Fiche Documentaire n° 6001

Titre Le placement à majorité : tensions de rôles au cœur de la parentalité d’accueil

Contacter
l'auteur principal

Auteur(s) GUéNETTE Martine
POIRIER marie andrée
CHOUINARD Isabelle
 
     
Thème  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

Résumé | Bibliographie | Les auteurs... | Article complet | PDF (.fr) | Résumé en anglais | PDF .Autre langue | Tout afficher

Résumé

Le placement à majorité : tensions de rôles au cœur de la parentalité d’accueil

Au cours des années 90, des chercheurs québécois dénoncent l’instabilité résidentielle et affective vécue par plusieurs enfants placés en milieu substitut en vertu de la Loi sur la protection de la Jeunesse (MSSS, 1998). En 2006, pour contrer cette crise ayant un impact sur le développement de ces enfants, le Québec inclut à sa législation des durées maximales d’hébergement. Cette modification vise alors à favoriser le maintien des liens entre l’enfant accueilli et les personnes qui lui sont significatives, ainsi qu’à leur assurer une plus grande stabilité (Saint-Jacques, Turcotte et Turcotte, 2012).

Depuis, le recours au placement à majorité est fréquent au Québec. Une étude longitudinale montre qu’il est le deuxième projet de vie le plus utilisé par la protection de la jeunesse (PJ) (Hélie et al., 2020). Toutefois, depuis 2008, 13% des enfants âgés entre zéro et un an, 17% de ceux entre deux et cinq ans et 28% des six à onze ans pour qui un placement à majorité a été prononcé ont vécu un déplacement (Hélie et al., 2020). Les ruptures restent donc un enjeu important au sein de ce type de placement.

Alors que le placement à majorité semble être un concept surtout utilisé au Québec, l’accueil à long terme a fait l’objet de quelques recherches ailleurs dans le monde. Celles-ci se sont intéressées à la permanence de ces placements (Biehal, 2019), à leur incidence sur les enfants placés (Biehal, 2014) et aux contacts entre les familles d’accueil et d’origine lors de ces mesures d’hébergement (Colling et al., 2020). Le vécu des parents d’accueil (PA) quant au placement à long terme se révèle très peu exploré d’un point de vue scientifique, et ce, bien que ces derniers soient des acteurs clés de ce type de placement. Si quelques études sur le sujet ont eu lieu (Blythe, 2012; Riggs, 2015; Schofield, Beek et Ward., 2012), aucune recherche québécoise n’a porté exclusivement sur l’expérience des PA en termes de placement à majorité.

Les études relatives au vécu des PA à long terme démontrent que celui-ci est marqué d’un nombre important de tensions au regard d’attentes, de messages et d’injonctions contradictoires sollicitant à la fois leurs rôles professionnel et parental. Ces contradictions concernent notamment : la place que les PA peuvent investir auprès de l’enfant placé à long terme (Blythe, 2012; Schofield et al., 2012) ; l’encadrement règlementaire des systèmes de PJ (Blythe, 2012; Riggs, 2015) et le positionnement des PA quant à la place de la famille d’origine (Colling et al., 2020). Même si ces tensions sont également dénoncées par les acteurs pratiquant l'accueil régulier, elles semblent exacerbées par l'idée permanence au sein du placement à long terme et pourraient être alimentées par la méconnaissance de la réalité des PA dans ce type de placement (Blythe, 2012; Rigg, 2015).

Dans cette perspective, il importe de mieux connaitre l’expérience des PA d’un enfant placé à majorité. Bien que les rôles attribués à ces acteurs soient encadrés d’un point de vue normatif, leur vécu demeure un angle mort des études. Comment les PA accueillant un enfant à majorité s’approprient-ils cette fonction? En quoi celle-ci se distingue-t-elle de l’accueil régulier? Comment déploient-ils leurs rôles au quotidien?

Cette communication présentera les éléments contextuels, conceptuels et méthodologique d’une recherche doctorale qualitative portant sur les tensions de rôles vécues par des PA lors d’un accueil à majorité. Alliant les concepts de rôle social et de tensions dialectiques dans un cadre conceptuel novateur, cette recherche, réalisée auprès de douze PA d’un enfant placé à majorité, permet de mieux situer les rôles parental et professionnel au cœur de cette fonction. Par la présentation de résultats préliminaires, cette communication mettra en exergue qu’à travers ce qui peut être perçu comme une crise de rôles, les PA arriment les diverses tensions vécues à travers un ensemble de pratiques qui leur permettent de trouver du sens à leur fonction.

Bibliographie

Biehal, N (2014). A Sense of Belonging: Meanings of Family and Home in Long-Term Foster Care, British Journal of Social Work, 44, 955-971.

Biehal, N. (2019). Stability and permanence in long term foster care. Developing Practice: The Child, Youth and Family Work Journal, (54), 79-98.

Blythe, S. (2012). The stories of women who provide long-term foster care in Australie. [Thèse de doctorat, University of Western Sydney, Australia]. Research Direct Library.

Hélie, S., Drapeau, S., Châteauneuf, D., Esposito, T., Noël, J., Poirier, M.-A. et Saint-Jacques, M.-C. (2020). L’évaluation des impacts de la Loi sur la protection de la jeunesse : Point de mire sur la réunification familiale et le replacement. Rapport déposé au ministère de la Santé et des Services sociaux, Institut universitaire Jeunes en difficulté, 399 p.

Collings, S., Wright, A. C., Spencer, M., & Luu, B. (2020). How foster carers experience agency support for birth family contact. Child & Family Social Work, 25(1), 83-91.

Ministère de la Santé et des Services sociaux (1998a). État de la situation et recommandations au regard des listes d’attente en protection de la jeunesse et de l’accessibilité aux services à la jeunesse (Rapport Lebon). Québec : ministère de la Santé et des Services sociaux.

Riggs, D. (2015). Australian foster carers' negotiations of intimacy with agency workers, birth families and children. Families, Relationships and Society, 4, (3), 433-448.

Saint-Jacques, M. C., Turcotte, G., Turcotte, D., Richard, M. C., Moisan, S., et Drapeau, S. (2012). Les modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse: leurs impacts sur les usagers. Centre de recherche JEFAR.

Schofield, G, Beek, M and Ward, E (2012) Part of the Family: Planning for permanence in long-term family foster care, Children and Youth Services Review, 34, 244 – 253.

Présentation des auteurs

Martine Guénette est professeure à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et candidate au doctorat en service social à l'Université de Montréal. Elle est membre étudiante de l'Équipe de recherche en placement et adoption.

Marie-André Poirier, Ph.D. est professeure titulaire en service social à l'Université de Montréal et est la directrice de cette thèse.

Isabelle Chouinard, Ph.D. est professeure agrégée à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et est la co-directrice de cette thèse.

Communication complète

Au cours des années 90, des chercheurs québécois dénoncent l’instabilité résidentielle et affective vécue par plusieurs enfants placés en milieu substitut en vertu de la Loi sur la protection de la Jeunesse (MSSS, 1998). En 2006, pour contrer cette crise du placement ayant un impact sur le développement de ces enfants, le Québec inclut à sa législation des durées maximales d’hébergement. Cette modification vise alors à favoriser le maintien des liens entre l’enfant accueilli et les personnes qui lui sont significatives, ainsi qu’à leur assurer une plus grande stabilité (Saint-Jacques, Turcotte et Turcotte, 2012).



Depuis, le recours au placement à majorité est fréquent au Québec. Une étude longitudinale montre qu’il est le deuxième projet de vie le plus utilisé par la protection de la jeunesse (PJ), tout juste après celui de la réunification familiale (Hélie et al., 2020). Toutefois, depuis 2008, 13% des enfants âgés entre zéro et un an, 17% de ceux entre deux et cinq ans et 28% des six à onze ans pour qui un placement à majorité a été prononcé ont vécu un déplacement (Hélie et al., 2020). Les ruptures restent donc un enjeu important au sein de ce type de placement.



Alors que le placement à majorité semble être un concept surtout utilisé au Québec, l’accueil à long terme a fait l’objet de quelques recherches ailleurs dans le monde. Celles-ci se sont intéressées à la permanence de ces placements (Biehal, 2019), à leur incidence sur les enfants placés (Biehal, 2014) et aux contacts entre les familles d’accueil et d’origine lors de ces mesures d’hébergement (Colling et al., 2020). Le vécu des parents d’accueil (PA) quant au placement à long terme se révèle très peu exploré d’un point de vue scientifique, et ce, bien que ces derniers soient des acteurs clés de ce type de placement. Si quelques études sur le sujet ont eu lieu (Blythe, 2012; Riggs, 2015; Hollett, Hassett et Lumsden, 2022; Schofield, Beek et Ward., 2012), aucune recherche québécoise n’a porté exclusivement sur l’expérience des PA en termes de placement à majorité.



Les études relatives au vécu des PA à long terme démontrent que celui-ci est marqué d’un nombre important de tensions au regard d’attentes, de messages et d’injonctions contradictoires sollicitant à la fois leurs rôles professionnel et parental (Blythe, 2012 ; Hollett, Hassett et Lumsden, 2022 ; Schofield, Beek et Ward., 2013). Ces contradictions concernent notamment : la place que les PA peuvent investir auprès de l’enfant placé à long terme (Blythe, 2012; Schofield et al., 2013) ; l’encadrement règlementaire des systèmes de PJ (Blythe, 2012; Riggs, 2015) et le positionnement des PA quant à la place de la famille d’origine (Colling et al., 2020). Même si ces tensions sont également dénoncées par les acteurs pratiquant l'accueil régulier, elles semblent exacerbées par l'idée permanence au sein du placement à long terme et pourraient être alimentées par la méconnaissance de la réalité des PA dans ce type de placement (Blythe, 2012; Hollett, Hassett et Lumsden, 2022 ; Rigg, 2015).



Dans cette perspective, il importe de mieux connaitre l’expérience des PA d’un enfant placé à majorité. Bien que les rôles attribués à ces acteurs soient encadrés d’un point de vue normatif, leur vécu demeure un angle mort des études. Comment les PA accueillant un enfant à majorité s’approprient-ils cette fonction? En quoi celle-ci se distingue-t-elle de l’accueil régulier? Comment déploient-ils leurs rôles au quotidien?



Cette communication présentera les éléments contextuels, conceptuels et méthodologique d’une recherche doctorale qualitative portant sur les tensions de rôles vécues par des PA lors d’un accueil à majorité. Alliant les concepts de rôle social et de tensions dialectiques dans un cadre conceptuel novateur, cette recherche, réalisée auprès de quatorze PA d’un enfant placé à majorité, permet de mieux situer les rôles parental et professionnel au cœur de cette fonction et les tensions y étant associées. Par la présentation de résultats préliminaires, cette communication mettra en exergue qu’à travers ce qui peut être perçu comme une crise de rôles, les PA arriment les diverses tensions vécues à travers un ensemble de pratiques qui leur permettent de trouver du sens à leur fonction.



Liste de références

________________________________________

Biehal, N (2014). A Sense of Belonging: Meanings of Family and Home in Long-Term Foster Care, British Journal of Social Work, 44, 955-971.



Biehal, N. (2019). Stability and permanence in long term foster care. Developing Practice: The Child, Youth and Family Work Journal, (54), 79-98.



Blythe, S. (2012). The stories of women who provide long-term foster care in Australie. [Thèse de doctorat, University of Western Sydney, Australia]. Research Direct Library.



Collings, S., Wright, A. C., Spencer, M., & Luu, B. (2020). How foster carers experience agency support for birth family contact. Child & Family Social Work, 25(1), 83-91.



Hélie, S., Drapeau, S., Châteauneuf, D., Esposito, T., Noël, J., Poirier, M.-A. et Saint-Jacques, M.-C. (2020). L’évaluation des impacts de la Loi sur la protection de la jeunesse : Point de mire sur la réunification familiale et le replacement. Rapport déposé au ministère de la Santé et des Services sociaux, Institut universitaire Jeunes en difficulté, 399 p.



Hollett, M., Hassett, A., et Lumsden, V. (2022). Foster caring as ‘professional parenting’: A grounded theory of the relationships between parent and professional in long-term foster care. Adoption & Fostering, 46(4), 413-436.



Ministère de la Santé et des Services sociaux (1998a). État de la situation et recommandations au regard des listes d’attente en protection de la jeunesse et de l’accessibilité aux services à la jeunesse (Rapport Lebon). Québec : ministère de la Santé et des Services sociaux.



Riggs, D. (2015). Australian foster carers' negotiations of intimacy with agency workers, birth families and children. Families, Relationships and Society, 4, (3), 433-448.



Saint-Jacques, M. C., Turcotte, G., Turcotte, D., Richard, M. C., Moisan, S., et Drapeau, S. (2012). Les modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse: leurs impacts sur les usagers. Centre de recherche JEFAR.



Schofield, G., Beek, M., Ward, E., & Biggart, L. (2013). Professional foster carer and committed parent: role conflict and role enrichment at the interface between work and family in long‐term foster care. Child & Family Social Work, 18(1), 46-56. doi:10.1111/cfs.12034



Schofield, G, Beek, M and Ward, E (2012) Part of the Family: Planning for permanence in long-term family foster care, Children and Youth Services Review, 34, 244 – 253.


Résumé en Anglais


Non disponible