«Aille. Aille. Aille. Y’a du pain sur la planche » : Dialogues étudiants sur les liens entre le travail social et l’environnement dans la formation en travail social au Québec
Jeanne Dagenais-Lespérance
Dans les dernières années, différents enjeux environnementaux ont occupé un espace médiatique important, de feux de forêt à inondations en passant par des joutes politiques autour d’enjeux de développement des énergies fossiles. Or, bien que les liens entre environnement et inégalités sociales fassent de plus en plus partie des discours, les recherches empiriques en travail social en français demeurent rares sur les liens entre l’environnement et le travail social (Centemeri, 2013 ; Dagenais-Lespérance et MacDonald, 2019 ; Ménochet, 2009). Dans de nombreux articles en anglais, la formation en travail social est identifiée comme un point de départ nécessaire pour entamer une réflexion à ce sujet, mais elle les aborde le plus souvent par des sondages ou une analyse documentaire des syllabus de cours (Dominelli, 2013 ; Jones, 2018 ; Powers et al., 2019).
Cette communication vise à contribuer aux savoirs qui seront partagés dans l’axe 1 du congrès, soulignant le potentiel transformateur des espaces de dialogues dans les milieux de formation. Ceux-ci s’avèrent essentiels à la fois pour mieux comprendre des enjeux, mais aussi pour se connecter, collectiviser des questionnements et, ultimement, favoriser des transformations écosociales profondes au sein même des institutions de formation.
D’une part s’articulera donc une réflexion sur l’utilisation de groupes de discussion ancrés dans une méthodologie ethnographique féministe (Anzaldúa, 1999 ; Haraway, 1988 ; Hill Collins, 2004 ; Naples, 2003). Quels types d’analyses émergent lorsqu’on se positionne de cette manière ? La méthodologie féministe et le cadre conceptuel choisis seront développés ici plus en détail afin de voir comment s’est articulé le processus de recherche. Le potentiel de méthodologies transformatrices de recherche (Freire, 2017 ; hooks, 1991, 1994), à la fois pour les personnes participantes et pour la chercheuse ou le chercheur, sera alors abordé.
D’autre part, cette communication conclura en partageant les résultats de l’analyse des données recueillies lors de groupes de discussion. Plus précisément, cette recherche, constituant le projet de mémoire de maîtrise de l’autrice, a cherché à mieux comprendre les points de vue d’étudiantes et étudiants sur les liens entre l’environnement et le travail social. Les données qualitatives ont été recueillies par le biais de trois groupes de discussion en ligne, regroupant des personnes étudiant en travail social dans des universités québécoises
Cette proposition offrira donc des pistes de réflexion sur les liens entre l’environnement et le travail social, mais surtout sur les outils méthodologiques pour les étudier. En effet, comment les épistémologies et approches féministes permettent-elles de donner un espace à la parole, aux émotions et aux entredeux, rejetant des catégories dichotomiques ? Comment arrivent-elles à transformer les espaces de formation ? Comment permettent-elles la connexion et la collectivisation, et, ultimement, la transformation sociale ?
Bibliographie
Anzaldúa, G. (1999). Borderlands / La Frontera: The New Mestiza (2nd ed.). Aunt Lute Books.
Centemeri, L. (2013). Crise écologique et dynamique locale : Un avenir pour les métiers du social ? Dans Le Travail social à la recherche de nouveaux paradigmes : Inégalités sociales et environnementales (p. 125 145). Éditions IES. http://books.openedition.org/ies/391
Dagenais-Lespérance, J. et MacDonald, S.-A. (2019). La justice environnementale: dans l’angle mort de la formation en travail social? Intervention, (150), 113 119. https://revueintervention.org/numeros-en-ligne/150/la-justice-environnementale-dans-langle-mort-de-la-formation-en-travail-social
Dominelli, L. (2013). Environmental justice at the heart of social work practice: Greening the profession. International Journal of Social Welfare, 22(4), 431 439. https://doi.org/10.1111/ijsw.12024
Freire, P. (2017). Pedagogy of the Oppressed. Penguin Classics.
Haraway, D. (1988). Situated Knowledges: The Science Question in Feminism and the Privilege of Partial Perspective. Feminist Studies, 14(3), 575 599. https://doi.org/10.2307/3178066
Hill Collins, P. (2004). Learning from the Outsider Within: The Sociological Significance of Black Feminist Thought. Dans The Feminist Standpoint Theory Reader: Intellectual and Political Controversies (p. 103 126). Routledge.
hooks, bell. (1991). Theory as Liberatory Practice. Yale Journal of Law and Feminism, 4(1), 1 12. https://heinonline.org/HOL/P?h=hein.journals/yjfem4&i=7
hooks, bell. (1994). Teaching To Transgress. Routledge.
Jones, P. (2018). Greening social work education: Transforming the curriculum in pursuit of eco–social justice. Dans The Routledge Handbook of Green Social Work (p. 558 568). Routledge. https://doi.org/10.4324/9781315183213
Ménochet, L. (2009). M. Durable et Mme Sociale. Le sociographe, n° 29(2), 13 18. https://www.cairn.info/revue-le-sociographe-2009-2-page-13.htm
Naples, N. A. (2003). Feminism and Method: Ethnography Discourse Analysis and Activist Research (1st edition). Routledge.
Powers, M. C. F., Schmitz, C. et Moritz, M. B. (2019). Preparing social workers for ecosocial work practice and community building. Journal of Community Practice, 27(3 4), 446 459. https://doi.org/10.1080/10705422.2019.1657217
|