Fiche Documentaire n° 6105

Titre L'accompagnement social en situation de crise sanitaire au risque de la reductio ad Covidum-19

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Auteur(s) ZOUNGRANA Jean  
     
Thème  
Type Recherche : orientée vers la pratique, action, évaluative...  

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Résumé

L'accompagnement social en situation de crise sanitaire au risque de la reductio ad Covidum-19

Que le travail social soit en crise, l’histoire de ce secteur en témoigne depuis de nombreuses années. « Pourquoi le travail social ? » titrait déjà en 1972 la revue Esprit. Cette interrogation est reformulée autrement en 1998 quant à son utilité pour les usagers : « A quoi sert le travail social ? » ; reprise encore plus récemment en 2022 dans un contexte de précarisation de la population : « Que peut encore le travail social ? » Cette crise (à répétition) révèle-t-elle la crise de la société elle-même ou lui est-elle extensible ? Bien plus. Tout se passe comme si le travail social doutait de la pertinence de sa propre légitimité. Or, selon le sens étymologique, la crise relève d’une situation d’exception. Mais une exception qui devient normale voire permanente, comme semble l’indiquer la revue Esprit, postule que cette crise permanente relève de l’oxymore et nécessite une réévaluation du regard. D’où l’interrogation fort pertinente de Myriam Revault d’Allonnes : une crise permanente est-elle encore une crise ? (La crise sans fin, Seuil, 2012). Et si ce qu’on appelle la crise du travail social était consubstantielle à la nature même du travail social ? Sans doute que l’expression même de travail social serait problématique. De sorte que si ce secteur en souffrance se trouve percuté de plein fouet par une crise sanitaire gigantesque, c’est une crise qui se rajoute à une crise préexistante : on aurait affaire à une crise du second degré, une crise complexe.

Et, si sortir de la crise semble utopique, en raison de l’idée qu’elle serait constitutive de notre vie, comment alors composer avec ?
Il nous semble que c’est précisément ce que les travailleurs sociaux n’ont eu de cesse d’élaborer au regard des mutations de la société et plus précisément lors de la pandémie occasionnée par la Covid-19 en 2020.
Cette crise introduit-elle une rupture, un momentum susceptible de modifier durablement les pratiques professionnelles et in fine le travail social ?

Car en effet, cette pandémie a eu un fort impact sur les pratiques des métiers des travailleurs sociaux. Cette situation inédite les a conduits à prendre des initiatives nouvelles, des décisions nouvelles et à adapter leurs pratiques dans un contexte exceptionnel en perpétuelle évolution. Des problématiques nouvelles sont apparues, des sujets auxquels les professionnels n’ont jamais été confrontés auparavant. Dans les délais restreints, les services sociaux ont dû réorganiser leurs méthodes de travail en s’adaptant chaque jour dans un contexte évolutif. Mais, n’est-ce pas le propre du travail social ? « L’action qui vise à aider une personne ou un groupe de personnes est constitutive du travail social. » (Cristina de Robertis, Méthodologie de l’intervention en travail social, EHESP, 2007) Or, certaines consignes préconisées par le gouvernement sont paradoxales et difficilement réalisables. De plus, les professionnels de l’action sociale sont tiraillés entre le maintien de leurs activités et le respect des règles sanitaires en vigueur. Plusieurs problématiques sociales sont à l’ordre du jour tels que la fermeture de certains services remplacés par de simples échanges téléphoniques. Les mesures sanitaires instaurées, telles que la distance physique et l’ensemble des mesures barrières limitent considérablement le contact et la proximité des professionnels. Mais le travail social peut-il exister sans rencontre, sans la rencontre de l’autre ? Aller vers, aller avec l’autre dans une éthique d’engagement réciproque, n’est-pas le propre de l’accompagnement ?

La difficulté à respecter les consignes gouvernementales a conduit certains professionnels à agir en toute autonomie avec peu de ressources et en dehors du cadre institutionnel afin de ne pas laisser tomber des bénéficiaires de leur intervention. La nécessité du care s’est imposée à eux comme un incontournable de l’action sociale.

C’est pourquoi toute réduction ad Covidum se doit d’être déconstruite au regard de la longue histoire du travail social qui a toujours été inventif, imaginatif et novateur afin de répondre attentivement aux besoins sur le long terme mais aujourd’hui, au regard des crises à répétition, il est de plus en plus invité à répondre aux urgences dans l’urgence. Si la crise sanitaire a induit de nouvelles pratiques en terme d’accompagnement (Dubasque D., 2022), dans leurs dynamiques propres, elles ne sont pas toutes réductibles à la Covid-19 : nouvelles pratiques ou nouvelles adaptations ? Telle est, dans cette communication, l’hypothèse qu’on se propose de vérifier à la lumière de l’histoire des pratiques professionnelles et de leurs actualités agissantes en situation de Covid-19 à partir d’observations et de 7 entretiens menés auprès de ces professionnels du care et de sollicitude.

Bibliographie

Dubet, F. (2002) Le déclin des institutions, Seuil.
Haut Conseil du Travail Social, (2022) Livret vert.
Haut Conseil du Travail Social, (2021) Le Travail Social au défi de la crise sanitaire.
Kowalczuk, S. (2022) Assistant de service social au cœur des solidarités, Ed. Champ social.
Pascal, H. (2020) Histoire du travail social, EHESP, 2ième édition.
De Robertis, C. (2013) « Pratique professionnelle : une tentative de définition », in Institutions, acteurs et pratiques dans l’histoire du travail social, EHESP,
De Robertis, C. (2007). Méthodologie de l’intervention en travail social, EHESP.
Revault d’Allonnes, M. (2012). La crise sans fin, Seuil.
Dubasque, D. (2022). Comment la crise liée au Covid-19 a bouleversé les pratiques professionnelles des travailleurs sociaux et posé la question de leur devenir. Erès, Vie sociale, 37, 37-49.

Présentation des auteurs

Jean Zoungrana est philosophe et sociologue.
Maître de conférence associé à la Faculté des Sciences Sociales
de l'Université de Strasbourg, il est membre du Laboratoire SAGE (UMR 7363) (Sociétés, Acteurs, Gouvernement en Europe).
Il est également responsable pédagogique à l'ESEIS (Ecole Supérieure Européenne de l'Intervention Sociale) à Strasbourg.
Spécialiste de Michel Foucault, ses recherches portent sur la citoyenneté, les modes de participation citoyenne, les questions de solidarité et de gouvernementalité.

Communication complète


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Résumé en Anglais


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