Fiche Documentaire n° 3909

Titre La participation des bénéficiaires du revenu minimum au dispositif d'Insertion

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Auteur(s) FANGET Annick  
     
Thème Intervention Sociale à Dimension Collective  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

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Résumé

La participation des bénéficiaires du revenu minimum au dispositif d'Insertion

En France, le 1er décembre 2008, la loi sur le revenu de solidarité active (1) est promulguée .  Son organisation prévoit la participation des bénéficiaires de ce minimum social(2). Dans le cadre d’un travail de partenariat mené par un département et une association (3), en janvier 2012, une Recherche-Action Collaborative (RAC) (4) a été proposée par une université (université Jean Monnet Saint Etienne). Celle-ci, financée par la région Rhône Alpes, suite à un appel à projet de l’université citoyenne et solidaire, a pu être menée sur  une durée de 18 mois. D’autres acteurs ont été impliqués : la MRIE(5)  et l’IREIS(6).
À partir de cette coopération institutionnelle et la dynamique impulsée par la RAC, plusieurs actions ont pu être initiées, pour penser avec les acteurs de terrain (professionnels et bénéficiaires), leur participation à ce dispositif d’insertion. Ces dernières se sont organisées sous deux modalités différentes mais complémentaires : les groupes de paroles et les actions collectives.
Au terme de la RAC, 4 propositions ont été soumises aux institutions chargées de l’accompagnement des bénéficiaires:
-         La construction du rôle de représentant des bénéficiaires
-         La mise en place de groupes-ressources
-         Le développement et le soutien des actions collectives
-         L’accessibilité à l’information pour les bénéficiaires
Le centre de formation des travailleurs sociaux partie prenante de cette RAC a trouvé pertinent de mettre les étudiants en position expérimentale. Ils ont pu développer eux mêmes des actions à dimension collective. Ils étaient reçus en stage au sein du département, encadrés par les référents de parcours accompagnant des bénéficiaires du RSA. Au delà de l'intervention sociale à dimension individuelle, l'occasion de mener une conduite de projet avec un groupe de bénéficiaire du RSA, a été saisie. Chacun a réuni des usagers intéressés autour d'une même thématique et mis en œuvre la méthodologie de l'action sociale d’intérêt collectif in vivo. Ils ont donc sollicité l'avis des usagers sur une situation insatisfaisante et ensemble mis en place des actions concrètes de résolutions de problèmes. Les encadrants de stage peu habitués à utiliser cette approche se sont pourtant sentis partie prenante, et soutenus par un formateur ont renoué avec les étapes de construction de projet. Leur employeur, devant le succès de cette première action, a souhaité renouveler l'opération l'année suivante, et l'approche participative a été inscrite dans les nouveaux objectifs du service.
Cette expérience a été un moyen de renforcer les liens entre les institutions professionnelles et les centres de formation. L’implication des étudiants dans cette RAC a permis aux professionnels de réinterroger leur pratique.
Elle a été l’occasion de travailler la complexité de la prise en compte individuelle et collective, dans les démarches d’accompagnements, mais aussi de réfléchir sur la place des usagers dans les dispositifs socio-éducatifs.
(1) LOI n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion - http://www.legifrance.gouv.fr
(2)Article L262-39 « Le président du conseil général constitue des équipes pluridisciplinaires composées notamment de professionnels de l'insertion sociale et professionnelle, [..] et de représentants des bénéficiaires du revenu de solidarité active »
(3)Association de Gestion de l'Action Sociale des Ensembles Familiaux, est une association loi 1901, chargée de l’insertion professionnelle des allocataires au RSA
(4) Autand Dorier C, Jouve E, Therond I La participation des allocataires RSA rapport Recherche Action déc 2013
(5)Mission régionale de l’Information sur l’Exclusion
(6)Institut Régional et Européen des métiers de l'Intervention Sociale

Bibliographie

BACQUE MH, BIEWENER C L'empowerment, Ed La découverte, 2013
BLONDIAUX Loïc « Le nouvel esprit de la démocratie : actualité de a démocratie participative » mars 2001, édition le seuil et la république des idées.
DEPENNE Dominique « Éthique et accompagnement en travail social » édition ESF, 2012
GAUDIN Jean Pierre « La démocratie participative » dans informations sociales n°158, « Les services publics face à leurs usagers. Modernisation de l'administration et qualité du service »
JANVIER Roland et MATHO Yves, « Comprendre la participation des usagers », Dunod, 4e éd. 2011
OLSOM Mancur « logique de l’action collective » édition de l’université de Bruxelles, 2011
LAFORGUE Denis « Pour une sociologie des instituions publiques contemporaines » dans socio-logos : revue de l’association française de sociologie, n°4, 2009
SINTOMER Yves « Du savoir d’usage au métier de citoyen » dans Raisons publiques  n°31, août 2008, p 116-117
BERLIOZ Gilbert et BARBE Laurent « Propositions méthodologiques pour la mise en place d’une participation des usagers à des commissions consultatives concernant la lutte contre l’exclusion » rapport pour la Direction Générale de l’Action Sociale, Ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité, Ministère du logement et de la ville, novembre 2009

Présentation des auteurs

Isabelle ThEROND Formatrice permanente IREIS. Coordinatrice formatrice de travailleurs sociaux de 2006 à ce jour, IREIS de la Loire, Lycée St Ennemond
Chargée d'études de 2007 à 2013
Participation à une recherche-action sur la participation des allocataires du RSA
Evaluation du dispositif Natura 2000 et réalisation d'un cahier technique sur la conservatoire RhônesAlpes des Espaces Naturels
Etat des lieux sur les conditions d'habitation des affilliés CARMI (Caisse Régionale de la sécurité sociale dans les Mines du Centre)
Réalisation d'un diagnostic sur la manière de mener la concertation dans le cadre de la protection d'espèces faunistique et floristique au sein du Conservatoire Rhône- alpes des Espaces Naturels(CREN)
Intervention dans le secteur professionnel du social de 1994 à 2006
Monitrice éducatrice dans le champ de l'exclusion sociale et dans différentes structures du champ médico-social et de l'animation (Public enfant , adolescents et jeune adulte)
Annick FANGET Directrice de l'IREIS de la Loire centre de formation depuis 2007 à ce jour
2003/ 2006 chargée de mission Observatoire de l'action sociale du Conseil général 42et responsable d'Unités d'Intervention Sociale
1997/ 2003 formatrice aux métiers de l'intervention sociale et de 1982/1997 divers fonctions dans le travail social

Communication complète

En France, dans le cadre des politiques sociales de lutte contre la précarité et l’exclusion, le 1er décembre 2008, est promulguée la Loi sur le revenu de solidarité active[1]. Cette politique a pour ambition de permettre à tous les bénéficiaires de vivre décemment[2]. Son organisation prévoit la participation des allocataires de ce minimum social [3].

Dans le cadre d’un travail de partenariat mené par un Département (anciennement conseil général) et une association[4], en janvier 2012, une Recherche-Action Collaborative (RAC) a été proposée par une université[5]. Celle-ci, financée par la région Rhône Alpes, à la suite d’un appel à projet de l’Université citoyenne et solidaire, a pu être menée sur une durée de 18 mois. D’autres acteurs ont été impliqués : la MRIE[6]  et l’IREIS[7].

À partir de cette coopération institutionnelle, qui s’est concrétisée par la mise en place d’un comité de pilotage, une nouvelle dynamique a pu être initiée grâce à l’intervention de la chercheure[8].

La RAC a permis de sensibiliser les professionnels de l’action sociale (direction et acteurs de terrain) sur la démarche participative. Sensibilisation qui a généré une prise de conscience de son intérêt ; une appréhension des situations sociales des publics ; une modification des pratiques professionnelles.

Plusieurs actions ont pu être initiées, pour penser avec les acteurs de terrain (professionnels et bénéficiaires), leur participation à ce dispositif d’insertion. Ces dernières se sont organisées sous deux modalités différentes, mais complémentaires :

-         Les groupes de paroles, organisés autour de différents temps d’échanges, entre professionnels ; entre allocataires, mais aussi entre chacune des deux catégories d’acteurs.

-         Les actions collectives, qui pour certaines déjà « existantes clandestinement », ont pu être reconnues institutionnellement qui, grâce à la recherche-action, leur développement a pu être favorisé.

Au cours de la RAC, le service d’insertion a profité de la réécriture de son projet de service, pour introduire les actions collectives comme outil d’accompagnement des allocataires.

De même, l’association AGASEF a initié des actions similaires encadrées autant par les professionnels que par les membres du conseil d’administration. Ceci nous permet de faire un lien avec l’exigence que pose Paulo Freire[9] de sensibiliser autant les dirigeants que les allocataires sur les situations sociales afin d’intervenir efficacement. Cependant, il est important de tenir compte du facteur temps pour mener ce travail, de la nécessité d’organiser et de budgétiser ces actions afin de favoriser le pouvoir d’agir des bénéficiaires, tel que Claire Jouffray[10] l’explique.

Même si des initiatives ont pu être pensées et concrétisées durant cette recherche, cette dernière a été l’élément déclencheur pour conscientiser et initier de nouvelles pratiques.

C’est pour cela qu’à son terme, 4 propositions ont été soumises aux institutions chargées de l’accompagnement des bénéficiaires :

-         La construction du rôle de représentant des bénéficiaires : les personnes assumant cette fonction depuis la création du RSA, n’ont jamais suivi de formation leur permettant d’habiter leur rôle. Alors on peut constater qu’elles n’assurent pas une représentation de l’ensemble des allocataires.

-         La mise en place de groupes-ressources : l’isolement des représentants nommés a permis de repérer un besoin de soutien qu’un groupe d’allocataires pourraient assurer.

-         Le développement et le soutien des actions collectives : les initiatives prises ont pu démontrer, pour leurs pérennités, la nécessité d’une institutionnalisation de cette pratique qui reste complémentaire aux accompagnements individuels.

-         L’accessibilité à l’information pour les bénéficiaires : des lacunes ont pu être repérées justifiant une forte demande d’information exprimée autant de la part des bénéficiaires que des professionnels.

La concrétisation de la participation des bénéficiaires du RSA a abouti grâce à la prise de conscience de l'intérêt de développer des actions à dimension collective au sein desquelles le bénéficiaire du minima social a toute sa place en tant qu'acteur. Cela est passé par des étapes initiées pour partie dans le cadre de la collaboration avec le centre de formation en particulier de formation des assistants de service social (ASS). En effet, depuis 2006, en France, le parcours de formation des ASS comprend l'acquisition de compétences dans l'accompagnement d'Interventions Sociales d'Intérêt Collectif (ISIC). La méthodologie de projet doit être acquise et est l'objet une validation pour l'obtention du Diplôme.

Pour autant traditionnellement, les ASS sont plus à l'aise dans les accompagnements individuels dits : Interventions Sociale d'Aide à la Personne (ISAP) et ont des difficultés à se lancer dans la dimension collective.

Quoi de plus efficace que de passer par l'apprentissage grandeur nature et l'expérimentation pour acquérir la méthodologie d'actions à dimension collective ! Le souci, au début de la RAC, est que les professionnels qui encadrent nos étudiants au cours des stages ne maîtrisent pas pour la grande majorité cette méthodologie. Ils se sentent insécurisés pour accompagner les étudiants étant eux même en difficulté. Il est apparu opportun dans le cadre de la participation à la RAC de proposer un appui méthodologique aux professionnels comme aux étudiants.

Le centre de formation a mis en place des rencontres régulières (4 à 5 sur 6 mois) où étaient présents des encadrants de stage et les étudiants de ce qui a été appelé « groupe ressources ISIC ». Les objectifs de ces rencontres sont :



Échanger et soutenir les étudiants et les tuteurs de stage dans la mise en œuvre et la lisibilité de l'action menée.

Reprendre les éléments théoriques de la méthodologie ISIC avec les tuteurs et les étudiants

Accompagner tuteurs et étudiants dans la compréhension des enjeux de l'ISIC tant au niveau des attendus du DEAS, que comme modalité innovante en travail social.



Ce groupe ressource réunissait 12 à 14 personnes (tuteurs et stagiaires). Le contenu des séances est le suivant : chaque étudiant présente (en lien avec son tuteur) l'état d'avancement du travail engagé en terme de projet en fonction de la réalité du terrain. Rappelons que la méthodologie de projet inclut le constat de départ, le diagnostic, les actions qui en découlent avec l'identification des objectifs, des moyens humains et financiers et des indicateurs d'évaluation.

Tous les membres du groupe réagissent et participent à la réflexion sur chaque situation présentée.

L'animatrice du groupe (formatrice IREIS) propose en fin d'exposé de l'étudiant une sorte de relevé de conclusions à l'oral pour permettre au binôme (étudiant/tuteur) de se donner des objectifs pour la séance suivante.

L'objectif prioritaire est de permettre ou d'amener chaque étudiant à présenter son travail, de faire des rappels méthodologiques ou apports théoriques (empowerment par ex). La notion d'empowerment est dans ces circonstances mise en avant dans le sens des théories de la transformation sociale à travers émancipation individuelle et collective.[11]



Avec du recul (le groupe ressource fonctionne depuis maintenant 3 ans), l'évaluation est positive de part et d'autre. Les étudiants concernés ont démontré une appropriation facilitée de la méthodologie. Ce sont plus de 15 professionnels qui ont bénéficié des apports méthodologiques. Aujourd'hui, grâce à leurs nouveaux acquis, ils s'autorisent plus facilement à développer des actions à dimension collective, car plus sûrs d'eux. On a également noté une évolution dans la manière d'accepter puis de favoriser les initiatives des bénéficiaires du RSA eux-mêmes. La « prise de risque » est jugée moindre qu'auparavant. La reconnaissance de cette pratique professionnelle a enclenché une dynamique mobilisatrice et valorisante tant auprès des professionnels que des bénéficiaires du RSA.



[1] LOI n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion - http://www.legifrance.gouv.fr

[2] Article 3, chapitre II, section I, art L262.1  « Le revenu de solidarité active a pour objectif d’assurer à ses bénéficiaires les moyens convenables d’existence »

[3]  Article L262-39 « Le président du conseil général constitue des équipes pluridisciplinaires composées notamment de professionnels de l'insertion sociale et professionnelle [...] et de représentants des bénéficiaires du revenu de solidarité active »

[4] Association de Gestion de l'Action Sociale des Ensembles Familiaux, est une association loi 1901, chargée de l’insertion professionnelle des allocataires au RSA

[5] Sous la responsabilité de Claire Autant Dorier, enseignante chercheure, membre du Laboratoire Max WEBER, maitre de conférences, Université Jean Monnet, Saint Etienne.

[6] Mission régionale de l’Information sur l’Exclusion

[7] Institut Régional et Européen des métiers de l'Intervention Sociale

[8] Élodie Jouve, ethnologue, Université Jean Monnet, Saint Etienne

[9] Paulo FREIRE « pédagogie des opprimés » Petite collection maspero, avril 1974

[10] Claire JOUFFRAY « Développement du pouvoir d’agir. Une nouvelle approche de l’intervention sociale » presses de l’EHESP, 2014

[11] Marie Hélène BACQUE et Carole Biewener L'empowerment, une pratique émancipatrice édition la Découverte collection Politique et société, 2013

Résumé en Anglais


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