Fiche Documentaire n° 2313

Titre De la réforme d’un diplôme du travail social à la problématique renouvelée de l’alternance

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Auteur(s) MUSIEDLAK cyrille  
     
Thème  
Type Analyse d'expérience : d'intervention, de formation, de recherche...  

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Résumé

De la réforme d’un diplôme du travail social à la problématique renouvelée de l’alternance

Depuis sa création en 1967, le Diplôme d’Etat d’Educateur Spécialisé est réformé régulièrement: accessibilité par la VAE, création de référentiels de compétences, de formation, etc. Surtout, ces différentes réformes affirment le principe de l’alternance en conférant une place inédite aux terrains de stage devenus « sites qualifiants ». Cette nouvelle appellation ne reconnaît pas seulement le poids de la formation pratique : elle appelle également les praticiens professionnels à prendre part aux évaluations des stagiaires, à participer aux épreuves de certification et, donc, à maîtriser à minima les nouveaux outils pédagogiques prévus dans les textes. Ce cadrage du rôle des tuteurs dans une organisation apprenante génère donc une activité différente nécessitant la mise en œuvre de compétences en même temps qu’elle questionne les pratiques professionnelles. En effet, on peut s’attendre à un flottement entre deux fonctionnements : si les professionnels du secteur ont intégré la mouture du diplôme inhérent à la réforme de 1990, un laps de temps sera nécessaire avant l’appropriation de la dernière version de 2007. Un nouveau rapport doit donc être établi entre les instituts de formation et les terrains d’exercice professionnel. Il s’agit d’en définir les modalités pour une harmonisation des intervenants autour de l’apprenant.
L’IRTS de Champagne-Ardenne doit organiser des épreuves de certification en respectant la problématique de l’alternance à l’échelle régionale, en mobilisant les institutions du secteur sur un axe réflexif et enfin, à l’échelle structurelle, en mobilisant les professionnels sur un axe formatif et tutoral. Cette démarche évaluative nécessite d’effectuer des maillages entre deux mondes bien différents : le pédagogique et le professionnel. Pour ces deux espaces formatifs, il s’agit dans un premier temps de s’inscrire dans la transmission, dans un second dans l’évaluation. Or, aujourd’hui l’évaluation des compétences est à parfaire dans le parcours formatif des étudiants. Malgré une information active auprès des différents partenaires du secteur sur la dernière organisation du diplôme et ses exigences, il existe un décalage entre l’appropriation des acteurs du terrain, celles des stagiaires et celle de l’IRTS de Champagne-Ardenne concernant les attendus du diplôme actuel. L’alternance qui mobilise trois types d’acteurs (étudiants, professionnels et pédagogues) demande de la communication, de l’ingénierie et de la mutualisation.

Bibliographie

Jean Marie Barbier, Olga Galatanu (dir.), Les savoirs d’action : une mise en mots des compétences ? Paris, L’Harmattan 2004.
Brigitte Bouquet, Jean Yves Barreyre (dir.), Nouveau dictionnaire critique d’action sociale, Paris, Bayard 2006.
Marc Fourdrignier, L’alternance dans les formations sociales, Education permanente, n°190.
Pierre Lorent, Samira Mahlaoui, Le tutorat de futurs cadres du secteur social ; analyse d’une pratique dans le contexte de la démarche site qualifiant. CEREQ, NEF 50, juillet 2012.

Présentation des auteurs

Je suis formatrice à l'IRTS de Champagne-Ardenne. Je travaille plus particulièrement sur la filière des éducateurs spécialisés. Je suis responsable de la mise en oeuvre de l'épreuve de certification du domaine de compétences n°4. 2 : "travailler en partenariat et en réseau" dans le cadre du DEES.

Communication complète

Depuis sa création en France en 1967, le Diplôme d’Etat d’Educateur Spécialisé (DEES) est réformé régulièrement : accessibilité par la Validation des Acquis de l’Expérience, création de référentiels de compétences, de formation, etc. Surtout, ces différentes réformes affirment le principe de l’alternance en conférant une place inédite aux terrains de stage devenus « sites qualifiants ». Cette nouvelle appellation ne reconnaît pas seulement le poids de la formation pratique (2100 heures de stage pour 1450 heures de formation théorique) : elle appelle également les praticiens professionnels à prendre part aux évaluations des stagiaires, à participer aux épreuves de certification et, donc, à maîtriser a minima les nouveaux outils pédagogiques prévus dans les textes. Le rôle de ces professionnels dans une organisation apprenante génère donc une activité différente nécessitant la mise en œuvre de compétences en même temps qu’elle questionne les pratiques professionnelles . En effet, on peut s’attendre à un flottement entre deux fonctionnements : si les professionnels du secteur ont intégré la mouture du diplôme inhérent à la réforme de 1990, un laps de temps sera nécessaire avant l’appropriation de la dernière version de 2007 (avec un engagement des « nouveaux formés » dans une activité de tutorat). Un nouveau rapport doit donc être établi entre les instituts de formation et les terrains d’exercice professionnel ; il s’agit d’en définir les modalités pour une harmonisation des intervenants autour de l’apprenant.

La situation en région Champagne-Ardenne (France):
Les cadres pédagogiques de la filière des éducateurs spécialisés de l’Institut Régional du Travail Social ont pour mission de faire le lien entre les apprentissages dispensés en institut et ceux apportés sur site. Ils doivent rendre lisibles et compréhensibles les différents référentiels relatifs à la formation et au diplôme d’Etat. L’IRTS de Champagne Ardenne profite de deux visites de stage, réalisées en deuxième et troisième année de formation, pour aller à la rencontre des professionnels et évoquer en direct avec l’étudiant accueilli les attendus de cette séquence de formation sur site. Ces temps d’explicitation s’appuient aussi sur une plaquette d’information réalisée par l’institut (présentation des référentiels : professionnel, de compétences, de certification, de formation).

Le constat d’un écart :

Le nouveau diplôme impose l’organisation d’une épreuve s’appuyant sur la notion de « travail en partenariat et en réseau » qui s’appuie sur les annotations des professionnels à propos du stage de l’étudiant. A cet occasion, on peut repérer que, malgré la dynamique de communication engagée par l’IRTS sur la réforme de ce diplôme, la bonne collaboration avec les différents terrains de stage et l’existence d’un référentiel de compétences, les évaluations des stagiaires proposées par les sites qualifiants ne correspondent pas toujours aux attendus de la certification.
En effet, les membres du jury (professionnels du secteur et formateurs) mobilisés sur l’épreuve constatent que majoritairement les évaluations rédigées par les référents professionnels ne sont pas adaptées. Faute de développement, elles ne permettent pas toujours l’approche contradictoire attendue et annoncée dans le référentiel de certification . Les deux compétences attendues chez les candidats pour valider l’implication dans les dynamiques partenariales, institutionnelles et interinstitutionnelles au niveau du travail en partenariat et en réseau sont de développer des activités en partenariat et en réseau et contribuer à des pratiques de développement social territorialisé et de développer et transférer ses connaissances professionnelles.
Or, les membres du jury font le constat que les compétences développées par le candidat accueilli ne sont pas renseignées de manière explicite dans les évaluations. Il leur est donc, dans la majorité des cas, impossible de s’appuyer sur ces documents pour procéder à l’objectif de l’épreuve, l’évaluation des compétences acquises. Le dossier écrit réalisé par le candidat devient l’élément central à l’évaluation alors que le référentiel de certification demande une prise en compte des différentes pièces.

La problématique de l’alternance :

Il semble, comme le revendique Michel Chauvière, que « (...) même bien construit et soumis au plus grand nombre d’avis autorisés, un référentiel reste un instrument administratif réducteur et plutôt statique. Par cette voie, on a du mal à dire ce qu’est réellement la dynamique d’un métier ni ce qu’est un savoir faire en situation » . Les référentiels à eux seuls ne permettent donc pas aux professionnels engagés dans l’accueil de stagiaires d’assumer leur nouvelle fonction et de décrypter les attendus des séquences de formation sur sites. Ces réformes inscrites sur le modèle de la compétence mettent les professionnels en difficulté pour la lecture et l’évaluation des situations de travail rencontrées par le stagiaire.
Ces modalités de restitution sont inédites dans le champ du travail social. Les référents professionnels (au-delà des seuls éducateurs spécialisés) n’ont pas cette culture de l’arpentage des référentiels car ils n’ont pas eu cette expérience au cours de leur propre formation.
La formation en alternance nécessite d’effectuer des maillages entre deux mondes bien différents : le pédagogique et le professionnel, les savoirs académiques et les savoirs d’action . Malgré une information active auprès des différents partenaires du secteur sur la dernière organisation du diplôme et ses exigences, il existe un décalage entre l’appropriation des acteurs du terrain, celles des stagiaires et celle de l’IRTS concernant les attendus du diplôme actuel. L’alternance qui mobilise trois types d’acteurs (étudiants, professionnels et pédagogues) demande de la communication, de l’ingénierie et de la mutualisation. On propose ici un plan d’action qui s’appuie sur deux leviers : un travail auprès des tuteurs, d’une part, le recours à une publication, d’autre part.

Les tuteurs référents, une ressource humaine à mobiliser
Une formation spécifique destinée aux référents professionnels est proposée dans le catalogue des perfectionnements professionnels dispensés par l’IRTS. Elle a pour principaux objectifs d’installer la « fonction tutorale » en situation de travail, de concevoir l’accompagnement formatif en milieu professionnel, de construire une pédagogie de la transmission des savoir-faire, de maîtriser la méthodologie de supervision et d’évaluation d’un parcours formatif, de connaître et maîtriser la notion de site qualifiant et, enfin, de connaître les dispositifs de qualification et maîtriser les différents référentiels.
Cette action de formation permet d’approfondir et de développer les compétences des tuteurs en favorisant la reconnaissance de leurs expériences.
En amont de mettre les professionnels en situation d’évaluation de compétences, cet espace de rencontre peut être utilisé pour entendre ces professionnels sur leurs besoins dans leur fonction de tutorat. En effet, les tuteurs référents, professionnels des terrains, peuvent être sollicités pour partager leurs attentes et présenter leurs savoir-faire. Dans cette volonté d’associer les différents partenaires à cette démarche d’amélioration de la certification, il est important que les terrains d’exercice professionnel soient inscrits au même titre que le centre de formation dans ce processus. Les tuteurs référents sont, par là même, des interlocuteurs privilégiés.

« Eclairages », support de communication, une opportunité à saisir
L’IRTS édite un journal d’information d’une dizaine de feuillets en recto verso. Il propose un espace d’écriture et de publication pour des contributions pouvant apporter un recul et une mise en perspective du travail social. Son intention est de participer (...) au partage des connaissances, au développement des compétences, à l’évolution des attitudes professionnelles mais aussi à la passion du savoir et à l’élaboration de la pensée . L’idée est d’utiliser l’attractivité de ce support de communication pour proposer des regards pluriels sur la formation des éducateurs spécialisés. Symbole de l’alternance, le journal est à destination des étudiants, des partenaires et des formateurs du secteur. Dans le but de co-construire une collaboration plus efficace entre les terrains et le centre de formation, ces différents acteurs peuvent être mis à contribution. La rédaction d’un numéro spécifique peut mettre cette dernière en œuvre. Un double objectif peut être visé, celui d’une explicitation, générée par un travail élaboré in situ, et une expérimentation dans le croisement des regards, des postures.
La rédaction d’articles est à envisager alors comme un outil interactif de mutualisation d’information. L’idée est de croiser les différents points de vue sur la formation en la traitant sous divers angles : la logique de l’apprenant avec la contribution des étudiants, celle du professionnel avec les tuteurs référents et enfin celle du pédagogue avec la participation de formateurs, avec l’enjeu de mettre en lumière la notion de compétences.


Au total, cette nouvelle forme de collaboration entre pédagogues et intervenants de terrain peut être l’occasion de construire une nouvelle culture de l’apprentissage, voire de rapprocher des univers professionnels historiquement en opposition (les concepteurs, les exécutants). Mais au-delà de cette intention certes louable, la question reste de trouver les modes de traduction pour que ces deux univers distants, puissent se comprendre et œuvrer ensemble à la professionnalisation des étudiants.

Résumé en Anglais

In France, the reform of a traditional diploma in social work reinforces the place of the professional practitioners in skills’ evaluation of the trainees. This participation to the certification asks them to have an expert knowledge in new educational tools planned in legislative texts. In this professionalization’s support, a new relationship must be established between the training’s institute and the professionals exercise’s site. This article proposes tracks to improve the collaboration between three types of actors (students, professionals and teachers) concerned by the training.