Fiche Documentaire n° 6013

Titre Allier confiance en soi numérique et féminisme dans un projet d’Éducation permanente en Belgique francophone

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l'auteur principal

Auteur(s) PHILIPPART Anne
PEREAUX pascale
 
     
Thème Élaborer ateliers et outil pédagogique innovants avec des femmes en situation de précarité protéiforme  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

Allier confiance en soi numérique et féminisme dans un projet d’Éducation permanente en Belgique francophone

Dans un contexte où la société « dématérialisée » se diffuse amplement à travers les gestes du quotidien et une période traversée de crises multiples, force est de constater que si le numérique est omniprésent, ce n’est pas pour autant que toutes et tous y ont accès en termes de moyens techniques et économiques. Située en Belgique francophone, Vie Féminine, organisation d’éducation permanente, vise l’émancipation individuelle et collective des femmes. Ces dernières sont majoritairement en situation de précarités protéiformes. Dans leur pratique du numérique, l’accès au matériel présente une difficulté toujours très prégnante. Par ailleurs, si la conception et les usages du numérique revêtent une dimension genrée (Collet, 2019 ; O’Neil 2018,), d’autres inégalités sociales numériques (Granjon, 2022) sont à l’œuvre (confiance en soi, maîtrise des dimensions technologiques, maîtrise des enjeux liés à circulation des données, etc.). Le retour du terrain nous apprend que peu de professionnel.le.s dans les secteurs sociaux et culturels informent les bénéficiaires de l’utilisation et de la protection de leurs données, notamment quand ces dernie.e.rs sont invité.e.s à accepter les conditions générales de l’utilisation d’un service ou d’un compte en ligne. La dématérialisation est une facilité et une invitation acceptable pour une partie de la population. Quand il s’agit d’accompagner un public en situation de précarités, plus que fréquemment, l’impasse est faite sur une série d’explications sur les enjeux du consentement. Or, c’est pourtant auprès des personnes les plus vulnérables que l’éclairage informatif devrait se faire le compagnon fidèle de l’accessibilité (Filippova, 2019). Le projet vise dans un premier temps la mise en place d’ateliers axés sur l’accompagnement à la médiation numérique mais il ambitionne à la conscientisation des enjeux personnels et professionnels liés à cet environnement. En partenariat avec un centre d’Insertion socio-professionnelle (EDIT asbl) et l’Ecole Supérieure d’Action sociale HELMo ESAS, ces ateliers vont soutenir les participantes à déjouer les mécanismes de production des inégalités sociales numériques qui les concernent. En parallèle des ateliers de conscientisation et de formation/information, un outil pédagogique ludique (de type « jeu de plateau ») sera co-construit avec elles et les étudiant.e.s en travail social. En effet, les (futur.e.s) professionnel.le.s doivent, en première ligne, proposer un éclairage technocritique aux personnes accompagnées, sans quoi ces dernières ne pourront jamais exercer leurs droits en connaissance de cause. L’apport de moyens techniques et capacitaires pour réduire ces fractures numériques du 1er et du 2ème degré (Brotcorne et Mariën, 2022) devrait être le levier d’une émancipation sociale et culturelle. Et dès lors, agir sur la fracture du 3ème degré (i.e. tirer bénéfices des usages numériques dans les différentes sphères de socialisation). La communication portera sur un premier retour d’expérience de cette pratique émergente (HCTS, 2021) après une demi-année de mise en route de ce projet interinstitutionnel, co-construit avec les personnes concernées (public de Vie Féminine et étudiant.e.s en travail social) en vue d’un changement durable et émancipateur, non orienté exclusivement vers le seul techno-solutionnisme. Lui-même trop souvent porteur d’un impensé, celui qui sacrifie la question sociale (Castel, 1999) en résumant les problématiques sociales des personnes concernées à un apprentissage simplifié à visée fonctionnaliste de l’environnement numérique.

Bibliographie

Bouquet, B. & Crespo, G. (2013). Présentation. Vie sociale, 1, 15-19. https://doi.org/10.3917/vsoc.131.0015

Brotcorne P. & Marien I. (2022), Baromètre de l’inclusion numérique. Bruxelles : Vrije Universiteit Brussel – UCLouvain Fondation Roi Baudouin DOI

Castel, R. (1999) Les métamorphoses de la question sociale, Ed. Gallimard, coll. Folio Essais, 816p.

Collet, I. (2019) Les oubliées du numérique, Ed. Le Passeur, 213p.

Filippova, D. (2019), Technopouvoir : Dépolitiser pour mieux régner. Ed. Les liens qui libèrent, 283p.

Granjon Fabien, Classes populaires et usages de l'informatique connectée. Des inégalités sociales-numériques, Paris, Presses des Mines, coll. « Matérialismes », 2022, 360 p.

HCTS. (2021). Pratiques émergentes du travail social et du développement social. Haut conseil du travail social.DOI

Morozov E. (2014), Pour tout résoudre cliquez ici : L'aberration du solutionnisme technologique, Limoges, Ed. Fyp, 352 p.

O’Neil, C. (2018), Algorithmes, la bombe à retardement. Ed. Les Arènes, 341p.

Sadin, E. (2021), La siliconisation du monde, Ed. L’échappée, 288 p.

Sadin, E. (2015), La vie algorithmique : Critique de la raison numérique, Ed. L’échappée, 288p.

Présentation des auteurs

Anne Philippart. Enseignante-Chercheure HELMo.ESAS, Dpt social Liège (Belgique).
Assistante sociale et diplômée d’un Master en Ingénierie et actions sociales, actuellement ses travaux d’enseignement et de recherches portent sur les activités numériques dans les professions du travail social.


Pascale Pereaux, Enseignante HELMo.ESAS, Dpt social Liège (Belgique).
Impliquée dans l’enseignement par et pour le numérique depuis 2008, elle est aussi porteuse de différents projets numériques. Elle porte un intérêt pour la durabilité en méthodologie du projet en travail social ainsi qu’en usages numériques.

Communication complète

Dans un contexte où la société « dématérialisée » se diffuse amplement à travers les gestes du quotidien et une période traversée de crises multiples, force est de constater que si le numérique est omniprésent, ce n’est pas pour autant que toutes et tous y ont accès en termes de moyens techniques et économiques. Située en Belgique francophone, Vie Féminine, organisation d’éducation permanente, vise l’émancipation individuelle et collective des femmes. Ces dernières sont majoritairement en situation de précarités protéiformes. Dans leur pratique du numérique, l’accès au matériel présente une difficulté toujours très prégnante. Par ailleurs, si la conception et les usages du numérique revêtent une dimension genrée (Collet, 2019 ; O’Neil 2018,), d’autres inégalités sociales numériques (Granjon, 2022) sont à l’œuvre (confiance en soi, maîtrise des dimensions technologiques, maîtrise des enjeux liés à circulation des données, etc.). Le retour du terrain nous apprend que peu de professionnel.le.s dans les secteurs sociaux et culturels informent les bénéficiaires de l’utilisation et de la protection de leurs données, notamment quand ces dernie.e.rs sont invité.e.s à accepter les conditions générales de l’utilisation d’un service ou d’un compte en ligne. La dématérialisation est une facilité et une invitation acceptable pour une partie de la population. Quand il s’agit d’accompagner un public en situation de précarités, plus que fréquemment, l’impasse est faite sur une série d’explications sur les enjeux du consentement. Or, c’est pourtant auprès des personnes les plus vulnérables que l’éclairage informatif devrait se faire le compagnon fidèle de l’accessibilité (Filippova, 2019). Le projet vise dans un premier temps la mise en place d’ateliers axés sur l’accompagnement à la médiation numérique mais il ambitionne à la conscientisation des enjeux personnels et professionnels liés à cet environnement. En partenariat avec un centre d’Insertion socio-professionnelle (EDIT asbl) et l’Ecole Supérieure d’Action sociale HELMo ESAS, ces ateliers vont soutenir les participantes à déjouer les mécanismes de production des inégalités sociales numériques qui les concernent. En parallèle des ateliers de conscientisation et de formation/information, un outil pédagogique ludique (de type « jeu de plateau ») sera co-construit avec elles et les étudiant.e.s en travail social. En effet, les (futur.e.s) professionnel.le.s doivent, en première ligne, proposer un éclairage technocritique aux personnes accompagnées, sans quoi ces dernières ne pourront jamais exercer leurs droits en connaissance de cause. L’apport de moyens techniques et capacitaires pour réduire ces fractures numériques du 1er et du 2ème degré (Brotcorne et Mariën, 2022) devrait être le levier d’une émancipation sociale et culturelle. Et dès lors, agir sur la fracture du 3ème degré (i.e. tirer bénéfices des usages numériques dans les différentes sphères de socialisation). La communication portera sur un premier retour d’expérience de cette pratique émergente (HCTS, 2021) après une demi-année de mise en route de ce projet interinstitutionnel, co-construit avec les personnes concernées (public de Vie Féminine et étudiant.e.s en travail social) en vue d’un changement durable et émancipateur, non orienté exclusivement vers le seul techno-solutionnisme. Lui-même trop souvent porteur d’un impensé, celui qui sacrifie la question sociale (Castel, 1999) en résumant les problématiques sociales des personnes concernées à un apprentissage simplifié à visée fonctionnaliste de l’environnement numérique.

Résumé en Anglais

In a context where the "dematerialized" society is widely diffused through daily gestures and a period crossed by multiple crises, it is necessary to note that if the digital is omnipresent, it is not for all that all have access to it in terms of technical and economic means. Located in French-speaking Belgium, Vie Féminine, a permanent education organization, aims at the individual and collective emancipation of women. The communication will focus on a first feedback of this emerging practice (HCTS, 2021), after half a year of implementation of this inter-institutional project, co-constructed with the people concerned (Vie Féminine's public and social work students) in view of a sustainable and emancipating change, not exclusively oriented towards techno-solutionism. The latter is too often the bearer of an unthought, the one that sacrifices the social question (Castel, 1999) by summarizing the social problems of the concerned people to a simplified learning with a functionalist aim of the digital environment.