants sociaux dans ces milieux scolaires pour promouvoir le projet d’inclusion et pour intervenir auprès des élèves et leurs familles, afin de faciliter l’épanouissement scolaire.
L’école joue un rôle très important dans les acquisitions des élèves, que ce soit au niveau des savoirs, compétences, représentations, rôles et valeurs (Mosconi, 2004). Cette idée, soutient la nôtre, donc l’importance du rôle des intervenants sociaux pour promouvoir cette inclusion.
Plusieurs auteurs se sont intéressés au champ d’intervention du service social scolaire. Labrèche (1987) précise que l’intervenant social scolaire intervient dans plusieurs problématiques influençant l’épanouissement scolaire des élèves (Matta, 2008).
Toutefois plusieurs efforts sont consacrés afin de délimiter son rôle dans un milieu scolaire, afin de minimiser les risques d’empiètement avec d’autres disciplines (Matta, 2008). Nous nous intéressons dans ce travail à décrire l’état des lieux des écoles publiques inclusives, où le besoin d’intervention est urgent.
En effet la loi 220/2000 au Liban, donne à tous les enfants le droit d’accès à l’éducation de base, elle devrait donc garantir des opportunités adéquates pour l’éducation et l’apprentissage de tous. Ceci consolide le besoin d’intervenants sociaux dans les écoles inclusives, qui par leur approche écologique, promeuvent un environnement scolaire plus inclusif.
Notre question de recherche est: Quel est l’état des lieux de la pratique pédagogique des enseignants dans les écoles publiques libanaises inclusives des enfants déficients ? (puisque cette communication est extraite d’une thèse en pédagogie).
Notre première méthode de collecte des données est l’observation non participante, selon une grille qui a été élaborée à partir de la recherche bibliographique sur les normes de la pratique d’inclusion, ou le cadre conceptuel de cette pratique.
Notre deuxième méthode de collecte de données était le recours à des notes du terrain, puisque la grille d’observation nous a semblé insuffisante pour la collecte de toutes les données potentiellement pertinentes pour notre recherche. Ces notes du terrain nous permettront de faire une description des lieux et des faits en présence des participants.
Étant donné que nous sommes aussi assistantes sociales, nous avons relevé aussi à partir des observations les conditions sociales difficiles dans lesquelles vit une majorité des élèves des classes observées. Ces observations concernant l’aspect social, ont été transcrites sur les notes de terrain, analysées sur le programme ATLAS.ti, et ont été utilisées afin de compléter les données recherchées.
L’échantillonnage a été fait par choix raisonné pour répondre à l’objectif général, puisqu’il est composé des enseignants dans les écoles publiques libanaises inclusives. Au total, il s’agit de six écoles selon le guide des écoles inclusives au Liban élaboré par le Centre de Recherche et de Développement Pédagogique au Liban.
Les résultats ont confirmé que les parents d’élèves à déficience mentale ne sont pas impliqués dans le projet scolaire de leurs enfants. En effet les parents sont en majorité presque inactifs et absents du suivi éducatif de de leurs enfants dans les écoles inclusives publiques, tout comme ils le sont dans la collaboration avec le personnel de l’école. Par conséquent, il est vital de souligner le besoin urgent de campagnes de sensibilisation des parents d’élèves dans les écoles publiques, surtout que ce problème risque de provoquer un retard mental acquis chez les élèves. Comme constat encore plus inquiétant et qui va dans le même sens de nos observations, certains directeurs et enseignants nous ont aussi confié que les parents considèrent l’école comme une garderie pour leurs enfants.
Les problèmes sociaux des élèves entravent leur épanouissement social et scolaire. En fait, la quasi-totalité des élèves d'écoles publiques vit dans des conditions sociales très critiques. Certains vivent dans des orphelinats, d’autres vivent avec un beau parent qui les maltraite, et certains quittent l’école le soir pour aller travailler avec leur père. Les résultats ont montré que ces problèmes influencent le comportement des élèves en classe, ainsi que les résultats scolaires sont influencés par le manque de suivi à domicile ou à l’orphelinat.
L’inclusion scolaire permet aux élèves ayant une déficience mentale, de s’ouvrir aux autres élèves à développement typique, dans un milieu ordinaire qu’est l’école, d’avoir plus d’estime et de confiance en soi, de se considérer comme les autres élèves de leur âge qui vont à l’école et qui apprennent. Les résultats de notre recherche ont confirmé que cette inclusion s’avère aussi bénéfique pour les élèves au développement typique, elle leur permet d’avoir plus de tolérance envers la différence, de développer l’esprit d’entraide et de solidarité, et d’incorporer des valeurs sociales et humaines, ainsi de bénéficier des adaptations pédagogiques faites en classe, en cas des difficultés.
De même les résultats obtenus, confirment le besoin urgent de l’intervention sociale au sein des écoles publiques libanaises, afin de faciliter l’épanouissement scolaire de tous les élèves.
Les travailleurs sociaux sont selon plusieurs auteurs, les mieux placés, pour intervenir pour le développement des différents systèmes fréquentés par l’élève, et pour mobiliser l’élève et sa famille à bénéficier des ressources de la communauté. (Lalande, 1992 ; Matta, 2008).
Donc selon le besoin, l’intervenant social scolaire a recours aux trois modèles d’intervention, individuel, que ce soit auprès des élèves, de leurs parents ou des enseignants, familial et auprès de groupes (Matta, 2008).
Dans le cas des écoles publiques observées dans notre étude, nous privilégions le mode d’intervention individuel, pour les besoins des élèves tels que besoins d’adaptations pédagogiques en classe à cause de facteurs personnels comme les difficultés d’apprentissage, ou de facteurs sociaux et familiaux, par exemple un évènement grave influant l’épanouissement scolaire de l’élève.
De même nous accordons une importance particulière pour le mode d’intervention familial quand les problèmes familiaux affectent l’épanouissement scolaire de l’élève, tels que l’absence de suivi à la maison, qui a été codée vingt-trois fois dans les notes de terrain analysées sur ATLAS.ti, et les problèmes familiaux divers codés sept fois dans les notes de terrain, tels que le travail des enfants avec leurs parents les après-midis, les familles monoparentales, les problèmes des familles Syriennes refugiées et les problèmes de maltraitance et de violence.
Le mode d’intervention de groupe et la stimulation d’une aide mutuelle quand les problèmes sont communs, que ce soit un groupe d’élèves, d’enseignants ou de parents.
Lalande ajoute aux trois modes d’intervention déjà cités, l’intervention collective (Lalande, 1992). Ce modèle d’intervention s’impose dans les écoles inclusives pour assurer les conditions les plus favorables possible, pour optimiser l’apprentissage de tous les élèves et promouvoir leur épanouissement (Thomazet, 2008 ; Kahn, 2010), surtout que la première caractéristique d’une école inclusive est le zéro rejet. L’intervention collective vise donc à assurer plusieurs conditions nécessaires dans les écoles inclusives, dont la préparation de l’ensemble de l’établissement scolaire pour l’inclusion, et l’établissement de coordination régionale (Agence Européenne pour le développement et l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers, 2005).
Donc l’intervenant social, par son approche globale, peut jouer un rôle crucial, dans les écoles inclusives publiques au Liban. Il peut surtout favoriser des avancements et des progrès dans la stratégie nationale pour l’éducation et l’enseignement, qui est inspirée des conventions internationales. L’intervenant social joue un rôle avec l’équipe multidisciplinaire, pour aboutir aux différents objectifs de cette stratégie dont:
1. Assurer une égalité des chances pour l’adhésion, le suivi et la réussite. 2. Assurer les soins pour les personnes à besoins spécifiques dans l’éducation de base et l’enseignement technique. 3. Fournir le matériel de soins pour les personnes à besoins particuliers dans l’éducation de base et l’enseignement technique. 4. Élargir la base de réception ou d’accès dans les écoles publiques pour assurer l’égalité des chances et les bonnes conditions d’y accéder pour toutes les catégories de la société. 5. Améliorer les conditions et la qualité de l’enseignement primaire, sans discrimination, en tant que mesure préventive du décrochage scolaire et de la marginalisation. 6. Mettre en place des mécanismes ou méthodes pour prendre soin de toutes sortes de déficience. 7. Mettre en place des mécanismes de remédiations et de soutien pour les différents besoins particuliers. 8. Réhabiliter le personnel enseignant sur la façon d’éduquer et de soutenir les personnes ayant des besoins spéciaux. 9. Assurer des écoles inclusives, les conditions matérielles (bâtiments…) et les moyens adaptés pour tous les enfants à besoins particuliers. 10. Assurer des structures de soutien et de remédiation scolaire pour les différentes personnes à besoins spécifiques. 11. Traiter et prendre en charge les incapacités et les difficultés. 12. Sensibiliser l’ensemble de la société à la culture des droits. 13. Ouvrir l’école sur son environnement, permettant aux parents la participation aux programmes de prévention. (CRDP, 2015).
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